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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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27/04/2012

Alain Juppé prêt à jouer les sauveteurs d’une UMP qu’il a fondée.

Juppé, se condamnant d'abord à l'exil puis retrouvant sa mairie de Bordeaux, réintégrait le jeu au début de l'ère Sarkozy avant de perdre son poste de ministreà la suite de sa défaite à l'élection législative de 2007 face à Michèle Delaunay. Des années difficiles où le fidèle de Jacques Chirac ne pouvait que constater la prééminence d'un Sarkozy tout en conservant une liberté de parole, singulière au sein de l'UMP, autant par conviction d'inspiration gaulliste-on pense à ce que furent ses critiques sur le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN sans renforcement symétrique d'une Europe de la Défense - que par souci de se rappeler au bon souvenir des militants, en cultivant habilement sa différence. Rien ne pouvant mettre en danger l'unité de l'UMP mais juste assez de vigueur dans le propos pour attirer les regards de la classe politique, incarner la dimension de l'homme d'Etat...et piquer la curiosité, souvent fort bienveillante, des médias à l'égard d'un homme politique qui, ayant douloureusement accepté sa condamnation, était respecté pour « avoir payé sa dette ».

Allait-il oser affronter l'hôte de l'Elysée dont on sait que les valeurs qui le séparent de lui sont quand même plus épaisses qu'une feuille depapier Riz la Croix ? Il y pensa naturellement, rappelant que des primaires pouvaient exister à l'UMP, encouragé d'ailleurs par des témoignages qui ne venaient pas que de la droite. Il suscita même de vraies espérances au sein de la jeune génération de l'UMP que le devoir d'obéissance à Nicolas Sarkozy déroutait et éloignait de la matrice gaulliste et sociale, voulue par Alain Juppé. Son second retour au gouvernement, conçu d'un commun accord avec l'homme d l'Elysée, offrait à celui-ci la garantie de son soutien, ce qu'au fond Alain Juppé acceptait volontiers au nom de la règle non écrite de la V° République, selon laquelle le président sortants'impose comme le candidat de la formation dont il est issu.

Alain Juppé, retrouvant le ministère qu'il avait tant aimé, celui des affaires étrangères, ne tarda pas à faire tandem avec l'homme de l'Elysée, trop content que le maire de Bordeaux, au-delà même de l'allégeance, incarne à ses côtés l'expérience et la respectabilité. On se doutait bien que l'un et l'autre n'exprimaient pasla même sensibilité au sein de l'UMP mais rien qui ne semblait insurmontable...L'élection présidentielle, au contraire, paraissait devoir resserrer encore leurs liens et affirmer le rôle d'Alain Juppé dont on se souvient qu'envoyé en première ligne donner la réplique à François Hollande sur France 2il s'emporta au-delà de ce qu'on pouvait imaginer, et dans un registre qui ne lui convenait guère.

Le premier tour de l'élection présidentielle et la grande entreprise de récupération des électeurs de Marine Le Pen par Nicolas Sarkozy font trembler les fondations de la maisoncommune, l'UMP. Alain Juppé se retrouve donc enpremière ligne et ses libertés de parole, sur le thème de la droitisation, contre les empressementsdu candidat Sarkozy n'avaient, on l'a compris, d'autre but que d'envoyer des messages aux tenants, souvent jeunes d'ailleurs, de ce qui subsiste de l'héritage gaulliste. Les Jouanno, Kosiuscko-Morizet ou autres Lemaire, en rassurant du même coup les vieux centristes de l'UMP, déconcertés par les saillies sarkozyennes.

C'est entendu, Alain Juppé a rangé ses critiques jusqu'au 6 mai. Il sera peut être appelé à « faire don de sa personne » pour tenter d'éviter l'éclatement de l'UMP, si le président sortant est sorti par les Français... Faire en sorte que Copé ne tire pas plus vite que son ombre pour écarter François Fillon, calmer aussi les ardeurs de certains de ces élus excités, façon Provence-Côte d'Azur, bretteurs impénitents du sarkozysme, qui n'ont pas beaucoup de chemin à faire pour faire la bise à Marine Le Pen... Conserver, enfin, au bercail les centristes d'hier qui ont entendu le discours de François Bayrou. Après tout, ne serait-ce pas le moment pour que le maire de Bordeaux, lui qui n'a cessé de rappeler le béarnais à ses devoirs de famille, ne soit tenté de l'y accueillir en clarifiant la ligne d'une UMP qui glisse dangereusement vers les abîmes. Et ceci sous l'impulsion d'un président candidat aux abois, oubliant l'impératif républicain d'un grand parti de gouvernement.

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