Maryne Cotty-Eslous, catharsis d’une héroïne


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Temps de lecture 16 min

Publication PUBLIÉ LE 08/05/2017 PAR Romain Béteille

La culture populaire a inventé les super-héros pour se donner une image de perfection et de puissance, mais aussi pour prouver que tout le monde peut accomplir ses rêves et se donner les moyens d’aller vers son propre but. Qu’on se soit fait piquer par une araignée, qu’on ait subi des expériences génétiques, qu’on soit l’enfant de deux kryptoniens ou celui de milliardaires philanthropes, le schéma est toujours le même : les départs ont systématiquement quelque-chose de tragique. Un élément déclencheur qui marquera notre genèse, qui, inconsciemment ou non, fera de nous ce que les scénaristes voudront bien nous donner. La différence avec la jeune femme de 27 ans qui dirige la start-up Lucine, encore en développement au coeur du Campement de Darwin, c’est que ce n’est pas un personnage de fiction.

Son histoire et sa rencontre font passer par toutes les émotions métaphoriques : du rire aux larmes en une seconde. Sous son allure svelte et une garde-robe mélangeant avec aisance le vif et le sombre, derrière une large paire de lunettes à montures noires, sous une voix à l’expression et à l’accent gommés, elle cache un parcours que d’aucun qualifierait d’exceptionnel, dans le bon comme dans le mauvais sens du terme, que le plus talentueux des auteurs de comics ne pourrait sans doute qu’effleurer. On a décidé d’en créer un à son image, dont elle serait l’héroïne complète et entière. On s’est aussi dit qu’on devait ouvrir ensemble les pages qui composent son origin-story. Préparez vous à enfiler le costume et à sortir les griffes et pénétrez avec nous dans cette portion de neuvième art qui ne pourra jamais être rien d’autre qu’une histoire vraie.

Genèse

Avant de lire les premières pages de chaque aventure, il y a toujours une petite explication sur les personnages principaux et les évènements qui se sont produits avant le chapitre que vous tenez entre les mains. Celle de Maryne ne sera qu’une succession d’adjectifs. Geek. Surdouée. Hyperactive. Hypersensible. Rêveuse et pragmatique. Lucide sur son état de santé et les traitements qu’elle a subis depuis que ses « maladies ennemies » ont été déclarées. Elle commence par ça, histoire de mettre les choses au clair. « J’ai une maladie génétique, le syndrome d’Ehlers-Danlos (maladie rare touchant le collagène). C’est des douleurs partout, tout le temps. Articulaires, osseuses, organiques. Ca fait quatre ans que je n’ai pas eu de pause, c’est une maladie évolutive. C’est assez peu connu par le corps médical, ce qui fait qu’il n’y a que très peu de formations dessus. En même temps, j’ai aussi une endométriose » (maladie chronique touchant une femme sur dix, difficile à diagnostiquer car prenant des formes différentes). Cet état de fait, elle ne l’a compris que tardivement. « Pendant toute ma jeunesse, j’étais très maigre. On m’expliquait que j’étais fragile, maladroite, tout le temps malade, stressée. Hyperactive en plus de ça, donc difficile à tenir en place. Il y avait toujours une bonne excuse », dira-t-elle avec un détachement dans la voix qui surprend d’abord, puis s’explique par les multiples traitements psychanalytiques dont elle a bénéficié. « On ne trouvait pas vraiment ce qui n’allait pas, il y avait donc toujours ces excuses un peu sociales qui sont malheureusement l’acabit de n’importe quel malade aujourd’hui. On a posé ce diagnostic là il y a environ cinq ans, mais pour certains c’est pire. Quelque part, j’ai eu de la chance. En ce moment, on me suspecte aussi une maladie de Crohn. Les médecins n’ont pas forcément de recul pour le savoir, mais on pense que le syndrome favorise le terrain des autres maladies ». 

Elle est donc, dès le départ, cette enfant spéciale, incomprise par des professeurs qui ne savent pas comment la gérer. Elle est aussi, et on ne peut le comprendre qu’en lisant entre les lignes d’un résumé digital un peu trop parfait, une rescapée. « J’ai eu une jeune vie un peu particulière dans un climat familial parfois très aimant et parfois très violent ». En racontant son histoire, elle n’hésite jamais à sourire, comme si elle avait fait le deuil du poids d’un passé inimaginable pour n’importe qui d’autre qu’elle. « Mes parents ont énormément bougé car ils étaient directeurs d’hôtel. J’ai donc un peu parcouru les quatre coins de la France. Pendant très longtemps, l’école et moi, on ne s’aimait pas. Je m’emmerdais et en face de moi, j’avais plutôt des professeurs qui considéraient que j’étais débile. Ils prenaient des autoroutes un peu faciles parce qu’ils n’étaient pas formés. Avec le recul, je ne leur en veux pas. Je me suis beaucoup épanouie avec la violence, en prenant des baffes. À chaque fois, les épreuves étaient là pour me faire apprendre quelque chose ».

