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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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27/09/2009

La réforme territoriale « va secouer » les élus de tous bords et placer la gauche au pied du mur

En réalité, ça « secoue », déjà,dans les rangs de la majorité, et pas seulement parce que nombre d’élus locaux risquent de perdre leurs postes à l’horizon 2014, avec la suppression des conseillers généraux et régionaux. Leur remplacement par « un conseiller territorial », à l’évidence hybride, siégeant dans deux assemblées à vocation différente, est voulue pour des raisons d’économie et cet argument là – je diminue le nombre des élus – est, selon le chef du gouvernement, la promesse d’un soutien populaire. La réalité d’aujourd’hui c’est qu’en la matière, alors qu’il eût suffi de mettre à plat, avec courage, la question des compétences et des ressources, le pouvoir a ouvert un immense chantier dont les fondations ne sont pas assurées. Une sorte de voyage au long cours qui, pour reprendre la métaphore du premier ministre, sera ponctué de très fortes turbulences.
Celles qui s’annoncent sont à la fois éminemment politiques et financières. Politiques, parce qu’il saute aux yeux que Nicolas Sarkozy n’avait pas choisi, par hasard, un Edouard Balladur pour s’attaquer au bastion provincial. L’ex-premier ministre, ayant de la vie locale la vision supérieure d’un habitant des hôtels particuliers, n’aurait aucun état d’âme pour défendre pareille entreprise de recentralisation, au mépris de la réalité locale, jugée trop coûteuse à ses yeux pour un pays endetté.
Politiques, parce que l’ambition élyséenne est de casser le leadership de la gauche sur ces collectivités ; cette autre France qui, depuis les lois de décentralisation, n’obéit plus au préfet, le petit doigt sur la couture du pantalon. Et qui, pourtant, va devoir s’y remettre si l’on considère les pouvoirs qui lui sont redonnés dans le projet de loi.
Politiques, parce que l’homme de l’Elysée veut introduire dans les assemblées nouvelles, fussent-elles dépouillées de leur pouvoir, le scrutin proportionnel à hauteur, dit-on, de 20% à côté du scrutin majoritaire à un tour. Un choix qui plaira aussi bien à la droite de la droite qu’à la gauche de la gauche et chez les écologistes, assurés de décrocher quoiqu’il arrive de nouvelles tribunes. Les prochaines régionales auront lieu sur le mode actuel mais après on rebattratout et revotera, en 2014.
Les turbulences financières qui s’annoncent ne sont pas moins lourdes d’incertitudes. En effet, la suppression de la taxe professionnelle, habilement avancée par l’Elysée au nom de la libération des charges qui pèsent sur les entreprises, créeen partie le vide dans les ressources des collectivités. Et ceci, au moment où l’Etat croule, où nous croulons tous, sous les déficits accentués par la crise déclenchée l’an passé et sa gestion dispendieuse.D’ores et déjà, on peut être certain que la question des compensations par l’Etat sera un vrai casse tête et accentuera la bataille politique.
Celle-ci promet d’être impitoyable ; le Sénat dont les élus doivent leur mandat à la proximité qu’ils entretiennent avec les maires et conseillers généraux, étant le lieu géométrique de la contestation et des marchandages à venir.
Il est significatif que l’Elysée et Matignon, dans leur obsession à vouloir casser le système, envisagent de ne poser la question essentielle, c’est à dire « qui fait quoi », qu’après l’avoir …cassé.
Face à cet énorme défi que fait la gauche pourtant dans la lunette du tireur ? Elle hurle à la mortmais ne propose pas grand chose. Si elle veut avoir la moindre chance de défendre ce à quoi elle croit, c’est à dire pour les régions leur capacité à entraîner le développement économique par la formation et l’innovation et, pour les départements, leur connaissance du terrain et le maintien des services de proximité dans une France qui n’est pasqu’urbaine, elle doit définir son contre projet. Et le proposer aux Français. Elle ne l’a pas vraiment fait jusqu’à ce jour, plus divisée sur la question qu’il y paraît, alors qu’elletient une occasion de montrer son savoir faire. Qu’il s’agisse d’éducation, de formation, de transports collectifs, d’aide au développement, de solidarité, d’environnement, de culture. Autant de politiques qui méritent pourtant un grand débat démocratique.

Joël Aubert

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