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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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27/04/2014

Départements: Il y a de la fronde dans l’air.

Deux des figures tutélaires de l'institution, le landais Henri Emmanuelli et le girondin Philippe Madrelle résument, chacun à sa manière, le coté quelque peu ubuesque d'une réforme qui prend totalement à contre pied le dispositif et le calendrier que François Hollande et le gouvernement Ayrault avaient choisi et fait voter. Difficile d'ignorer en effet les engagements présidentiels, prononcés à l'heure des voeux en Corrèze, que rappelle Philippe Madrelle: " je ne suis pas favorable à leur suppression pure et simple - des départements - comme certains le réclament. Car des territoires ruraux perdraient en qualité de vie, sans d'ailleurs générer d'économies supplémentaires". Quant à l'élection prévue en 2015, selon une nouvelle carte cantonale et l'institution de la parité, elle fait dire à Henri Emmanuelli: "j'ai passé un an à refaire les cantons et, aujourd'hui, on me dit qu'on veut les faire disparaître. J'attends des explications de l'éxécutif.." Comprenons que faire campagne à partir de l'automne prochain, après des élections sénatoriales de tous les dangers pour la gauche, alors même que le département est appelé à disparaître en 2021, ressemble à une "mission impossible". Le chef de l'Etat, en l'occurrence totalement contredit par son premier ministre, peut difficilement le déjuger, d'autant que Valls a pris soin d'appuyer la soudaineté de son annonce sur des sondages, venus très opportunément révèler que les Français, interrogés sur le millefeuille, n'aimaient plus, mais plus du tout ce département qu'ils ne détestaient pas jusque-là.

Voici donc le nouveau pouvoir face à une manière de défi qu'il aurait tort de sous-estimer. Sur le fond, chacun a compris que l'objectif était avant tout d'obtenir des collectivités qu'elles cotisent, qu'elles contribuent à l'effort général d'économies demandé au pays. Mais la réalité, quand on y regarde de plus près, est bien plus complexe que le citoyen ne l'imagine. Le président de l'ADF rappelle non sans raison que " le budget des Départements atteint les 71 milliards d’euros. 71 milliards d’euros qui sont dispersés dans la distribution du RSA, la compensation du handicap, les aides sociales, l’entretien des collèges et de la voirie. On chiffre notre marge de manœuvre, sur laquelle on peut avoir des actions, à 10%, c'est-à-dire 7 milliards d’euros. Cette dernière permet alors de financer le sport, la culture et les interventions dans le monde économique. Conclusion : même si on supprime les conseils généraux, les aides sociales devront continuer à être versées. Il n’y aura donc pas d’économies de réalisées." Des arguments qui vont sans doute trouver un écho dans l'opinion, d'autant que ces rappels mettent en évidence les missions premières - sociales avant tout- actuelles du département d'ailleurs imposées, si on veut bien ne pas avoir la mémoire courte, par l'Etat, lui-même devenu impécunieux. Notons aussi que le choix fait de laisser le soin aux intercommunalités de prendre le relais des départements qui disparaîtraient ouvre un chantier de grande envergure. Non seulement il faudra que celles-ci trouvent les moyens financiers d'assurer la continuité de l'aide sociale, en particulier en milieu rural, mais encore que soit mise en route et réussi le transfert vers elles de milliers d'agents départementaux...

N'y aurait-il donc aucune autre réponse que le statu quo? Personne de bonne foi ne le pense vraiment. A l'heure où il est question de revoir la carte des régions, d'en diminuer le nombre de moitié, il reste plus que jamais nécessaire de spécifier les compétences de chaque collectivité mais aussi de trouver des économies véritables en conjuguant les moyens et les efforts de celles-ci, de leurs administrations réciproques. A commencer en matière d'enseignement par les collèges et lycées. L'Etat a le devoir de réunir, dans un chantier ouvert, régions et départements, ce qui devait être entrepris de façon décentralisée mais ne l'a pas été. Il faut s'interroger aussi sur la singularité d'une France rurale, celle qui reste éloignée d'une société urbaine dominante et est en grand danger. La Creuse ou la Gironde n'ont pas les mêmes chances de s'en sortir quand le département aura disparu.

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