Les (petites) merveilles d’Aqui! – Quand Bordeaux se voile de rose.


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Les (petites) merveilles d'Aqui! - Quand Bordeaux se voile de rose.

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 13/02/2015 PAR Alice

Je sors de la gare. Mon petit bolide rouge, pas chic mais pratique, m’attendra sagement au parking. Train plus tram, rien de mieux pour se rendre à « la capitale ». Vivement la fin des travaux, le train d’Hendaye est encore en retard. Tant pis, tant mieux… j’ai droit à la première classe. Cela s’annonce bien ! Même si j’appréhende, comme l’an dernier. Surtout, ne pas rajouter de crise à la crise. Un malaise serait mal venu, non ?! Vraiment je n’ai plus l’âge. Alors qu’est-ce qui fait que d’autres, avec moi, semblent ravis de cette nouvelle aventure ? La réponse, tout à l’heure. Pour l’instant me rendre aux Quinconces et retrouver Christine. « Petit chocolat chaud ? ».  Galeries proche du cours de l’Intendance. Charme désuet de ces cafés bordelais au décor à peine flétri… A faire pâlir les amateurs de vintage-trop-propre-pour-être-honnête.  « Tu as vu cette lumière ? On ne voyait que ça en sortant de la gare de Saint Jean ! ». Un magnifique rose-soir s’étirait sur les nuages. Début d’hiver doux et délicieux à regarder. Chacun des immeubles qui défile devant le tram se teinte au passage de cet indéfinissable voile rosé. La Garonne, elle aussi, semble réclamer son petit bout de lumière. Fiers de leurs sculptures, les ponts s’offrent à elle pour en capter les derniers rayons.

Le rose aurait-il migré vers l’ouest ?Pas de briques à Bordeaux et pourtant ce voile fin et délicat colore de rose intense les pierres de taille des grands immeubles de bord des quais. « Bon, je file, ma fille m’attend. » Moi aussi, il est temps de m’avancer. « Merci pour le carnet ! ». J’avais confié à Christine un petit carnet de mon voyage en Inde. Histoire de l’aider à préparer son périple. « Trop marrant. J’avais l’impression d’entendre mes ados en voyage ». Allez, c’est pas tout. Direction le quai des marques, CapSciences… c’est là que ça se passe. Un peu fébrile, je m’arrête. Prendre quelques forces. Un verre d’eau pétillante, une salade diablement savoureuse, skyper avec Aurore en Californie… et Hop ! C’est parti. Je rejoins les autres « professeurs d’une nuit ». Aussi impatients et tendus que moi. Dans quelques minutes nous entrons dans l’arène. Chris, en parfait showman, motive les quelques 150 jeunes impatients d’en découdre. Nous sommes présentés, salués… aussi timides que les têtes cachées dans l’amphi, juste derrière leurs ordinateurs. « Vous allez aussi redécouvrir, ou découvrir tout court, ces drôles d’objets en matériaux d’un autre temps : bois et papier. Crayons, feuilles… seront les seuls outils à votre disposition ! ». Brouhaha ! Chris pouffe de rire. Il enchaine avec un clin d’œil « Mais vous pourrez utiliser vos portables (téléphones, tablettes ou ordis) pour réaliser des mise en scènes ». Ouf ! on respire dans les rangs. A propos de respirer : « Nous sommes donc en simulation de crise, c’est aussi pour cela que nous vous avons demandé de vous « déguiser » en pingouins (vous seriez trop à l’aise dans vos jeans). Mais, en plus… il vous sera impossible de sortir de l’établissement ». Grand silence. Certains commencent à comprendre. Pas de pause… cigarette. Oups… Avec son accent délicieusement british Chris souhaite bonne chance à tout le monde. La règle est donnée, les consignes comprises, le jeu peut commencer. Comme l’an dernier, chacun d’entre nous repart avec ses deux groupes de 10 étudiants. Français, mais aussi espagnols, allemands, anglais… Pas rassurés. A mon tour, me concentrer. Etre claire, précise pour les mettre dans de bonnes conditions de travail.

