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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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13/09/2009

La crise du lait comme symptome d’une crise de l’agriculture européenne plus grave

Des organisations ont lancé cette campagne de « grève du lait » qui, dans la profession, ne fait d’ailleurs pas l’unanimité, notamment en France où la FDSEA et le CNJA ne s’y associent pas. Mais derrière des divergences de méthode, le constat est le même: c’est toute une filière qui est menacée, et soumise maintenant au vent dévastateur de la concurrence mondiale.
Cette crise du lait est grave, non seulement pour les producteurs dont le revenu s’effondre mais aussi parce qu’elle est symptomatique de ce qui attend l’Europe agricole et fait oublier les raisons qui ont présidé à sa création : l’autosuffisance et la sécurité alimentaire d’un continent. Elle est d’autant plus grave qu’elle pénalisera, plus fortement, les régions qui ont maintenu un type d’exploitation familiale qui n’a pas grand chose à voir avec les usines à lait du nord de l’Europe. Et qu’elle aura des conséquences pour l’équilibre des territoires. Un risque réel pour des régions ou pays, à la démographie agricole chancelante où la production laitière est encore synonyme d’entretien de la nature. Il est déjà très évident dans certains départements ruraux du centre et du sud-ouest et des Pyrénées.
Ce constat devrait convaincre l’Union Européenne et la Commission de Bruxelles d’anticiper une crise encore plus grave qui verra le jour en 2015 lorsque la politique des quotas, instituée en 1985, disparaîtra. L’Europe, en créant ces quotas dans un contexte de surproduction galopante qui conduisait à subventionner ce qu’on appelait alors la « montagne de beurre » et « des stocks de poudre de lait » avait, en quelque sorte, institué un droit à produire. Celui-ci a eu le mérite d’équilibrer offre et demande à un niveau assez rémunérateur pour que des exploitations de taille adaptée investissent et misent sur le lait. Aujourd’hui, en période de crise et de baisse de la consommation, l’Union Européenne n’utilise déjà pas tout le potentiel de production dont elle dispose; les prix ne sont plus au rendez vous, d’autant que la Commission renonce de plus en plus à les soutenir.
Circonstance aggravante : la remise en cause, par l’Etat, de l’interprofession laitière, dans la précipitation, au nom de la loi de modernisation de l’économie. Elle livre les producteurs aux jeux de la grande distribution et de la concurrence sauvage.
La France et l’Allemagne tentent, ces jours-ci, de faire cause commune à Bruxelles pour obtenir que l’Union ne cède pas au seul principe du libre marché comme le défendent les Pays-Bas et les pays du nord. En pure perte pour l’instant. C’est un signe supplémentaire d’abandon d’une Europe verte qui n’ira qu’en grandissant avec à l’horizon de 2013 la fin programmée de la Politique Agricole Commune. Souvent critiquée pour son coût jugé trop élevé au sein d'une Europe dont le budget ne progresse pas, la PAC a quand même bien des mérites dont il faut se souvenir avant de la jeter aux orties. La crise de la production laitière est là pour nous le rappeler; il est temps d'imaginer des adaptations qui ménagent l'avenir et garantissent la qualité de notre nourriture.

Joël Aubert

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