Projet hospitalier Bahia : enquête et défaveur


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Projet hospitalier Bahia : enquête et défaveur

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 05/07/2019 PAR Romain Béteille

C’est un hasard du calendrier politique, et pas forcément une très bonne nouvelle pour le projet de fusion entre la fondation Bagatelle et l’hôpital des armées Robert-Picqué, baptisé BAHIA, dont l’ouverture définitive est prévue pour 2023. Ce mercredi pourtant, l’heure était à la visite de courtoisie pour les deux secrétaires d’État Geneviève Darrieussecq (auprès de la ministre des Armées) et Christelle Dubos (auprès de la ministre de la Santé) pour découvrir la future « maison des consultations », première étape devant être terminée en janvier 2020. Ce projet, qui prévoit de compter 1400 salariés, 450 lits et 350 places d’hospitalisation pour un établissement maintenu en secteur 1 (c’est-à-dire sans dépassement d’honoraires), comme l’a répété à l’envie le président de la fondation Bagatelle, Gabriel Marly, pour faire taire les « craintes infondées » des opposants au projet. La deuxième phase de travaux envisage la réalisation d’un plateau technique (urgences, réanimation, maternité, blocs opératoires) ne pouvait en revanche pas se faire sans un petit détour par le plan local d’urbanisme. Interrogé ce mercredi, le maire de Talence, Emmanuel Salaberry, a précisé que « la façace du bâtiment sera conservée. Ce que doit voter la métropole, c’est une mise en conformité du PLU pour s’occuper de l’arrière de la façade qui n’a aucun intérêt patrimonial. de manière à pouvoir construire et réhabiliter l’ensemble de cette partie », qui comprendra les services de Robert-Picqué. 

Un dossier « confus, embrouillé »

Une petite écharde vient pourtant de s’incruster dans les pieds des responsables du projet. Cette modification, qui devait nécessairement passer par une enquête publique, a été remise en cause ce jeudi par la commissaire-enquêtrice Anne-Marie Caussé. Son avis rédigé le 25 juin dernier, défavorable, a été rendu public ce jeudi 4 juillet. Et ce dernier n’est pas vraiment tendre, puisque cette dernière « considère que l’intérêt général justifiant la procédure accélérée dite de « déclaration de projet » est apparu de façon peu claire parfois portant sur le seul bâtiment Bahia 2, parfois sur l’ensemble de Bahia. L’intérêt général relatif à la réduction d’une protection patrimoniale portant sur la seule construction du bâtiment Bahia 2 n’existe pas sans considération des autres constructions. Je regrette que le dossier ne présente que les impacts de Bahia 2 alors qu’en réalité, c’est la construction de tous les bâtiments qui vont impacter les riverains, tant au niveau urbanisme, qu’environnemental, social et économique. Il m’apparait que les impacts mesurés pour le seul chantier Bahia 2 sont sous-évalués, puisque, en réalité, plusieurs chantiers impacteront le site », poursuit la responsable dans le bilan de son rapport. « Je considère que l’acceptation sociale du projet tel qu’il est présenté n’est pas avérée, puisqu’il a suscité un grand nombre de questionnements, une grande mobilisation. Je considère que le seul intérêt économique national ne m’apparait pas assez suffisant pour permettre une opération d’aménagement structurante et pour la construction d’un hôpital nécessaire pour la Gironde. J’ai trouvé que le dossier était parfois confus, embrouillé et n’était pas de nature à permettre une bonne mesure des enjeux. Enfin, je considère que site de R. Picqué apparait comme un choix sérieux dont les impacts environnementaux/ urbanistiques, sociaux et écomico-financiers n’ont pas été présentés. J’ai constaté que les citoyens ayant participé à l’enquête souhaitent vivement que ce sujet soit débattu sereinement ». 

