Michèle Alliot-Marie : « Une nouvelle ligne pour la LGV au Pays Basque serait une aberration »


Alain Stoll

Michèle Alliot-Marie : "Une nouvelle ligne pour la LGV au Pays Basque serait une aberration"

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 07/07/2011 PAR Nicolas César

« Je suis contre une ligne nouvelle. Je veux une juste utilisation des ressources publiques. C’est une question de logique et de respect vis-à-vis des citoyens. Le TGV doit s’arrêter à Bayonne et à la frontière », a avancé MAM » dans un entretien au quotidien « Sud Ouest ». « Entre l’utilisation de la ligne actuelle et une nouvelle ligne, on gagnera quelques secondes. Est-ce qu’il faut dépenser plus de 1,3 milliard d’euros, et probablement beaucoup plus, pour gagner quelques secondes ? C’est une véritable aberration », justifie l’ex-ministre des Affaires étrangères. « Aujourd’hui, je me réjouis de voir que le préfet de région (Patrick Stefanini) considère qu’il faut attendre les études commandées par les élus avant de prendre des décisions », a-t-elle ajouté. La députée des Pyrénées-Atlantiques égratigne au passage le président PS de la région Aquitaine. « Alain Rousset souhaite une nouvelle ligne pour que Bordeaux soit à deux heures de Paris et à deux heures de Madrid. Ça voudrait dire que les trains ne s’arrêteraient pas à Bayonne. Ce n’est pas acceptable »,

Les études de RFF en cause
Ces déclarations de MAM confortent ceux qui préconisent la modernisation des voies actuelles. Ici, le projet de ligne nouvelle de LGV traversant le Pays basque a fait l’objet d’un très vif débat et a suscité de nombreuses manifestations. « L’augmentation du trafic passager en provenance de Paris peut être largement absorbée par la ligne actuelle qui n’est utilisée qu’à 20% de ses capacités », plaide Jacques Saint Martin, ancien Président de la Chambre de Commerce de Bayonne et du Pays Basque, membre du Cercle de Burrunz. En outre, « RFF nous annonce un déferlement prochain du fret ferroviaire au Pays Basque avec une multiplication par 10 du trafic en 10 ans. Ces prévisions deviendront-elles un jour une réalité ? », demande-t-il. Lorsqu’elle était encore ministre, MAM s’était déjà publiquement opposée à François Fillon, le Premier ministre sur cette question. Désormais, sa parole est encore plus libre et à n’en pas douter, elle fera entendre sa voix, en tant qu’élue de la région. Les maires des trois communautés de communes basques sont unaniment contre cette nouvelle ligne. Une hypothèse de tracé a été arrêtée fin juin à Bordeaux lors d’une réunion du comité de pilotage. Ce dernier a demandé la poursuite du dialogue avec les acteurs locaux et des études complémentaires. Ce dossier sensible est loin d’être clos.

                                                                                                                          Nicolas César


Crédit photo : Alain Stoll


La réaction d’Alain Rousset: trois contre-vérités

1 – « Entre l’utilisation de la ligne actuelle et une nouvelle ligne, on gagnera quelques secondes », affirme Mme Alliot-Marie.

C’est totalement erroné puisque d’après le dernier rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) publié en juin 2011, le gain de temps entre Bayonne et Saint-Sébastien est de 30 minutes de centre ville à centre ville, contre 1h30 aujourd’hui, et de 41 mn entre Bayonne etHendaye.

 

Avec la LGV, ce sera une révolution dans les temps de parcours indispensable pour l’Aquitaine. Il faut en effet savoir que Marseille bénéficie aujourd’hui d’un meilleur temps de parcours vers Paris (3h12 en moyenne contre 3h17) alors que le trajet est de 1.000 km contre 600 km !

Dès 2017, Bordeaux sera à 2h05 de Paris et à partir de 2020 à 4h30 de Madrid contre 11h aujourd’hui, soit un gain de 6h30 !

