Municipales en Gironde : le MoDem en « trait d’union »


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Municipales en Gironde : le MoDem en "trait d'union"

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Temps de lecture 7 min

Publication PUBLIÉ LE 13/06/2019 PAR Romain Béteille

Il paraît évident d’affirmer que la donne a changé. Après le départ d’Alain Juppé pour le conseil constitutionnel et la nomination de son ancien adjoint aux finances, Nicolas Florian, aux manettes temporaires, la confirmation de sa légitimité auprès des électeurs sera sans doute l’un des grands temps forts des prochaines élections municipales. À côté de lui, les marches ont déjà débuté. Côté PS, l’élu d’opposition Matthieu Rouveyre a récemment émis le souhait d’une « union des mouvements de gauche », sans pour autant se porter candidat à sa tête, une « union » qui divise même son propre camp. Pour En Marche, la fenêtre est encore plus large depuis que Thomas Cazenave parcours les rues de Bordeaux en tant que candidat à l’investiture de LaREM avec son mouvement « Renouveau Bordeaux ». Si les instances nationales du parti n’ont pas encore tranché, un récent sondage Ifop donne déjà ex-aequo Thomas Cazenave et… Vincent Feltesse (divers gauche) avec 8% des voix, assez loin derrière Nicolas Florian (45%), Pierre Hurmic (EELV à 14%) et le député FRance Insoumise Loïc Prud’homme (13%). Le candidat choisi pour le Rassemblement National, Francois Jay (alors même que la conseillère régionale Edwige Diaz a créé une association de rassemblement des droites, « Pour la France ») y est crédité en fin de peleton à 5%, derrière le « non déclaré » Matthieu Rouveyre et ses 7% d’intentions de vote. Le chemin de LREM, agrandi par les Européennes, risque donc de trouver un sérieux challenger sur sa route. Et le MoDem alors ? Le parti créé par François Bayrou compte visiblement lui aussi tirer son épingle du jeu.

La même stratégie

Ce jeudi 13 juin, c’est son secrétaire général au niveau national, Jean-Noël Barrot, qui a donné le coup d’envoi des hostilités girondines, « l’une des plus belles fédérations de notre mouvement, nous sommes très heureux qu’il puisse continuer à structurer et à faire grandir ses valeurs. Le MoDem a des discussions avec tous ses partenaires dont LREM, nous avons des élus dont nous souhaitons conforter le travail, nous sommes à leur écoute pour la mise en place d’un projet qui sera suivi d’alliances éventuelles puis d’une candidature. Les investitures interviendront au deuxième semestre de l’année 2019. D’ici là, des chef de file seront désignés par le MoDem, ils ont vocation à structurer le projet, les alliances éventuelles et de devenir les têtes de listes ou de participer à la constitution d’une équipe », a précisé le député des Yvelines.

Ces référents ont d’ailleurs déjà été identifiés, on retrouve parmi eux Fabien Robert, le premier adjoint au maire et Président du parti démocrate en Gironde. Pour ce dernier, ce sont les « ancrages territoriaux forts » qui risquent de peser dans la balance (le MoDem est, avec le PS, la seule formation politique à être présente à tous les échelons territoriaux en Gironde). « Il y a plein de communes où la question de l’étiquette politique est secondaire. Nous soutenons des élus sortants, de bons maires, de bons candidats potentiels qui ont un projet progressiste et modéré qui correspond aussi à notre ADN, y compris au niveau national. Nous adoptons la même stratégie ».

Pourtant, certaines communes risquent d’être clairement plus difficiles que d’autres à conquérir. Face à des ambitions nationales tous azimuts, Bordeaux attire bien sûr les regards en premier, mais elle n’est pas la seule. Plusieurs communes de la métropole ont ainsi un « référent » MoDem : Mérignac (François Dogon), Pessac (Jérôme Baradat), Martignas-sur-Jalles (le conseiller municipal Jacques Souletos), Saint-Médard-en-Jalles (l’adjointe au maire Françoise Hanusse), Ambarès-et-Lagrave (le conseiller municipal Jean-Marc Petrissans), Artigues-près-Bordeaux (l’adjoint délégué au sport et à la vie associative Claude Dauvillier), Le Bouscat (le conseiller municipal Maël Fetouh), Eysines (Daniel Camérini), Floirac (le conseiller municipal Philippe Verbois), Talence (l’adjointe au maire Frédérique Fabre) et Villenave d’Ornon (la trésorière du MoDem Gironde Christine Bonnefoy). Et tous ne seront pas égaux face aux enjeux. « Dans les grandes communes, notamment celles de la métropole, c’est évidemment plus politique. Nous formons le vœu de voir émerger une large majorité, qui va de la droite modérée juppéiste jusqu’à la République En Marche, le MoDem étant peut-être le trait d’union entre les deux. Nous pensons que ce territoire, qui est une ville de modération, a vocation à être dirigé par une majorité de cette tendance-là. Il y a plein de communes comme Floirac ou Pessac dans lesquelles cette majorité large est déjà en train de se constituer », continue Fabien Robert. « Il y a encore quelques points de difficulté, dont Bordeaux, ce qui est un peu normal. On est aujourd’hui dans une phase où chacun annonce ses candidats et montre ses forces, mais la phase de discussions viendra forcément. Mon choix est déjà fait : le nouveau maire m’a proposé d’être son premier adjoint, je serai avec lui. Je propose de favoriser le rassemblement autour de lui. Sa réponse est très claire : il s’éloigne de LR, il a des adjoints MoDem et En Marche, des gens de la droite républicaine. Il est en train de porter un projet pour Bordeaux épris de quatre défis : démocratique, écologique, social et démographique, ce qui correspond à nos idées ». 

