TGV – Les choix du Pays Basque


Article paru dans le numéro 1 d'Aqui - septembre 2004

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TGV - Les choix du Pays Basque

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 02/01/2007 PAR Catherine Boulanger

L’arrivée du train à grande vitesse au Pays Basque, qu’il ne traversera sans doute qu’à petite vitesse, est au cœur d’un nouveau projet à l’étude. Il rapprocherait Bordeaux, Toulouse et Bayonne, en passant par Mont-de-Marsan.

Projetons-nous ! Nous sommes en 2016 : 4 milliards d’euros ont été réunis et cinquante minutes gagnées de Paris à Bordeaux. Et donc autant de Bordeaux à Bayonne, d’une part, Toulouse d’autre part. Impossible d’en rester là, à cette sorte de statu-quo et ceci pour trois raisons :

1. Le TGV Aquitaine arrivant à Bordeaux n’est pas une fin en soi ; il est partie prenante de la Ligne à Grande Vitesse Sud Europe Atlantique (LGV-SEA) reconnue comme infrastructure européenne.

2. Les perspectives de rentabilité du TGV Tours-Bordeaux sont les meilleures de toutes quand on les compare aux projets concurrents, et elles s’améliorent fortement lorsqu’on considère les prolongements vers le Pays Basque au sud, Toulouse au sud-est.

3. La création d’une ligne nouvelle au sud de Bordeaux n’offre pas seulement des espoirs de retombées économiques régionales certaines comme le prouvent l’élan donné par le TGV Méditerranée à Marseille mais aussi à des villes comme Avignon ou Aixaccueillant les sièges de sociétés qui se décentralisent. Elle libère ces fameux sillons destinés à supporter les trains de marchandises au moment où à la frontière le trafic routier explose !

Le temps est donc venu de faire de vrais choix ,en privilégiant la complémentarité des régions du Grand Sud-Ouest, Aquitaine et Midi-Pyrénées en accord avec le gouvernement de Madrid, les autorités d’Euzkadi à Vitoria et le soutien actif des élus du pays basque. Alvaro Amann , ministre basque des transports explique pour Aqui ! son engagement en faveur de la réalisation rapide d’une ligne mixte à « haute vitesse », fret-voyageurs. (voir ci-contre)

Pour gagner 15 mn…

Ce volontarisme ne convainc pas vraiment certains élus de ce côté-ci de la frontière ; ils considèrent encore avec scepticisme cet activisme « d’outre Pyrénées » et semblent tarder à soutenir un projet
essentiel au développement et à la qualité des services comme ne cessent de le clamer les responsables des chambres de commerce. Jean Grenet, maire de Bayonne, résume fermement la situation : « Nous avons déjà un retard considérable par rapport au Sud Est ; il faut amener le TGV ici jusqu’à « l’Y basque ». Dans un faux débat entre voie existante ou voie nouvelle ne donnons pas d’alibi aux décideurs. Il est très important que tous les élus locaux , ici au Pays Basque se déterminent avec courage et lucidité. »

Pareille affirmation renvoie à un épisode qui il y a plus de dix ans a failli mettre le feu , une réunion
à Arcangues où fut présentée une pré-étude au terme de laquelle, selon un élu, « chacun voyait le TGV passer qui dans sa chambre, qui dans sa cuisine. » Dans un pays légitimement fier de la qualité de ses paysages et de son identité, une crainte diffuse de la grande vitesse s’est installée. Jean-Jacques Lasserre, président du Conseil général des Pyrénées-Atlantiques, fait remarquer que
« l’acceptabilité sociale est aussi importante que la rationalité technique ; elle peut se forger autour
de l’utilisation de la ligne actuelle. Un TGV ne traverse pas une telle urbanisation à 300 km/h.» Sacrifier des sites uniques, et concevoir au prix de lourds investissements des passages enterrés et des isolations phoniques pour le gain de dix à quinze minutes relève du non-sens. Disons le sans
détours : si une ligne à grande vitesse doit voir le jour entre Dax et Vitoria cela ne pourra s’envisager qu’au prix d’un contournement de la côte basque. En réalité la création d’une ligne dédiée au transport de marchandises est aujourd’hui la solution la plus vraisemblable, le TGV continuant notamment à desservir Bayonne qui a réservé dans son Plan d’urbanisme (PLU) un site pour une nouvelle gare.

