Plus que jamais, l’aéroport de Pau craint le crash


L’aéroport de Pau Pyrénées est passé de 36 à 7 vols hebdomadaires à destination d'Orly. Le Covid a fait son effet et l’aéroport de Tarbes Lourdes a capté une large part de la fréquentation paloise. De quoi inquiéter et fâcher son président.

Vue exterieur de l'aéroport de Pau avec la tour de contrôleSolène MÉRIC | Aqui

Longtemps en situation favorable face à Tarbes, le vent tourne pour l'aéroport de Pau qui veut défendre bec et ongle sa liaison pour Orly.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 21/12/2023 PAR Solène MÉRIC

Nicolas Patriarche, n’y va pas par quatre chemins : «  L’heure est grave. Notre territoire est en phase de réenclavement ». Le président du Syndicat Mixte de l’Aéroport de Pau Pyrénées (SMPP) appelait mercredi, depuis l’aéroport de Pau, « à la mobilisation générale des forces vives » autour de la défense de la ligne Pau Orly . « La situation actuelle de la ligne met en danger l’aéroport de Pau » et plus largement « le territoire et son attractivité économique », estime-t-il. Représentants du Medef, de Total Energies, de Safran Helicopter Engine, de la CCI, de la fédération du BTP 64, d’APR Ubi, entre autres, entouraient solidairement Nicolas Patriarche lors de sa prise de parole devant les médias. 

Invitation pour un Grenelle

Cet appel n’est pas le premier du genre, dans une histoire de concurrence tumultueuse au long cours entre les 2 aéroports, distant d’à peine 50km. Une alerte qui se double d’une invitation pour le début d’année « à se mettre tous autour de la table, aéroport de Tarbes et Etat compris, pour mettre fin à une situation intenable, et face à laquelle l’État doit prendre ses responsabilités ». Une sorte d' »Assises » ou de « Grenelle » pour redonner un peu de faste à l’aéroport palois.

Avec une prévision de 360.000 passagers environ en 2023, l’aéroport béarnais est bien loin des chiffres d’avant Covid à 600.000 passagers. « Nous atteindrons péniblement les 120 000 passagers sur la ligne Pau Orly, contre 300 000 en 2019 », ajoute Nicolas Patriarche rappelant que la destination, délestée par Air France à sa filiale low cost Transavia, est passée de 36 liaisons hebdomadaires en 2019 à 12 puis, depuis le mois d’octobre, à 7, soit un vol par jour. « Moins d’avions, c’est moins de passagers », résume le président qui précise que la liaison vers Roissy est, elle, rétablie à 4 vols par jours. « Mais rejoindre le centre de Paris depuis Roissy est une vraie galère, c’est plus long que le vol en lui-même », rit jaune, le président du SMPP.

97 % des dirigeants estiment que la ligne Orly est nécessaire, 86% jugent la situation de la ligne actuellement insatisfaisante

Or la clientèle que cible l’aéroport béarnais c’est d’abord la clientèle d’affaires, celle qui recherche simplicité et efficacité dans ses déplacements. Désormais l’aéroport de Pau n’offre plus d’aller-retour possible sur Orly dans la journée. Un décalage entre les besoins du tissu économique local et l’offre existante qu’a tenu à démontrer l’aéroport en réalisant une enquête auprès des entreprises locales.

Autour de Nicolas Patriarche, les acteurs économiques béarnais ont témoigné de l’importance de la ligne Pau Orly, pour le bon fonctionnement de leurs entreprises et pour leur attractivité en termes de recrutement.

« En trois semaines, 217 ont répondu », explique le président du SMAPP, détaillant que « 97 % de ces dirigeants estiment que cette ligne est nécessaire, 86% jugent la situation de la ligne actuellement insatisfaisante et 73 % considèrent que la ligne vers Roissy n’est pas une alternative suffisante ». Autre chiffre 59 % d’entre eux organisent désormais leurs séjours parisiens au départ de Tarbes. Celui-ci revendique 160 000 passagers à destination d’Orly à fin 2023 pour une fréquentation de 136 000 en 2019 partant d’un peu plus de 50 000 en 2004, quand Pau flirtait alors avec les 360 000 passagers. Entre les deux aéroports les courbes de fréquentation se sont inversées, et la pente est raide côté palois.

Concurrence déloyale ?

Au point que Nicolas Patriarche « très inquiet » craint que la ligne Pau-Orly ne disparaisse à Pau dès le printemps 2024. Si une partie des pertes de fréquentation est liée au développement de la visio au sein des entreprises depuis la crise sanitaire, il pointe surtout « une situation de concurrence déloyale » avec l’aéroport Tarbes Lourdes. « En situation de concurrence non faussée nous n’en serions pas au même point. Le volume de clientèle potentiel se trouve dans notre rayon d’attraction », martèle-t-il.

En mettant de l’argent dans Tarbes-Orly, l’État crée une situation de concurrence déloyale. Les dés sont pipés !

« Nous sommes dans une situation de deux poids deux mesures », regrette-t-il pointant particulièrement le bénéfice au profit de l’aéroport Bigourdain, d’une Obligation de Service Public sur la ligne Tarbes Orly en cours jusqu’en 2026. Une OSP qui autorise, entre autres avantages, l’injection d’argent public sur la ligne, contrairement à la situation Paloise qui l’interdit. « Au-delà des 4,5M€ qui sont injectés par la Région Occitanie, le département, et la communauté d’agglo de Tarbes dans la ligne pour Orly, l’État ajoute 1, 2M€ sur cette ligne. En mettant de l’argent, l’État crée une situation de concurrence déloyale. Les dés sont pipés ! » Un soutien qui permet au passage à la ligne tarbaise exploités par Volotea d’avoir des tarifs bien plus attractifs qu’à Pau.

Le recours juridique n’est pas exclu

Une « fragilité de la situation » autour de l’OSB par ailleurs pointée dans 3 rapports de la Cour des Comptes et des Cours des comptes régionales d’Occitanie et de Nouvelle-Aquitaine, rappelle Nicolas Patriarche. Assurant être « en recherche de solutions pour garantir la coexistence des deux aéroports », il tient donc avant tout « à remettre le dossier sur la table » dès le début 2024.

Les promesses d’Emmanuel Macron lors de sa venue en août sont restées lettres mortes, et le courrier envoyé par le président du SMAPP au ministre des Transports, n’a reçu que « mépris », ce dernier déclinant sa demande d’entretien en l’invitant à régler la question auprès de la DGAC. Pour autant, selon Nicolas Patriarche, « l’Etat ne peut pas se désengager du sujet, il a les bras dedans jusqu’au coude. »

En cas d’immobilisme continu, la question du recours juridique n’est à cette heure pas exclue. 

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