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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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07/09/2007

Le temps du rugby-tv

Jean-Paul Jaud, réalisateur émérite de Canal+, défend avec le talent des créateurs de spectacle, la place et même le rôle de la télévision dans l'essor du rugby. Une armée de caméras, de la subjectivité,c'estdire un oeil complice pour mettre en valeur une attitude, la plongée dans les profondeurs des regroupements où le ballon attend son heure, les traits de fatigue: rien ne doit échapper à l'objectif de la caméra qui propose cette nouvelle "dramatique". Celle qui fait dire, à un témoin des évolutions récentes de ce jeu, que les gosses de Gabarret dans les Landes, ne se passionnent plus guère pour le rugby des villages, mais ne rêvent que des grandes équipes, celles que leur offre, dans un fauteuil, la télé. Encore, oublions-nous l'important, sinon l'essentiel: le rôle majeur que la même télé joue dans la recherche de la vérité. La vidéo, comme ultime juge de paix, est devenue garante de l'honnêteté de l'essai marqué; elle est pour les gamins le symbole de la justice, celle que le football s'interdit toujours, au risque du scandale. Belle démonstration de Jean-Paul Jaud, à priori incontestable. Mais le jeu, qu'est devenu le jeu? Poser la question, c'est commencer à y répondre: un spectacle. Une évolution inévitable comme celle de tous les sports vers le buisiness, l'audience, et donc la force. A toute force. Les kilos à prendre, et surtout à ne pas perdre commele rappelle Philippe Saint-André, entraîneur del'équipe de Sale, championne d'Angleterre en 2006: "les joueurs ont l'obession de prendre des kilos. ils travaillent davantage, font plus de séances, mangent des protéines.

"D'ailleurs s'ils ne poussent pas la fonte pendant leurs vacances, ils perdent 4 à 5 kilos. A mon époque, lorsque nous rentrions de congés, nous nous entraînions pour maigrir. Les problématiques sont inversées". Ces propos que notre confrère François Trillo, ancien joeur de Bègles, et journaliste à Canal, rapporte dans le numéro spécial "Planète Rugby" du Nouvel Observateur, sont le reflet des évolutions d'un sport qui, en l'espace d'une dizaine d'années, a été bouleversé par la mondialisation, "made in TV". Les télés de l'Hémiphère Sud, sous la houlette d'hommes comme le magnat australien de la presse, Rupert Murdoch qui contrôle nombre de télévisions, sans oublier les titres les plus rentables de la presse de caniveau, ont imposé à la fédération Internationale, le Board, des évolutions qui sont à la source du rugby d'aujourdhui. Un spectacle, que l'on peut filmer et revendre, où les contacts, les plaquages,la puissance et les mots qui vont si bien avec, "détruire", "nettoyer", "pulvériser" ont pris la place de beaux mots, ceux qui ont fait la geste du "sport-roi": l'offrande, le décalage... Le subtil et brillant Jean-Pierre Rives, "Casque d'Or", le capitaine qui promenait sa tignasse blonde et ses 80 kilos de troisième ligne, à toute allure, pour retrouver ses trois quarts, se réjouissait parlant des Argentins, de leur jeu de passe. Se passer le ballon! En effet, jusqu'à la ligne d'essai... Lui qui a reçu une magnifique ovation lors de la cérémonie d'ouverture ne pensait pas si bien dire. Les Bleus, pris à la gorge par des Pumas très joueurs ont oublié de se faire de bonnes passes. Et Bernard Laporte et son complice, Jo Maso, doivent maintenant méditer sur les limites d'un système de jeu basé sur la défense et la seule contre attaque.

Joël Aubert.

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