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L'ÉDITO

 par Cyrille Pitois Cyrille Pitois
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05/10/2022

François Bayrou, l’influenceur des réseaux pas sociaux

Vendredi dernier, Emmanuel Macron est venu à Pau couper le ruban du Foirail au côté du maire de Pau, François Bayrou. Le Foirail, c’est un projet culturel affichant la coquette facture de 18 millions d’euros. Chaque semaine, le Président de la République pourrait s’offrir une immersion en région pour d’aussi nobles prétextes. Installations sportives, équipements publics, ouvrages d’art spectaculaires, espaces économiques ultra numérisés… les territoires regorgent de lourds investissements dont la réalisation améliore la vie des Français. Il ne le fait que rarement.

Le Foirail de Pau aurait donc quelque chose en plus qui motiverait l’intérêt présidentiel ? Non. Et ceci dit sans rien gâcher de la qualité de cet équipement. Personne n’est dupe : c’est pour le maire de la ville, qu’Emmanuel Macron a fait le déplacement.

François Bayrou a classiquement appuyé son parcours sur deux pieds. L’un sur le terrain pour assurer sa légitimité et l’autre à Paris pour décrocher une stature nationale. Mais il y ajoute une couleur supplémentaire d’influenceur. Non pas sur les réseaux sociaux comme toutes les bimbos branchouilles, mais dans les coursives du pouvoir.

A la fois proche et inaudible

Incarnation du centre de l’échiquier politique français depuis des décennies, il n’a jamais vraiment réussi à transformer dans les urnes l’expression d’une France modérée. Ses trois échecs à l’élection présidentielle, donnent à son discours une portée paradoxale : son projet politique n’est pas entendu des Français, mais il est écouté des gouvernants. Hollande qu’il a préféré à Fillon après avoir câliné Juppé, ou Macron n’ont jamais négligé ses avis. Avec Sarkozy c’était plus compliqué, Bayrou lui reprochant une perpétuelle danse du ventre face aux électeurs de l’extrême droite.

La visite du foirail illustre cette ligne directe entre Pau et l’Elysée: Emmanuel Macron était cette fin d’été, pressé par une partie de ses proches d’enclencher la marche forcée sur la réforme des retraites. François Bayrou, était quasi le seul à défendre l’idée de prendre le temps de la réforme. Le Président s’est finalement rangé à l’avis du maire de Pau et c’est cette entente cordiale qu’ils ont célébré à force de sourires complices, d’échanges de compliments et d’accolades répétées devant les Palois.   

Nourri de philosophie et de culture, capable d’élaborer de véritables visions pour son pays, ancré dans les réalités d’un territoire qui lui a confié des dizaines de mandats depuis trente ans, François Bayrou a, sur le papier, plus que beaucoup d’autres issus d’une technocratie que les Français détestent.

Et curieusement, il ne franchit pas le plafond de verre. Le discours modéré avec lequel des démocraties voisines comme l’Allemagne composent depuis longtemps, ne sort pas la tête du peloton du débat hexagonal. Ministre dans les gouvernements Balladur et Juppé, éphémère Garde des sceaux sous Edouard Philippe pendant 35 jours, putatif Premier ministre sans jamais décrocher le ticket pour Matignon, Commissaire au plan comme si le poste était créé exprès pour lui, sans que les Français ne comprennent son rôle… pourquoi François Bayrou reste-t-il celui qui a l’oreille des grands sans pouvoir s’asseoir à leur table ?

Peut-être pour n’avoir pas sacrifié ses idées sur l’autel de la cuisine politicienne. Mais aussi pour s’être fait soufflé le créneau du ni droite ni gauche que Macron lui a raflé en 2017. L’option n’est peut-être pas si mauvaise pour rester dans l’histoire. On se souvient davantage de Poulidor, éternel second, que des multiples vainqueurs d’étapes.

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