Objectif : Mars pour les chercheurs du LAB de Talence


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Objectif : Mars pour les chercheurs du LAB de Talence

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 28/03/2018 PAR Romain Béteille

Il faut bien l’avouer, quand on pose les yeux dessus pour la première fois, on se demande bien comment il va pouvoir rouler sur Mars en février 2021, date à laquelle son arrivée est prévue par la Nasa, tout en sachant qu’il s’agit bien sûr d’une maquette. Mais pas n’importe quelle maquette, car l’engin dont on parle fait bien trois mètres de long et presque autant de large (2,8 mètres), comporte six roues motrices et quatre directrices. Le vrai engin, lui, s’appelle Mars 2020, c’est le dernier projet de rover né après son grand frère (qui est en fait plus petit), Curiosity, qui ces jours-ci vient de dépasser le cap des 2000 sols à la surface de Mars après six ans d’exploration du cratère Gale. Une exploration qui a permis des avancées sensibles pour répondre à LA question que tout le monde se pose : cette planète, si proche de la nôtre, a-t-elle une chance d’abriter la vie ? « Avec Curiosity, on a démontré qu’il y avait toutes les conditions physico-chimiques pour que se développe la vie sur Mars, ce qui ne veut pas forcément dire qu’elle l’a fait », précise Sylvestre Maurice, responsable scientifique du projet, astronome et astrophysicien à l’Irap (Institut de recherche en astrophysique et planétologie) de Toulouse. L’une des particularités de Curiosity, c’est Chemcam, un instrument disposant d’un laser de puissance qui mesure la composition chimique des roches dans le but de comparer le potentiel biologique de la planète à celui de la Terre. Ce Rover devrait faire la même chose, à quelques nuances près. 

Spécialités bordelaises

Si on vous parle de ça aujourd’hui, c’est parce que ce 27 mars a eu lieu, sur le campus de Talence, une série de conférences baptisée « Rover 2020, du Bordeaux sur Mars », censées préciser le contenu scientifique de cette nouvelle mission pilotée par la NASA et auxquels les scientifiques bordelais prendront la tête. Enfin, façon de parler : en fait, la tête du rover contient une caméra et un laser très pointus, et ces dernièrs ont la particularité d’être Made in France. Baptisé SuperCam, le système a été conçu par six laboratoires différents répartis entre Paris, Toulouse et… Bordeaux où officie l’équipe du LAB, composée de 73 personnes, parmi lesquelles des chercheurs spécialisés dans l’étude de l’atmosphère et de la surface des planètes (c’est aussi là que travaille Franck Selsis, le Mr Exoplanètes bordelais). Évidemment, Supercam mobilise des centaines de chercheurs et scientifiques en dehors de ces six laboratoires, à Nantes ou à Grenoble notamment. « Le Rover devrait faire environ 1100 kilos », précise Sylvestre Maurice. « En France, on a reçu la responsabilité de concevoir la tête en gagnant l’appel d’offre de Thales Optronics passé en 2014, on a commencé à travailler dessus en 2015. Cependant on a fait appel à plusieurs laboratoires pour le faire, on n’était pas capables de le faire seul. Les laboratoires de Toulouse, Bordeaux et Paris se sont donc joints à nous ». 

L’expertise des chercheurs et scientifiques locaux a donc été largement sollicitée, mais pour faire quoi ? On a posé la question à Pascal Bordé, le directeur du LAB. « Chemcam, qui équipe le robot Curiosity, est la génération précédant SuperCam mais il repose sur la même technique : on utilise un laser avec lequel on chauffe la roche, on la vaporise et on analyse à distance ce qui est vaporisé avec le téléscope qui se trouve dans la tête du robot. À partir de ça, on peut déterminer la composition des roches à la surface de mars et étudier son histoire géologique », précise le responsable. « Au niveau technique, ce qu’on fait plus particulièrement ici, c’est toute l’électronique de commande de l’instrument, son « intelligence », et tout ce qui est boîtiers mécaniques dans le respect de toutes les contraintes liées au spatial : tenue en vibrations, légèreté, tenue technique. Il y a tout un savoir-faire au laboratoire de fabrication mécanique et de carte électronique de commande. On a une équipe électronique très performante sur le filtrage de grands radiotéléscopes au sol et une autre spécialisée dans le pilotage d’instruments et les cartes de contrôle pour des instruments embarqués, sur des satellites, des téléscopes spatiaux ou des Rover comme ici ». 

En route pour 2020

Si l’américain Caltech est chargé de la construction du rover à proprement parler, ici, on travaille donc activement sur le pilotage des instruments qui vont permettre d’étudier les roches. À une nuance près : le laser de Curiosity n’était « que » rouge, celui-ci sera rouge… et vert. En dehors de la couleur, on a demandé à Sylvestre Maurice ce que cette nouveauté changeait par rapport au grand-frère. « Le laser de Curiosity était infrarouge. Là, on lui a demandé de refaire la même chose, mais il aura un mode en plus et va devenir vert, ce qui permettra de faire de la minéralogie : grossièrement, on ne brûle plus mais on fait vibrer. Avec le rouge, je chauffe la roche à 8000 degrés pour en connaître la chimie. Avec le vert, je fais vibrer les molécules et je comprends comment les atomes sont attachés entre eux », résume le chercheur. Le but final du rover est donc bien de sélectionner des échantillons de roche, les mettre dans des tubes et les préparer pour le retour sur Terre. Ce dernier n’est, en revanche, pas prévu pour tout de suite. Le robot doit décoller dans le courant de l’été 2020 et arriver sur mars 8 mois plus tard, en février 2021. Il faudra ensuite au minimum trois ans d’exploration avant qu’une éventuelle future mission ne puisse envisager, un jour, d’aller rechercher les échantillons. « C’est la première mission de ce genre. On pense qu’ensuite, d’ici une quinzaine d’années, on sera capable de poser une fusée, d’aller chercher les échantillons collectés, de se mettre en orbite autour de mars et de les ramener sur Terre.

Les perspectives sont vastes, mais les délais de livraison des équipes du LAB, eux, sont très ressérés : ils doivent livrer SuperCam en septembre 2018. Ce qui n’empêche pas les scientifiques de commencer à penser à l’après : depuis peu, une équipe de spécialistes dont fait partie le professeur Philippe Paillou, a pour objectif d’étudier des échantillons d’eau entre l’atmosphère et la surface de mars pour étudier son cycle, Curiosity ayant permis  de faire quelques avancées en prouvant notamment que les roches d’un affleurement martien avaient été déplacées par de l’eau. Le LAB s’est donc doté dun système cryogénique, d’une chambre à vide et d’échantillons pour faire ses propres recherches, dont ils espèrent valider le protocole au moment où Mars 2020 décollera pour Mars. Le travail du LAB est donc, comme souvent, une petite partie d’un grand tout, dont les dernières avancées promettent, pour les passionnés d’espace, quelques années de patience…

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