La nouvelle donne

A ceux, trop nombreux, qu' Alain Juppé a surpris en renonçant à imposer un calendrier pur et dur pour lancer le grand contournement autoroutier de Bordeaux rappelons que 2007 est une grande année électorale. Et donc peu propice, aux yeux d'un élu, à réveiller les ardeurs à peine assoupies des opposants. Philippe Madrelle, le président du Conseil général de la Gironde, et ardent défenseur de cet ouvrage, n'avait pas fait une autre analyse en demandant le report des décisions ministérielles et la relance d'un nouveau Débat Public.

A sa façon, le maire de Bordeaux, en rentrant du Québec, a pris la mesure de l'ire de beaucoup de citoyens à l'idée de voir passer des dizaines de milliers de camions au coeur de leur pays. Entre Médoc et Blayais.Et il n'a pu que constater les dégâtsoccasionnés par une annonce de multiples tracés possibles; elle a été vécue comme provocatrice et le choix récent par l'Etat de deux options n'a pas apaisé les esprits.

Cependant, il semble bien que la prudence nouvelle d'Alain Juppé ne réponde pas seulement à l'air du temps électoral. Ses propos traduisent une évolution sur une ligne que ni le Président de la Région Alain Rousset, ni Philippe Madrelle ne sauraient renier. Traduction: mettons le paquet sur le rail, sur la Grande Vitesse de Tours à Bordeaux et de Bordeaux à Hendaye, voyons ce qu'on peut faire avec le ferroutage et, même, s'il n'est pasenvisageable de faire payer les camions...Les modèles suisses et allemands doivent inspirer le maire de Bordeaux que son séjour canadien a réchauffé.

Les adversaires du grand contournement qui ne sont pas tous écologistes, loin s'en faut, ne manqueront pas de trouver un encouragement dans cette prise de distance; ils continueront de militer en faveur de l'abandon de cette super-autoroute que beaucoup ne voient que comme une super-rocade. Désormais, le calendrier semblant moins impératif, la question d'un nouveau Débat Public va se poser avec plus d'acuité. Celui organisé en 2003 ayant tourné court. Le ministre de l'Equipement, Dominique Perben, dans la foulée du maire de Bordeaux, a demandé des études complémentaires sur la partie nord des deux tracés et fixé un rendez vous de décision à la fin 2008. Cette nouvelle donne politique ne mettra pas fin, comme par enchantement, à un débat nécessaire sur la recherche du meilleur équilibre des modes de transport entre route, rail et mer.

Joël Aubert.