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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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04/07/2006

L’heure de vérité pour la viticulture bordelaise.

Extravagante image que la viticulture girondinedonne au monde. Extravagante et révélatrice dela gravité de la crise qui la frappe et des divisionsdes différentes familles professionnelles qui la composent.D’un côté, tout en haut de l’échelledes primeurs proposés aux consommateurs à un prixautour de 30 euros la bouteille , de l’autre le plus grandnombre des Bordeaux qui ne trouvent pas preneur à 700euros le tonneau de 900 litres (!) . Paysage de vignoble
Un millésime exceptionnel, le 2005, rend fous les propriétairesde grands châteaux qui attirent les collectionneurs etspéculateurs spécialement nord-américains.Le constat est nécessairement cruel pour les vigneronsqui ont eux aussi réussi le plus souvent à fairedes vins magnifiques et ne savent comment faire pour écoulerdes récoltes encore en chais. Les trésoreriessont exsangues et les nerfs à vif.
Comment échapper à un pareil hiatus, synonymed’incompréhension pour le consommateur ? En commençantpar jouer « plus collectif » au sein d’uneinterprofession qui ne manque pas de moyens mais pâtitd’ une très ancienne culture de la division. Commes’il était encore temps de jouer chacun sa partition,alors que la consommation baisse et que les vins du nouveaumonde vont bientôt occuper la tête du marché.Le principe de la présidence alternante, production négoce,avait été maintenu et la perspective d’atteindreun mandat de trois ans autorisait la continuité des effortsentrepris pour sortir de la crise. Christian Delpeuch, venudu négoce après avoir courageusement présidéle CIVB, le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux asurpris en claquant la porte. Il a choisi d’arrêterles frais, de s’en aller en assénant quelques vérités.Certains de ses mots résonnent comme un ultime avertissement:« Pendant près de 30 ans , le label AOC a donnéune garantie « tout risque » ; le succèset le laxisme ont pu aller de pair dans une espèce d’euphorieet d’autosatisfaction générale…désormaissuccès et laxisme n’iront plus de pair ».Et pour faire bonne mesure, Christian Delpeuch pose quelquesquestions aussi dérangeantes que nécessaires :Veut-on continuer à imposer les mêmes rendementsquelle que soit la densité de plantation ? Veut-on définirun cahier des charges exigeant du château bordelais ?Veut-on que le droit à produire soit enfin liéà la capacité de vendre ?…
Autant de défis que son successeur le viticulteur AlainVironneau, après avoir imposé le blocus des ventesen deçà de 1.000 euros le tonneau devra relever.
Le plus prestigieux vignoble d’appellation du monde nepeut plus vivre d’une année sur l’autre àpartir d’un modèle dépassé oùla surproduction devient la norme ! Son avenir n’est pasdans un arrachage à grande échelle non plus dansla fuite en avant d’une distillation qui n’est pasdigne de sa notoriété. Il n’est plus possiblede déterminer des récoltes dans l’appellationdes Bordeaux reposant sur des rendements égalitairesquels que soient le lieu, la nature des sols, la densitéde plantation. Après avoir donné de façoninconsidérée des droits à produire, ilest temps de tourner la page. Et de donner toutes ses chancesà une viticulture de qualité qui a réussisa mutation mais risque d’être entraînéedans une spirale de l’échec.

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