Ski dans les Pyrénées : vers une nouvelle donne ?


Entre changement climatique, évolution de la clientèle et moindres moyens économiques, la nouvelle Compagnie des Pyrénées pourra-t-elle sauver les domaines skiables ?

Ski alpin dans les Pyrénées - Station de GouretteN'Py

Ski alpin dans les Pyrénées - Station de Gourette

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 23/11/2021 PAR Solène MÉRIC

Ce n’est pas sans une certaine impatience que les responsables des domaines skiables des Pyrénées attendent le retour des vacanciers après une année blanche gelée par le Covid 19 qui a eu pour conséquence l’immobilisation des remontées mécaniques toute la saison dernière. La saison 2021-2022 s’apprête donc à marquer le retour du ski dans nos montagnes, sous condition de masque voire de pass sanitaire, si le taux d’incidence du virus devait encore grimper. Une nouvelle saison qui s’inscrit aussi pour les stations dans un cadre renouvelé : celui de la Compagnie des Pyrénées, structure interrégionale dédiée à l’accompagnement stratégique et financier des stations de montagnes. Christine Massoure, sa directrice générale fait le point.

Depuis fin octobre les stations pyrénéennes ont une structure interrégionale dédiée à leur accompagnement stratégique et financier : la Compagnie des Pyrénées, avec à sa présidence, Carole Delga, présidente de la Région Occitanie. Si cette nouvelle « Compagnie », a pour fondations historiques le réseau de stations N’PY, elle réunit en son sein désormais la Région Occitanie, la Région Nouvelle-Aquitaine et les Départements des Pyrénées-Atlantiques, des Hautes-Pyrénées, de l’Ariège, et des Pyrénées-Orientales ainsi que la Banque des Territoires.

L’intérêt d’une telle unité : « avoir une compétence sur l’ensemble de la chaîne des Pyrénées », synthétise Christine Massoure, directrice générale de cette nouvelle structure, qui en réalité s’articule autour de trois sociétés. D’abord, la SAS N’Py Résa qui se maintient et poursuit son offre globale de services commerciaux et de communication auprès des acteurs du tourisme. Marketing, commercialisation, gestion de relation client, administration des ventes ou encore expertise digitale… la marque N’Py dont la vocation est de faire rayonner les stations de montagne pyrénéennes perdure.


Partenariat public privé
Deuxième société mise en place : La Compagnie des Pyrénées Participations. Sa vocation est d’accompagner les sociétés d’exploitation de domaines skiables et de sites touristiques dans leur développement, par le biais de prises de participations au capital. « La volonté des deux régions était de se doter d’un outil pour investir en capital et non par la distribution de subventions au coup par coup au fil des projets. Donc il y a là un réel enjeu de développement de long terme et de cohérence globale de ces développements. Mais il y a aussi un enjeu sur la rentabilité de cette société ; pour avoir des structures qui se tiennent et, en même temps, pouvoir anticiper stratégiquement avec elles sur les défis liés notamment au changement climatique », commente la directrice générale. « Ce type d’intervention par le biais d’un investissement, d’un montage capitalistique, est une vision très nouvelle pour des collectivités », souligne-t-elle.

Enfin, la dernière société venant compléter l’articulation globale de cette nouvelle Compagnie des Pyrénées est La Foncière des Pyrénées, « qui permet un soutien à l’investissement et à l’accompagnement en matière d’immobilier pour conforter l’offre sur les lits chauds ». En d’autres termes, porter des projets de construction ou de requalification permettant la mise en place d’une offre immobilière variée, plus qualitative et mieux adaptée aux nouvelles attentes des publics.

Au total, une Compagbnie des Pyrénées à l’architecture opérationnelle basée sur un partenariat « public-privé » à la fois, simple et complexe, dans laquelle, pour la Nouvelle-Aquitaine, Gourette, La Pierre-Saint-Martin et La Rhune font d’ores et déjà partie puisque ces 3 domaines appartiennent au réseau N’Py de manière historique, précise Christine Massoure. « Pour ce qui est d’Artouste, et de la Mairie de Lannes, le choix d’évolution n’est pas encore fait », note-t-elle. Mais, pour la toute jeune Compagnie des Pyrénées, « la priorité est d’avoir une vision de moyen long terme. Ce qui n’est pas facile », mesure-t-elle.

L'hébergement, renouvelé, diversifié et en adéquation avec les attentes des touristes est un des enjeux importants des stations pyrénéennes en termes d'attractivité.N'Py

L’hébergement, renouvelé, diversifié et en adéquation avec les attentes des touristes est un des enjeux importants des stations pyrénéennes en termes d’attractivité.