Le destin de la jeune Maryne évolue en virages, abrupts et sans retour. Jusqu’à atteindre des proportions tragiques insoupçonnées. « Mes parents ont eu des difficultés très importantes quand j’étais en préadolescence. Ils se sont retrouvés SDF, licenciés pour faute grave. Ça a été clairement, pour moi et pour eux, la descente aux enfers, notamment sur  la structure familiale qui ne tenait plus du tout. On se rend compte que tout dégringole très vite. J’ai été déracinée, on m’a envoyée chez mes grands-parents, je n’ai pas trop compris ce qu’il se passait à cette époque ». Par la suite, ses parents retrouvent un boulot, mais pas des conditions de vie décentes. Cela déclenche chez cette passionnée de science-fiction une réalité nouvelle : celle de basculer, sans l’avoir voulu, dans le monde des grands. « J’ai la sensation d’avoir eu une enfance jusqu’à dix ans. Après, je suis devenue une adulte. Je ne sais pas ce que c’est que l’adolescence : je ne voyais pas l’intérêt d’aller dans des soirées pour boire des coups avec mes amis. J’étais simplement dans une question de survie. J’ai connu les soirs où on faisait des petit-déjeuners parce qu’on n’avait pas de quoi manger, les chaussures trouées et ma mère qui les rembourrait avec des journaux. Ce n’est pas pour jouer les Marie-la-pitié, mais un déclic s’est fait rapidement dans ma tête. J’ai vu que le fait de n’avoir pas forcément fait d’études rendait la recherche de travail très compliquée. Dans mon esprit, il y a eu une espèce de vrille, je me suis dit qu’il fallait que j’en fasse un maximum pour me sauver ». Se sauver de sa situation, de celle de ses parents, d’elle-même aussi sans doute, tant on verra par la suite un côté un peu autodestructeur, en tout cas jamais dans la demi-mesure.

Cliffhangers

A dix-sept-ans à peine, Maryne sait déjà ce que vivre dans la rue signifie. Cette expérience, elle va la revivre, et mettre, encore une fois de manière abrupte, un point final définitif à une insouciance adolescente partie en fumée, comme celle d’un Bruce Wayne à la mort de ses parents. « Le fait d’avoir été sdf pour mes parents a rompu quelque chose dans l’équilibre familial. Mon père était très stressé, très fatigué, il y avait des engueulades tout le temps. Ça a été de pire en pire jusqu’à bouger de région pour essayer de sauver ce qu’il restait de la famille. Au final, elle a explosé. Mes parents ont divorcé. Dans les mois qui ont suivi, mon père et moi avons eu un très grave accident de la circulation, on a failli y rester tous les deux. Avec un père en situation de handicap, je me suis retrouvée à devoir m’occuper de lui et à faire la maman. Il y a eu une incompréhension. Mon père s’est mis en défense, a refusé cette situation. Plutôt que d’essayer d’être dans la bienveillance, il a basculé dans la violence. On a cessé de se comprendre. À l’âge de dix-sept ans, je me suis retrouvée seule dans la rue. J’avais mon permis, j’ai pris mon baluchon juste après le bac et je suis partie à Bordeaux faire mes études ». Déterminée à ce que ces six mois d’errance ne recommencent pas, elle se fait aider par des assistantes sociales et essaye, tant bien que mal, de sortir la tête du puits. Son regain de stabilité ne sera pas vraiment proportionnel à ses sacrifices. « J’ai bossé jusqu’à trente heures par semaine dans des petits boulots en même temps que mes études ». Elle veut s’en sortir, alors elle ne refuse aucun poste : Mcdo, Ikea, manager d’une équipe de vendeurs, médiatrice à Cap Sciences et même ouvrière dans une usine d’embouteillage. En même temps, elle fait ses études, trois ans de droit et de sciences politiques au cours desquels elle ne s’intègrera jamais vraiment, de tempérament plutôt solitaire et focalisée sur son objectif, pas non plus aidée par ses complications de santé. 

