PORTRAIT – Yvonne Hegoburu


Article paru dans le numéro 5 d'Aqui - février 2005

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PORTRAIT - Yvonne Hegoburu

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 02/01/2007 PAR Catherine Boulanger

La dame de cœur du Jurançon

Aux portes de Pau, le chemin s’arrête à Laroin. Ouvert sur un somptueux dégradé de vignes, le Domaine de Souch, comme un théâtre antique, s’offre pour toile de fond le Pic du Midi d’Ossau. C’est là qu’Yvonne Hegoburu transforme son raison en or.

La maîtresse de maison, pétillante vigneronne de 77 printemps « et quelques… », accueille le visiteur comme le Messie! Précédée de sa garde prétorienne, trois « patous » des Pyrénées, Marguerite, Noémie et leur maman Lune, elle fait les honneurs de son authentique demeure béarnaise du début du 19ème siècle, perchée à 300 mètres sur les coteaux de Jurançon. Au coin d’une généreuse flambée, un verre d’or liquide à la main, elle vous invite spontanément à la suivre dans le récit d’une vie dont les mots – clefs se résument à : amour et amitié. Les deux moteurs qui l’ont construite et ont fait de cet esprit libre et affranchi des conventions, un monument de la viticulture. Ses six hectares de vigne, Yvonne les a plantés en hommage à l’homme qui l’a accompagnée depuis l’âge de 15 ans : son époux, René Hégoburu, « Hégo » pour toute une génération d’amis et de collaborateurs, résistant, journaliste impertinent, rédacteur en chef redouté de la République des Pyrénées durant des décennies, personnalité hors pair dans un monde quelque peu formaté! L’un de ces héros des temps modernes, qui allient beauté et intelligence, insolence et talent. Il ramenait chez lui, pour dîner, des Antoine Blondin, Kléber Haedens ou Haroun Tazieff… La jeune épouse était bluffée… Après le départ de cet homme, enlevé par ce que l’on nomme pudiquement une longue maladie, Yvonne décide de donner au domaine de Souch, la propriété qu’ils avaient achetée ensemble, trente ans plus tôt, une nouvelle vie : ce sera la vigne, alors que le dernier viticulteur de Laroin avait mis la clé sous la porte en 1968. Une vocation tardive puisque la jeune vigneronne affiche alors, avec une belle santé, la soixantaine. Avec l’aide d’Abel Pires, un maçon d’origine portugaise, reconverti en chef de culture, elle se lance dans des travaux pharaoniques. Elle plante 19 000 piquets sur des terrasses taillées au bulldozer, s’endette pour acheter du matériel de vinification, installe des chais et aménage des bâtiments destinés à l’exploitation. Mais il en faudrait plus pour freiner les ardeurs de cette femme de caractère : la chance est avec elle – elle la baptise autrement, car elle est très croyante – et son premier millésime, un blanc moelleux de 1990, reçoit d’entrée la médaille d’or à Paris en 1992. Sur ses terrasses, orientées plein sud, elle a su donner aux cépages locaux, les petits et gros manseng ainsi que le courbu, des conditions d’expression optimales. Et depuis, les spécialistes, les dégustateurs, les jurys les plus intransigeants s’accordent à reconnaître à ses vins, secs ou moelleux des qualités exceptionnelles. Aidée de trois personnes, elle traite son vignoble en biodynamie, une méthode qui réduit considérablement l’utilisation de produits chimiques et élimine les pesticides et les désherbants. Une méthode coûteuse à laquelle Yvonne Hégoburu consacre toute son énergie, en attendant que son fils Jean-René, avocat, reprenne les rênes de la propriété.

La vie de cette pétulante septuagénaire bascule il y a deux ans, avec la rencontre d’un jeune cinéaste américain : Jonathan Notisser. Auteur du film – événement « Mondovino », il tombe sous le charme d’Yvonne, qui lui confie généreusement sa vie, son histoire, sa passion pour le vin, et il en fait l’une des vedettes d’un film qui déchaîne les passions. L’amateur de vin – metteur en scène a un discours partisan que ne partage pas forcément la dame de Souch à 100 %, mais après quelques orages, leur amitié est à nouveau au beau fixe…

La crise du monde viticole ? Yvonne ne mâche pas ses mots : « Il faut continuer à produire les meilleurs vins possibles, selon nos terroirs et nos convictions et non pas en fonction de deux gourous qui font et défont les marchés ». Ce ne sont pas les amateurs fervents de la cuvée Marie-Kattalin, du nom de sa petite-fille, qui y trouveront à redire…

 

Martine Crespin
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