icone plume

L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
07/05/2011

Trente ans après le triomphe de Mitterrand le temps de la » tchache » est venu.

D'un mot, d'un seul, considérons d'abord que pour arriver sur la plus haute marche du pouvoir il faut une volonté inébranlable. Songeons que François Mitterrand s'y est repris à trois fois pour devenir président : 1965: je provoque De Gaulle et l'oblige à un second tour, 1974: je frôle la victoire face à un Giscard qui nous la fait jeune et moderne, 1981: je le bats de peu sur le fil porté par un désir de changement, une envie d'alternance. Aujourd'hui, le calendrier de l'élection présidentielle a changé : le quinquennat a rendu frénétique le vainqueur, surtout quand il aspire à rempiler.
Le temps n'est plus le même. Mitterrand, justement, n'aimait rien autant que de le prendre, qu'il s'agisse de sortir de l'Elysée pour acheter un livre, visiter les arbres de sa propriété de Latche, ou décider, sous la pression de la rue, de renoncer à la réforme de l'école libre.
Le temps, plus que jamais, est celui de l'apparence : le fond compte de moins en moins, il cède le pas à la forme, au clinquant. Au cynisme. Nous sommes irrésistiblement entrés dans l'univers de la communication politique. Non point que Mitterrand n'en usait point mais il avait, force réseaux, su tisser jusqu'à l'extrême la toile de son pouvoir et y nicher la quiétude de sa double vie.
Par comparaison, nous dirions, aujourd'hui, que l'homme qui a élu domicile en 2007, à l'Elysée ne craint point, au contraire, de révéler ces vies-là, sans doute encouragé à le faire par quelque gourou en vue, rompu au discours de la sociologie post-moderne. L'important déclarait, il y a peu, à notre confrère du Journal du Dimanche, Michel Maffesoli c'est que le chef « tchache, que cela ronronne. Je trouve que Sarkozy joue bien ce rôle. Aujourd'hui, il dit cela et, demain, il dit autre chose. On va le critiquer mais je dis aussi que ce n'est pas nécessaire qu'une parole soit suivie d'effet. En réalité il fait, mais en « bricolant », au sens lévi-straussien, il s'adapte, il change. »
Prendre, à la lettre, ce discours-là c'est renvoyer à ces sempiternels débats internes, une gauche qui aspire, trente ans après, à l'alternance au sommet. C'est aussi, quelque part, la placer en face de son immense responsabilité alors, que terriblement déçu par la façon dont on le gouverne, le pays est capable, demain, de sombrer par dépit dans le populisme. Les ouvriers dont on dit qu'ils voteraient Le Pen n'ont plus grand chose à faire de la « tchache » : ils cherchent à retrouver du boulot et à en trouver àleurs enfants ; la classe moyenne qui s'appauvrit a besoin de croire que la machine peut repartir et les petits patrons aussi.
Le 10 mai 2011, au-delà des évocations historiques de Mitterrand, entrant la rose à la main au Panthéon, les Français aimeraient sans doute entendre une parole qui porte et rassemble. Mais qui peut bien la tenir ?

Joël Aubert

Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

A lire ! Éditos précédents