C’est assez triste à dire mais, hormis pour un public de niche, l’échec permanent du héros dans un comics ne fait pas vendre. C’est un peu fleur-bleue, mais on est sûrs qu’elle comprendra : la période où Maryne a commencé à se diriger vers l’anthropologie, non sans trois années de droit brillantes et plusieurs propositions de postes, fut un peu comme une seconde naissance. « Je me suis raccrochée à mes études avec une vraie envie de comprendre l’être humain. J’ai toujours été fascinée par ça, à la fois dans son aspect corps mais aussi social et culturel. Pour moi, l’être humain, c’est de la science-fiction, aussi bien pour des choses magnifiques que dramatiques. Depuis toute petite, j’étais persuadée que j’allais changer le monde, aider les autres. Je suis une grosse geek, j’adore les jeux vidéo, les films, la littérature SF, la philosophie et l’histoire, entre autres. Je voulais être un super-héros. C’était une bonne soupape. Quand on regarde tous les super-héros, on trouve toujours le même schéma : ils sont dans la merde, ils en font une force et ça s’arrange. Mon hyperactivité, mon hypersensibilité et ma surdouance, que je ne comprenais pas, je les ai transformés en superpouvoirs ». Même si elle aime contrôler les choses (de son propre aveu), il y a parfois des moments de blancs, comme des parenthèses inattendues, qui retournent complètement la situation. Dans le jargon de la bd ou de la fiction, on pourrait appeler ça des cliffhangers. Les siens sont juste plus terre-à-terre.

« En troisième année de droit, j’ai eu une année particulière », essaye-t-elle de résumer. « Je n’aimais plus aller en cours, les gens me faisaient chier. J’apprenais à utiliser tous mes problèmes comme de vrais outils au quotidien et à ne plus les subir, mais j’en ai aussi eu marre de la vie autour de moi, que je trouvais superficielle. Je ne voyais que des étudiants qui se bourraient la gueule, qui partaient en soirée, ça ne me parlait pas du tout ». Quasiment du jour au lendemain, elle devient un ersatz de personnage du casting de Big Bang Theory, sorte de cliché vivant, de ceux que les médias traditionnels aiment brandir à chaque fois qu’un jeu vidéo à succès sort dans le commerce. En somme : une no-life. Elle passe ses journées à jouer à ses jeux vidéo et oublie tout du monde qui l’entoure. « C’était horrible pour moi de repartir dans le réel. Je bouffais des pizzas froides, c’était n’importe quoi. Il y a eu un double déclic : ma santé s’est aggravée. Le corps n’est pas qu’un ennemi, il est aussi là pour donner des messages. Il m’a donné une bonne claque. Je me suis posé des questions sur ce que je voulais faire. Je suis partie en anthropologie, histoire de regarder le monde comme si je ne le connaissais pas. Être prêt des institutions, ce n’était pas être prêt des gens », professera-t-elle sur un ton un brin théâtral (sa période conservatoire a dû aider).

Rebondissement

Avouez : dans la posture du héros, vous ne vous attendiez pas à ça. La deuxième série de planches, qui fera office d’épisode deux, est presque l’inverse de la première. L’une est d’ombres, l’autre de lumières. L’anthropologie, Maryne l’a dit, est une « vraie révélation » pour elle. « Ça a autant été une manière d’étudier les autres que de m’étudier moi. De me comprendre, de mieux trouver ma place ». À partir de cet instant, elle consomme les études à la carte comme dans un restaurant à volonté : sociologie, psychologie, histoire, neurosciences. Elle passera même par la case recherche aux côtés du professeur François Tison, grand neurologue spécialiste de la maladie de Parkinson. Au culot. Car Maryne a constitué une carapace grâce à un certain égo et surtout un bagout à faire pâlir Lucchini (bon, peut-être pas quand même, mais enfin vous avez compris la comparaison). En faisant de la recherche appliquée, elle se pose encore une fois dans un rôle d’héroïne, moins par orgueil que par nécessité, dira son thérapeute imaginaire au détour d’une planche un peu étrange aux couleurs presque délavées.

« Au fur et à mesure que cette idée grandissait, ma santé se dégradait. Je voyais bien que je n’étais pas seule, en tant que douloureuse chronique, à vivre des choses très dures. On est des millions dans la même difficulté ». Le deuxième entracte, en guise d’épisode bonus de quelques cases, ne sera qu’une simple histoire de désillusion. Du profond désir de réaliser une thèse, Maryne se retrouvera mise sur le côté, frustrée d’être refusée par tous les labos dans lesquels elle avait candidaté, parce que « le milieu de la recherche est un milieu de requins, c’est compliqué d’y faire sa place. J’en ai eu marre, j’étais vraiment déçue. J’ai commencé à travailler pour des start-ups en tant que directrice de recherche et développement. Le client attendait un produit, c’était un autre angle. Les entreprises n’ont pas non plus pris beaucoup de risques : elles ne payaient pas trop cher et formaient en échange. La carotte, c’était un contrat CIFRE qui n’arrivait jamais. C’est là que j’ai commencé à mener en parallèle mon projet personnel ».