Ça y est, c’est parti. Ça phosphore.Ils ne manquent pas d’idées. Fertiles, ils trouvent très vite tout ce qui pourrait arriver d’embarrassant à l’entreprise (l’équipe) d’en face. Chaque groupe est tantôt le comité directeur d’une entreprise, tantôt le metteur en scène des ennuis qu’il fait vivre à l’autre. Journalistes, manifestants, associations-anti-, etc. Ils endosseront tour à tour des rôles qu’ils jouent à merveille. Les scénarios sont écrits. La succession de tuiles est logique. Cascades et tourbillons de problèmes. Normal, la vraie crise. Mais, en accéléré. Tout se joue en moins de 4 heures. Et, pendant la nuit. L’adrénaline, l’engouement, le jeu, même, nous gardent tous éveillés. Regards d’encouragement. « Ça va ton groupe ? tu tiens le coup ? » . Sans cesse en mouvement d’une pièce à l’autre, nous jouons les messagers, veillons au respect des consignes et de la sécurité des joueurs. J’apporte des informations clefs, quelques conseils, aussi. Après-tout c’est mon métier. Les oreilles, les regards sont attentifs. Enfin, jusqu’à un moment où la tension monte d’un cran, puis d’un cran, puis d’un autre… Ramener tout le monde à une gestion organisée. Ne pas céder à la panique. Garder un sang-froid collectif, malgré les sollicitations qui s’accélèrent. Aider chacun à travailler en équipe… Apporter de l’apaisement, de la sérénité, tout en relançant la mécanique infernale. Ils commencent à bien s’approprier le jeu, et les techniques. C’est fou comme ils absorbent vite… Au fait, je découvre qu’ils ne se connaissaient quasiment pas, avant. Enorme ! Progressivement, avec méthode, ils échangent, collaborent, décident ensemble. C’est génial. Et leur créativité en matière d’ennuis, pour ne pas dire autre chose, est sans limite. La qualité des mises en scène qu’ils imaginent me scotche. Ils ne manquent pas de ressources. « Un petit café ? ». Ah oui, alors, il est 3 heures… je sens que c’est le bon moment. Privilège des animateurs. Garder l’énergie pour les relancer, les faire réagir, agir, titiller l’équipe adverse dès l’accalmie. Pas le temps de me poser. Mes jambes se manifestent. Dehors, petit à petit, l’obscurité s’estompe et se dissipe.

Le pont Chaban-Delmas est le sixième franchissement de la Garonne à Bordeaux.

Les lumières du pont Chaban Delmas scintillent au milieu d’une légère brume.Bientôt fini, déjà ? Il est temps de débriefer. « Bravo, d’abord ! » Bravo pour l’énergie, l’envie, l’implication. Cette génération m’épate autant qu’elle peut parfois m’exaspérer. Quoi que… non, ils m’épatent beaucoup plus ! Ils sont formidables, même. « Au-revoir madame. C’était super ! On devrait le refaire, mais sur une période encore plus longue… ». Nous nous quittons, comme à regret, avec respect. Qu’ont-ils retenu de ce genre de marathon ? Sans doute plein de choses subliminales, comme le travailler ensemble, l’impérieuse nécessité de faire face, le partage réaliste d’un objectif incontournable. L’effort de lucidité en période de panique. Le prendre sur soi. L’organisation. Ah l’organisation ! Leit-motiv ! Là, ils touchent du doigt à quel point le talent ne suffit pas. Et pourtant, ils en sont bourrés, de talents. Que deviendront-ils ? « Qui sas, qui sas… ». Le charme d’un moment d’exigence, intense, vécu seconde après seconde. Puis, au petit matin… on s’engouffre dans le tram. Et chacun s’évanouira dans la ville. Tiens, pas de Serge le Lama, ce matin ?! D’autres visages, aussi fatigués, croisent nos regards. Certains, levés trop tôt pour aller au travail. D’autres de retour pour se coucher après une nuit en boîte. J’hésite entre la sensation de quelques dizaines d’années en arrière, et… Bof à quoi bon. L’aurore brillante et lumineuse se lève sur les quais de Bordeaux. Je me glisse dans mon train. Juste somnoler. Ne pas oublier de descendre retrouver mon petit bolide… Grosse fatigue mêlée d’une énergie folle. Regonflée à bloc. Merci les jeunes ! Merci la belle lumière de décembre sur les quais de Garonne !

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