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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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21/03/2010

Au lendemain du second tour une urgence, sauver la décentralisation.

Les Français ont amplifié leur vote du premier tour et apporté une série d'enseignements que ni le pouvoir ni l'opposition ne sauraient s'exonérer d'analyser, en profondeur.

Le premier concerne Nicolas Sarkozy lui-même : sa propension à ignorer le désaveu qui le touche participe de la méthode Coué chère aux hommes de pouvoir qui ne veulent pas entendre le refrain du désamour. Et pourtant tout le donne à penser : les Français n'aiment pas l'hôte de l'Elysée; ils ne reconnaissent pas en lui l'homme qui leur promettait la vérité. Et ce n'est pas parce que la crise a mis à bas quelques uns des ses espoirs les plus irréalistes -travailler plus pour gagner plus- que la considération du pays lui fait aujourd'hui défaut. C'est plutôt parce qu'il na pas su s'attacher à l'essentiel et incarner l'aspiration irréductible du peuple à une certaine forme d'égalité et de respect. Quand un pays comme le nôtre souffre dans son être intime, quand ses enfants ne trouvent pas d'emploi, quand ses usines ferment malgré les oukazes présidentiels, quand ses agriculteurs ne se paient plus, l'homme qui la représente ne saurait être cru au seul motif qu'il peut afficher assez de compassion pour attirer caméras et micros. L'UMP, à coller aux basques du président, au-delà de tout esprit critique, a concouru à ce profond désaveu. Et même si les choses risquent de changer assez vite de ce côté-là, avec les ambitions qui ne vont pas manquer de fleurir à droite, le handicap est grand, d'autant plus grand que le Front national, que le vainqueur de 2007 croyait avoir terrassé, ne dormait que d'un oeil.

Le second enseignement de cette élection qui confirme le regain du PS après sa claque aux Européennes est à chercher dans le rebond réussi de l'union de la gauche. Ce n'était pas si évident au regard des ambitions affichées par la joyeuse bande chère à Daniel Cohn-Bendit. Il y a bien eu quelques anicroches, façon Bretagne, mais la confirmation de l'installation d'Europe Ecologie dans le paysage avec un PS qui se remet en ordre de marche et, surtout accepte de faire cause commune avec elle, est l'élément majeur de cette élection, deux ans avant la présidentielle.

Le troisième enseignement que l'on doit tirer de ce vote touche à la survie de la décentralisation. Les Français, au terme d'une campagne où ils ont commencé à prendre la mesure de ce qu'une collectivité responsable pouvait leur apporter pour améliorer leur vie quotidienne, doivent être instruits des dangers que la réforme territoriale qui s'annonce va faire courir à notre pays. En rayant quasiment de la carte institutionnelle les régions et les départements pour n'en faire qu'un ersatz aux ordres du pouvoir central, l'Elysée s'apprête au nom d'économies de bas étage à creuser le fossé qui sépare le peuple des élites, si souvent vilipendées. A abaisser l'autre France, celle qui ne fait pas devoir d'obéissance. Et à durcir un peu plus encore le jeu social dans un pays qui va sortir terriblement diminué de la crise.

C'est un non sens, une erreur grave, une faute contre la démocratie qui ne saurait être commise sans que la gauche et ceux qui, nombreux à droite, n'osent pas affronter le prince se décident à réagir et à demander que la réforme territoriale soit remise en chantier. Le président de l'Association des régions de France Alain Rousset, brillamment réélu en Aquitaine, a raison d'insister pour qu'il en soit ainsi. Mais cela ne suffira pas si la gauche elle-même et les démocrates ouverts à la différence ne se hâtent pas de proposer une alternative crédible au dessein centraliste de l'Elysée.

Joël Aubert

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