L’Actualité du Roman Noir : Sarah Jane


James Sallis : Sarah Jane, Rivages/Noir traduit de l’anglais (États-Unis) par Isabelle Mallet - 207 pages - septembre 2021 - 19 euros

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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 08/11/2021 PAR Bernard Daguerre

James Sallis, un des grands écrivains des États-Unis, continue à creuser, avec son nouveau roman, une voie très originale dans notre genre favori. Il s’est fait connaître en France avec une biographie du romancier afro-américain Chester Himes (1909-1984), parallèlement aux aventures de ses deux enquêteurs, Lew Griffin à La Nouvelle -Orléans, et John Turner dans l’État du Tennessee. On lui doit aussi Drive, adapté en 2013 à l’écran, avec grand succès, par le cinéaste Nicolas Winding Redfern, avec Ryan Gosling dans le rôle-titre.

Le recensement de ces œuvres nous fait mesurer l’évolution de l’écrivain, qui façonne ici une sorte d’épure romanesque, où la narration chronologique est savamment déconstruite.

L’héroïne et narratrice du livre, Sarah Jane Pullman est policière dans une petite ville qu’on imagine perdue dans le sud des États-Unis d’Amérique, un travail quotidien, fastidieux parfois, mais où elle fait toujours montre d’empathie pour les victimes ou plaignants, à tel point qu’on la qualifier de flic humaniste. Et pourtant le passé de la jeune femme, qui nous est petit à petit dévoilé, révèle une face, sinon inquiétante, du moins obscure : une enfance et une adolescence pour le moins chahutées, un passage par l’armée américaine et ses théâtres d’opérations extérieures dont elle ne ressort pas indemne, enfin des graves violences exercées jadis envers son compagnon de l’époque, il est vrai particulièrement macho et dangereux. Cet itinéraire de vie nous est livré par fragments, et c’est tout le travail de recensement bénévole de ces morceaux épars de vie que j’ai patiemment collectés qui restitue ici, un peu artificiellement, un sens à un récit qui ne souhaite pas en avoir. Car l’auteur ne fait pas, on l’a compris, œuvre de biographie linéaire. Un itinéraire qui colle bien avec ce que raconte le mieux le roman noir américain, des vies comme des ballades pleines de blues, avec ses refrains mélancoliques ici délivrés sous des formes diverses : le goût de Sarah pour la bonne cuisine- elle a souvent exercé ce métier- (d’où peut-être cette métaphore humoristique et culinaire « la vie est rarement une pâte qu’on met au four et qui ressort merveilleusement dorée. » ), les descriptions de maisons aux strates successives de possession et d’abandon, les lettres de son père ou le testament -aveu d’un flic- comme autant de billets jetés à la mer.

De la méthode de James Sallis, transposons encore l’enseignement délivré à Jane par son professeur de littérature : « Les abstractions vous plaqueront un oreiller sur le visage jusqu’à vous étouffer. Aucune théorie n’est applicable à tout. Aucune théorie n’est applicable. Point. ». Dans cette histoire pleine d’ellipses, que comble le plaisir de la lecture, il faut rajouter, comme le propose Jean-Bernard Pouy dans sa préface, « un éloge de la fuite », hommage contemporain aux fondamentaux du roman noir, que Sallis renouvelle avec force et beauté.

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