Premières pistes de travail

Sur le plan des idées, justement, rien n’est encore défini, et chaque référent aura la charge de constituer un programme pour la commune dans laquelle les futures têtes de liste émergeront. « À Cenon, par exemple, Fabrice Moretti (sans-étiquette) s’est déclaré, tout le monde se dit que c’est probablement lui le meilleur dans cette commune ». Le récent scrutin des européennes a mis le RN en tête sur les quatre communes du GPV Rive Droite (Lormont, Bassens, Cenon et Floirac), ce que tempère quelque peu Fabien Robert. « Une élection municipale est très différente des autres scrutins. Pour faire une véritable analyse des scores dans ces communes, il faut regarder le nombre de voix, le pourcentage étant plus haut dès lors que la participation est plus faible. Quand on regarde le nombre de voix du RN dans ces communes de la rive droite, on voit qu’il n’est pas très supérieur aux élections passées. On sait bien qu’on a des triangulaires pour les municipales : à Floirac, par exemple, mais c’est aussi possible à Cenon. C’est une raison de plus pour se rassembler largement. Sur la rive droite, on a choisi majoritairement des candidats sans étiquette qui ont déjà derrière eux un certain nombre de personnes prêtes à se rassembler. Il est probable qu’on puisse avoir des triangulaires PS, RN et liste de rassemblement d’intérêt communal. Dans cette configuration, je crois que nous pouvons gagner certaines communes ». 

À Bordeaux, le programme émergera sûrement de quatre ateliers démocrates qui se dérouleront en juillet autour de quatre thèmes : respirer (nature en ville, écologie, développement durable…) coordonnée par l’adjointe Magali Fronzes, participer (démocratie participative, citoyenneté et numérique, sujet que connaît bien sa pilote, Estelle Gentilleau, qui va présenter un schéma directeur du numérique en septembre), s’épanouir (éducation, culture) par le conseiller municipal délégué Olivier Doxaran et enfin s’insérer (mobilités, habitat, économie durable) dont Fabien Robert aura la charge. Sans avoir de propositions déjà prédéfinies, ce dernier a déjà donné quelques pistes sur lesquelles ces ateliers seront amenés à se pencher. « On est assez identifiés sur la question de la participation citoyenne. Le maire a annoncé hier aux conseillers de quartier qu’il allait organiser des avant-conseils municipaux, c’est quelque chose que j’ai moi-même proposé. La réforme et le projet urbain des boulevards est quelque chose auquel nous sommes très attachés, nous en parlons depuis longtemps. La question du logement abordable et du PLU sera aussi centrale. Nous proposerons, dans le cadre des groupes de travail, une refonte complète du Plan Local d’Urbanisme pour sortir de l’idée que ce qui compte d’abord, c’est la hauteur et l’aspect architectural, et pour mettre l’emphase sur les services autour des logements qu’on est autorisé à construire. On a un PLU qui est aujourd’hui trop axé sur l’aspect règlementaire et pas assez sur les services. La collectivité ne peut plus se retrouver toute seule pour les mettre en place, il faut qu’on associe plus fortement les promoteurs ». 

L’objectif de la dizaine

Quid, alors, des potentielles alliances à venir ? À Bordeaux, les dés seraient déjà presque jetés si un début d’approche n’avait pas été récemment envisagé par Thomas Cazenave. Quant à la possibilité d’un Nicolas Florian sans étiquette, son premier adjoint n’y croit pas trop. « Je ne suis pas certain que ce soit plus simple. Il ne faut pas non plus être incohérent ou inconsistant. Quand vous avez été pendant vingt ans secrétaire général du parti de la droite, le quitter du jour au lendemain vous ferait perdre en crédibilité. Ce qui compte aux municipales, ce n’est pas l’étiquette, c’est qui vous êtes et le projet que vous portez. On a vu localement qu’Alain Juppé a perdu les élections nationales et a été réélu maire de Bordeaux. Je n’ai pas de conseil à donner à Nicolas Florian, mais je crois que son positionnement actuel, à savoir sa prise de distances avec les partis nationaux, est une bonne chose ». Les objectifs du MoDem, eux, n’ont pas attendu que LREM se décide : avec cinq référents sans-étiquette (le maire de Castelnau-de-Médoc Eric Arrigoni, le conseiller municipal de Cenon Fabrice Moretti, Matthieu Bordenave à Lormont, le maire de Pauillac Florent Fatin et le maire de Saint-Émilion Bernard Lauret) et la présence d’une quarantaine d’élus locaux, le parti de François Bayrou espère « doubler ce nombre parce que nous avons développé des implantations supplémentaires ces dernières années et que nous sommes membres de la majorité nationale. Nous avons actuellement six maires et on pense qu’on peut en avoir une dizaine en mars 2020. Le projet municipal ne sera de toute façon pas révélé avant l’automne ». En attendant, Lacanau accueillera les 29 et 30 juin prochain un « été des démocrates » qui risque de servir de marche-pied à un mouvement dans lequel le jeu des alliances devrait être encore une fois déterminant.

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