 

C’est aussi un temps de trajet de 3h30 vers Bruxelles, ou 4h30 vers Londres. Et Bayonne sera à 1h de Bordeaux, à 30 minutes de Mont de Marsan, à 20 minutes de Saint-Sébastien ou encore à 55 mn de Vitoria ou de Bilbao…Avec le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest, Bayonne sera à 3h00 de Paris !

 

Nous contribuons en même temps à relever un défi écologique car le TGV pollue 15 fois moins qu’une automobile, et une LGV est positive en termes de bilan CO² en 12 ans, c’est-à-dire qu’elle permet d’éviter plus d’émissions de carbone qu’elle n’en produit.

 

Côté espagnol, l’accord intervenu fin 2005 entre le gouvernement central et le gouvernement d’Euskadi va permettre de lancer rapidement le chantier de la ligne à grande vitesse qui mettra les villes de Vitoria, Bilbao et Irun à une demi-heure les unes des autres. Allons-nous dire à nos voisins espagnols, aux 50 millions d’habitants de la péninsule ibérique, que nous refusons ce progrès ? Nous ne pouvons pas continuellement tourner le dos à l’Espagne comme nous l’avons trop souvent fait au cours de l’histoire.

 

Mais raccourcir le trajet n’est pas le plus important dans cette affaire. La raison essentielle à la construction de la ligne nouvelle est que le trafic sur celle existante va être saturé dans quelques années. Tous les experts en conviennent. Le rapport remis récemment au ministre des transports par le CGEDD, un organisme non partisan placé sous la tutelle du ministère de l’écologie, vient d’ailleurs de le rappeler. Pour éviter l’asphyxie qui menace, il n’y a d’autre alternative que de construire une ligne nouvelle.

 

Il s’agit aussi de préserver la qualité de vie en pays basque. Si l’on veut développer le Ter Aquitaine, si l’on veut mettre fin au « mur de camions » qui prospère en Aquitaine, si l’on veut épargner aux milliers de riverains basques de la voie ferroviaire existante une pollution sonore qui deviendra insupportable avec la croissance du trafic de fret entre la France et l’Espagne, alors la réalisation d’une voie nouvelle s’impose. Prétendre que l’on peut multiplier les liaisons TGV et les transports régionaux avec la seule ligne actuelle n’est ainsi qu’une illusion.

 

En outre, le rapport du CGEDD est également très clair sur ce point : dans cette zone de la côté basco-landaise en plein développement, les acquisitions foncières constituent une urgence, et elles doivent être planifiées très rapidement. Si nous attendons encore, de nouvelles habitations seront construites pour être finalement très vite expropriées et détruites, avec ce que cela suppose en coûts humains et financiers. Aujourd’hui, une quarantaine d’habitations est concernée, mais elles pourraient bientôt être des centaines.

 

2 – Selon Mme Alliot-Marie, je souhaiterais « une ligne nouvelle pour que Bordeaux soit à deux heures de Paris et à deux heures de Madrid ».

Si Mme Alliot-Marie avait étudié de près le projet, elle saurait qu’une fois l’ensemble des lignes à grande vitesse réalisé, côté français comme côté espagnol, Madrid sera – dans le meilleur des cas – à 4 h 30 de Bordeaux, et non à 2 heures. Ce sera un progrès considérable dont je me satisfais volontiers.

 

3 – Madame la députée avance aussi que la gare de Bayonne sera la grande perdante de la mise en service de la future ligne à grande vitesse.

Rien de plus faux. Qu’on en juge : Réseau Ferré de France (RFF) a retenu pour la desserte future 13 allers-retours (AR) quotidiens entre Paris et Bayonne – avec arrêt à Bordeaux – et autant entre Bayonne et Toulouse ; 19 AR entre Bayonne et Pau ; 43 AR entre Bayonne et Dax, et 38 AR entre Bayonne et Saint-Sébastien. Où est le déclin de la gare de Bayonne ?

 

 

Au final, je suis convaincu que la LGV représente une opportunité pour les habitants du pays basque et le développement de leur territoire qui gagnera en attractivité. Prétendre le contraire, c’est faire faire preuve de mauvaise foi. »

 

 

 


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