Superpouvoir

Lucine n’est donc pas juste un futur business qu’on lui espère florissant : il est l’héritage d’un passé compliqué dont elle a su, à la mesure d’années de travail sur elle-même, tirer une force. Si le projet est réellement né il y a quatre ans, il est en réalité bien plus ancien. Hormis son nom à la symbolique très forte (c’est celui, nous explique son associé, de la déesse Junon implorée par les femmes antiques subissant les douleurs de l’enfantement), c’est l’élément perturbateur de tous les récits de super héros modernes. C’est l’araignée de Peter Parker, le rayon gamma de Bruce Banner. La fondation même du squelette de toute génèse. Et elle était là assez tôt, « à partir du moment où j’ai mis le pied dans un hôpital, d’abord en tant que patiente puis en tant que chercheuse à Haut-Lévèque. J’ai commencé à faire de la recherche sur les douloureux chroniques, j’en ai rencontré. En réalité, l’idée existe depuis six ans. À cette époque, dire à un malade que c’est un téléphone portable qui va le soulager, ça restait encore dans le domaine de la science-fiction. Personne n’y croyait, mais j’étais sûre que j’avais une bonne idée. Je ne me suis jamais séparée de l’idée que la techno devait se faire avec l’utilisateur. Les études m’ont permis, il y a deux ans, d’avoir un bagage suffisant pour comprendre les besoins des patients et des médecins. En allant faire une visite dans un centre de la douleur, j’ai su que tout était déjà prêt. Le lendemain, j’ai aussi constaté que les patients n’avaient que très peu accès à ça, une fois par an à Paris. Il existait déjà tout ce qu’il fallait pour créer un concept de centre de la douleur dans la poche d’un patient. Il fallait juste transformer les recherches en produit ». Voilà que le costumes se revêt de sa cape, que les ailes du paon se déploient.

Elle se sert de tout son bagage d’étudiante pour les faire tenir en l’air plus longtemps. Avec, déjà un objectif en tête : se faire labelliser comme dispositif médical, non sans un protocole ultra strict géré par la Haute Autorité de Santé et des tests avec des professionnels spécialisés dans la douleur au sein de différents CHU (notamment Amiens) et des « patients experts ». Concrètement, Lucine n’est pas une application mais plusieurs. La technologie, que Maryne a conçu en interne avec ses propres connaissances, est capable de créer une application en fonction de la pathologie; ses principaux donneurs d’ordres étant aussi bien les laboratoires que les établissements de santé ou les mutuelles. « On ne compte pas digitaliser tout le parcours de soin, plutôt faire en sorte qu’il y ait une vraie nouvelle rencontre entre un médecin qui n’a plus le temps et ne sait pas prendre en charge ces gens et les patients, paumés dans le parcours de soin et qui n’ont pas de solutions. Le besoin d’un douloureux chronique, c’est d’avoir une réponse tout de suite. L’application est aujourd’hui en capacité de diagnostiquer la douleur ». Et ce grâce à un squelette d’études et une méthode qui passe par des questions sur les conditions du déclenchement de la douleur mais aussi des scans digitaux (voix, visage et haut du corps).

Sur cette palette de capacités et de mutations, sorte de réplique médicale d’un vaisseau Nostromo qu’elle pilote depuis quatre ans (sans l’Alien dedans), il a bien sûr fallu construire une économie. Là encore, la répartie de Maryne fait des merveilles avec peu de mots. « Les premiers coûts de l’entreprise, qui sont ceux de la recherche, c’était ma tête. On a fait une maquette (+ 20 000 euros) dont on a financé un partie. On a créé une première version, mais on n’avait plus d’argent pour la deuxième » Malgré une campagne de crowdfunding clairement pas à la hauteur des espérances (entre 1000 et 1500 récoltés pour un objectif optimal de 25 000 euros), un gala de charité organisé en deux mois en juin dernier a permis de retrouver un peu le sourire (un peu plus de 9000 euros récoltés). « Ça a été un moyen pour nous de montrer qu’on était là et motivé » révèle-t-elle. Ce n’est pas seulement son projet, c’est aussi, un peu, son espoir. Car, sans jamais éluder la moindre question, la jeune femme admet que cette avancée, elle en sera la première bénéficiaire. « L’entreprise se structure, on avance. J’ai l’impression, pour la première fois depuis très longtemps, d’être à la bonne place, au bon endroit et au bon moment ».