« Une montagne habitée »
Pour autant en cette (presque) veille de rentrée sur les pistes pyrénéennes _ les premières stations prévoient des ouvertures dès le week-end prochain_ les acteurs de la montage ont quelques éléments rassurants dans leurs manches, que ce soit pour cette saison ou les prochaines. « Les français dans une étude récente, placent les Pyrénées en tête des massifs de montagne, et ici, nous avons une réelle opportunité sur la dimension authentique du séjour à la montagne. Moderniser c’est justement aussi, mettre en avant nos atoûts. Pour ça, pouvoir désormais parler globalement d’une destination « Pyrénées », plutôt que de telle ou telle station ou telle ou telle vallée, est un avantage énorme ».

Autre avantage selon la directrice générale : « Les Pyrénées sont une montagne habitée et dans laquelle on a conservé notre patrimoine. Les Pyrénées ont de la valeur à travers sa population, et les visiteurs n’y échappent pas car dans nos stations, ce sont des Pyrénéens qui les accueillent ». Un recrutement massivement local qui est aussi une épine en moins dans le pied des domaines skiables. « Pourvoir recruter sans trop de difficultés parce que justement on peut recruter localement, c’est une double force. Les choses ne sont par exemple pas les mêmes dans les Alpes où il peut être plus difficile de trouver du personnel », pointe la responsable.


« Poursuivre le ski partout où c’est possible »
Mais c’est bien aussi pour ça que la Compagnie des Pyrénées doit réussir avec les stations, le pari du développement et de la diversification des activités : pour conserver une montagne habitée.

« On l’a bien vu l’an dernier, les domaines skiables étaient fermés. C’est parce qu’ils ont été fortement aidés par les fonds publics qu’ils ont pu passer le cap. Certes, d’autres activités hors ski ont pu être développées par les stations, des choses nouvelles ont été mises en place, mais l’offre client est restée relativement minimale. Or, l’absence de ski a bien montré combien les activités des domaines skiables restent structurantes, appuie-t-elle. Il n’y a pas pour l’instant encore, d’économie de territoire en dehors de ça ». Ce qui ne veut pas dire, loin de là, qu’il faut nier et pour toujours toute ouverture à d’autres activités, à l’inverse. Au regard du changement climatique et de ses conséquences, « anticiper » est même le maître mot de la nouvelle Compagnie des Pyrénées, mais aussi les stations.

Ski de randonnée, balade en raquettes, marche nordique, fat bike, sortie en chiens de traineau, tyrolienne parapente... autant d'activités alternatives au ski alpin mises en avant l'hiver dernierN'Py

Ski de randonnée, balade en raquettes, marche nordique, fat bike, sortie en chiens de traineau, tyrolienne parapente… autant d’activités alternatives au ski alpin mises en avant l’hiver dernier

« Aujourd’hui le réseau N’Py, c’est 1000 salariés. Il faut donc inventer un nouveau modèle pour permettre des activités sur ces territoires et les maintenir vivant. Mais, on ne peut pas imaginer couper le ski du jour au lendemain. D’ailleurs, les acteurs eux-mêmes ne réfutent pas cette évolution », souligne Christine Massoure. « Servir les territoires, ça passe par une vision plus large et par la diversification. C’est à dire qu’il faut créer une offre complémentaire selon les lieux, en typant chacune des offres par un changement qui soit accompagné ».

En pratique, selon elle, il faut d’abord « poursuivre le ski partout où c’est possible en amorçant des investissements permettant de poursuivre une activité au-delà. Nous avons désormais des modèles d’enneigement très fiables prenant en compte les augmentations de température de 1 degré, 2 degrés. On sait précisement les conséquences que ça aura. Tous les investissements sur les stations sont déjà faits en fonction de ça et continueront d’autant plus à l’être. Si on veut voir les choses en positif, « post crise », l’argent public est rare, il faut donc vraiment réfléchir à des modèles durables. On ne peut pas se permettre de se tromper en la matière. Même si ces réflexions ne sont pas nouvelles pour les acteurs du tourisme de montagne, la crise a aussi sans doute accéléré un peu plus cette prise de conscience ».

Et c’est bien là la vocation de la Compagnie des Pyrénées que de donner à cette prise de conscience les moyens de se concrétiser, en inventant rien de moins, et de manière collective, la station de demain. Avec, sans, ou peu de neige.

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