Des aménagements à prévoir

Le rapport déplore également que l’enquête publique/concertation n’ait concerné qu’une partie du projet (en l’occurence, BAHIA 2), éliminant de fait toute concertation sur Bahia 1, le chantier de la fondation John Bost et les chantiers de logements Cogedim (deux barres d’immeubles de 243 logements), les deux dernières opérations étant la résultante d’une vente de terrains pour financer Bahia (18 millions d’euros). Lors d’une précédente présentation du projet, déjà, il était apparu une certaine gène à l’évocation des terrains cédés à Cogedim, clairement présentés comme un « passage obligé ». La commissaire-enquêtrice évoque également un impact sur la circulation de la route de Toulouse, déjà engorgée, évoqué trop « succintement ». Sur ce point, le maire de Talence a apporté quelques éléments en précisant que la métropole était « en train d’évaluer l’impact, notamment en termes de circulation, du projet Bahia, pour que cette dernière soit absorbée. C’est la raison qui justifie la grande concertation pour rendre plus fluide la barrière de Toulouse et la route de Toulouse, avec la part belle aux déplacements doux. On a travaillé avec les équipes de Bagatelle sur la répartition des flux et on étudie actuellement une offre de stationnement sur des terrains et emprises autour. L’entrée de la maison des consultations se fera d’ailleurs par la rue Frédéric Sévenne ».

Par aileurs, une réponse de Bordeaux Métropole présente dans le rapport précise qu’en décembre 2018, Bagatelle a « mis en place avec succès un PDE (Plan de Déplacement d’Entreprise) permettant de réduire considérablement le recours aux véhicules particuliers de son personnel (Avant : 75% de déplacement en véhicule personnel / Après : moins de 50%) sans risques de désorganisation des services hospitaliers. Les futurs parkings tiennent compte de cette nouvelle organisation qui a déjà largement permis de réduire la circulation dans le quartier. Par ailleurs, la mise en place d’une zone de stationnement réglementée autour du site, limitant à 1h30 la durée maximale de stationnement, permet aux usagers des consultations externes de l’hôpital (soit la grande majorité des usagers de l’hôpital) d’accéder à un stationnement gratuit d’une durée suffisante pour leur consultation médicale. Le dimensionnement du parking BAHIA a été pensé en tenant compte de l’augmentation d’activité mais aussi de l’ensemble de ces éléments ». 

Fronts communs

L’enquête publique, elle, est loin d’avoir convaincu : elle a réuni 2086 avis défavorables sur un total de 2574 participants, ces derniers évoquant notamment la logique du terrain, Robert-Picqué étant situé sur une emprise de 25 hectares contre 5 pour la fondation Bagatelle au sein de laquelle Bahia est en chantier depuis novembre dernier. En pièce-jointe du rapport, on retrouve également une contribution de Loïc Prud’homme, député France Insoumise de la troisième circonscription de la Gironde, ayant recueilli 1904 votes favorables (sur 1910 participants) au maintien de Robert-Picqué ou encore une pétition d’opposition au projet de logements Cogedim signée par 82 riverains en plus de nombreux autres courriers, dont celui de la mairie de Talence, favorable au projet.

Tout cela n’a en revanche pas empêché la métropole de réagir à l’avis de la commissaire-enquêtrice ce jeudi. Par le biais d’un communiqué, elle précise que plusieurs élus (dont le président et maire du Bouscat, Patrick Bobet) « souhaitent réaffirmer leur soutien à ce projet structurant pour le territoire métropolitain ». De son côté, le député Loïc Prud’homme « espère qu’après lecture de ce rapport les élu.e.s locaux qui soutiennent unanimement le projet Bahia feront de même en sortant des arrangements entre amis ». Le maire de Saint-Médard-en-Jalles, Jacques Mangon, en charge de l’urbanisme à Bordeaux Métropole, a témoigné de son étonnement face à un rapport dont était attendu un simple « avis technique sur la protection patrimoniale » visant à modifier le PLU pour permettre la conformité du chantier de Bahia 2. La Maison de Santé Protestante Bagatelle, de son côté, se dit toujours « confiante » face à un avis qui « suprend ». La délibération de Bordeaux Métropole concernant la mise en conformité du PLU, elle, doit être votée en septembre. 

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