L’Europe pourrait de son côtésoutenir un premier projet de ferroutage d’envergure dont un Groupement d’intérêt économique européen franco-espagnol va étudier l’opportunité. Ses bureaux vont être installés à Bordeaux, ce qui est une excellente nouvelle.

Le grand projet de traversée centrale sous les Pyrénées depuis Saragosse à l’horizon 2030 n’est pas contradictoire avec une première réalisation atlantique qui supposera le renforcement de la plateforme d’Hendaye déjà engagé et sans doute la création d’un nouveau pont sur la Bidassoa.

Les choix à venir sont d’autant plus cruciaux que la rentabilité de la « Grande vitesse » implique la création d’un ensemble Bordeaux-Hendaye et Bordeaux-Toulouse. Alain Rousset, président du Conseil régional d’Aquitaine, affirmait en novembre dernier :

« Bordeaux – Pays Basque, Bordeaux-Toulouse c’est cinq millions de voyageurs en plus. » Il ajoute aujourd’hui : « pour gagner la bataille de la priorité de la LGV Sud – Europe – Atlantique, en particulier par rapport au TGV Rhin-Rhône, il faut maintenir notre accordavec l’Espagne, le Pays Basque et Midi-Pyrénées.»

En effet, les Toulousains plutôt que de s’accrocher à l’aménagement par train « pendulaire de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse » qui de toute façon les mettrait à cinq heures de Paris veulent une ligne Bordeaux-Toulouse. Elle leur ferait gagner deux heures depuis la capitale et leur fournirait des arguments pour repousser la création d’un second aéroport ; la saturation de Blagnac étant annoncée.

Les crédits à mettre en œuvre seront tels que le danger d’une concurrence toulousainepour le TGV Sud Europe Atlantique s’est aux yeux des Aquitains en apparence précisé avec la feuille de route donnée par le gouvernement à Réseau Ferré de France : organiser en 2005 un débat public sur la desserte vers Toulouse. C’est à dire avant celui prévu en 2006 pour le corridor Atlantique.

5 millions de voyageurs

Le temps des campagnes électorales étant passé, les socialistes en Gironde et dans les Landes ne parlent plus trop du « TGV UMP Bordeaux-Toulouse » mais ils y pensent toujours. Alain Rousset persiste, lui, à vouloir « fusionner les deux procédures »; il l’a d’ailleurs demandé à Gilles de Robien ministre de l’Equipement et des Transports le 7 juillet dernier. Celui-ci a donné son accord pour la création d’un comité de projet qui réunissant toutes les parties concernées l’Etat, les Régions, Réseau Ferré de France, SNCF, va se pencher enfin sérieusement, le 29 septembre,sur la question des financements. On va aborder un sujet d’autant plus crucial qu’un partenariat « public-privé » inédit est envisagé, des banques comme Lazard, pouvant par le biais de péages être intéressées à investir.

Le tracé qui rassemble ou « le Y aquitain »

C’est dans ce contexte qu’est en train de naître dans les cartons de Réseau Ferré de France et les bureaux de la Région un projet de tronc commun qui mérite la plus grande attention. L’hypothèse d’une ligne nouvelle à grande vitesse qui partant de Bordeaux-Saint Jean en direction du sud-est pour une soixantaine de kilomètres filerait ensuite d’un côtévers Agen et Toulouse et de l’autre vers Mont-de-Marsan avant de plonger vers Dax.

Un « Y aquitain » en quelque sorte qui on l’imagine a les faveurs d’Henri Emmanuelli président du Conseil général des Landes et de Jean-Louis Carrère premier vice-président de la Région.

Avantages : une sortie de Bordeaux par la tranchée d’Hourcade, à priori beaucoup moins aléatoire que celle passant par l’agglomération Talence, Pessac et Gazinet, un gain de temps non encore chiffré mais non négligeable.

La ligne actuelle vers Dax et Bayonne sera de toute façon améliorée car le TGV n’y circule souvent qu’à 160 km/h. Une évolution qui satisferait Jacques Forté, le maire de Dax, où « 22 % des curistes arrivent par le train ». Pour autant fournirait-elle jusqu’à Dax l’emprise utile au passage d’une seconde ligne à grande vitesse ? RFF comme le rappelle Jean-Pierre Duport, l’enfant de Saint-Sever, étudie toutes les hypothèses Mais le président de RFF d’ajouter : « ce sera aux décideurs de décider. »

Joël Aubert

 

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