Ce ne sera bien sûr pas faute d’être passée par des chapitres intermédiaires. Du sport de haut niveau (qu’elle ne peut aujourd’hui plus pratiquer pour raisons de santé) notamment en championnat d’Europe d’athlétisme ou encore, plus surprenant en Pole Dance. Du chant, dans le blues et le jazz (sa voix grave l’aura apparemment aidé à choisir son style) et de la performance burlesque. Aujourd’hui en sous-marin, un peu dans l’ombre, elle ne niera jamais avoir été attirée par la lumière des projecteurs. « J’avais le rêve de faire de la scène, j’ai fait du semi-pro pendant quelques étés. Quand on m’a annoncé que j’étais malade et expliqué que j’allais finir en fauteuil, ça a été un déclic pour moi et pour mon entreprise. J’ai quand même été intermittente du spectacle pendant un an, en plus du travail de recherche sur Lucine ». Elle continue de chanter encore aujourd’hui, souvent pour elle, parfois pour les autres. Mais cet été, elle entamera le dernier acte de son parcours initiatique. Finie la collaboration avec l’entreprise Alogia. Finis, les tâtonnements et les années de recherche. D’ici l’année prochaine, Lucine deviendra une réalité. « On ne va pas permettre à un laboratoire de vendre plus, mais de vendre mieux. Ça va permettre de diminuer aussi les coûts des traitements et de remettre le patient au centre ». Les premiers contrats commenceront à arriver en même temps, et des entreprises, soucieuses de créer des solutions aux maladies de leurs employés, sont déjà intéressées par l’idée.

« Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités »

Ça permettra peut-être enfin, pour cette femme au parcours singulier, de faire une pause et de prendre quelques vacances. À l’heure des dernières pages, avant une nouvelle saga potentielle, beaucoup de choses ont changé. Depuis près d’un an, Maryne a renoué des liens avec ses parents, à qui elle a su pardonner. « J’ai compris qu’on n’apprend pas à être parent, que chacun fait ce qu’il peut. On est d’abord responsables soi-même des choix qu’on fait. On ne peut pas en vouloir à la terre entière pour ce qui nous est arrivé. Il faut juste avancer ». Toujours un peu solitaire sans être misanthrope, elle peut aujourd’hui compter sur le soutien de quelques amis fidèles. Son plus grand défi est toujours de « survivre », mais elle le fera forcément en paix avec elle-même.  » Chaque jour, mon corps me rappelle que je suis en train de crever. J’ai l’impression que ma maladie, c’est comme le démon Kyubi dans Naruto : ça donne une force incroyable mais on peut vite péter un plomb. J’espères vraiment, un jour, quand Lucine aura très bien marché, reprendre des études en physique quantique pour étudier les trous noirs ». Pour se tourner vers cet espace qui la fascine tant. Quand elle a le temps, elle écrit, un peu au feeling, sans jamais avoir rien publié, même si elle est persuadée qu’elle le fera un jour.

« J’ai aussi appris à m’aimer, ne serait-ce que pour être plus dans la rencontre que dans le jugement. Je suis assez fière de ce que j’ai réussi à accomplir, vu d’où je viens ». Le plus grand défi du héros, celui qu’il porte depuis tant d’années autant comme un don du ciel qu’une malédiction, permettra sans doute de la libérer de ses derniers démons. « Ce sera quitte ou double. Soit on n’arrivera à rien parce qu’on sera là trop tôt, mais plus j’avance et moins j’y crois, soit ça va exploser parce qu’aujourd’hui on répond à une demande réelle et on fait les bons choix ». Souvent, les histoires de surhommes finissent toujours par quelques phrases, autant en signe d’épitaphe de d’éternel recommencement. On lui a laissé le choix des siennes. « Aujourd’hui, mon histoire n’est plus un poids, c’est une force et une fierté de me dire que j’ai réussi tout ça. Je suis un peu devenue un bouledogue. J’ai chopé mon rêve, je ne lâche plus. J’irai jusqu’au bout ». C’est sans doute là le plus grand pouvoir dont elle puisse s’armer, et celui que tous les héros de l’imaginaire romantique possèdent : une indestructible volonté.

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