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PUBLIÉ LE 05/01/2024 PAR Bernard DaguerreVarg Veum est un privé à l’ancienne, à l’image de ses prédécesseurs américains. Il en a hérité la ténacité et la conscience professionnelle, qui lui font souvent continuer et clore une enquête sans la certitude d’être rémunéré. Il partage aussi avec eux une certaine marginalité sociale qui découle en partie des aléas économiques de ses donneurs d’ordre et en partie de son changement de statut social.
Il a en effet d’abord été travailleur social avant de rompre avec un milieu professionnel dont les failles lui paraissaient insupportables. De manière générale, c’est le propre de tous les détectives, sous toutes les latitudes du monde, d’être des outsiders, plus ou moins mis à l’écart de la société sur les travers de laquelle ils enquêtent.
Un loup solitaire
Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que son nom signifie loup solitaire dans sa langue. Si l’on ajoute une addiction ancienne à l’alcool, qu’il a présentement vaincue, il regroupe vraiment les caractères archétypaux du policier privé d’origine. Dans cette 20ème aventure, il se découvre, au début de l’histoire une demi-soeur venue le solliciter pour retrouver sa filleule de 19 ans, Emma.
L’enquête le mènera dans les milieux interlopes des motards violents et trafiquant de drogue, auquel appartient le père de la jeune fille ; Emma ne se remet pas du refus de son géniteur de la rencontrer, augmentant son mal-être jusqu’à la tentation d’en finir avec la vie… Par la bande, il découvrira des éléments sur sa propre filiation, se confrontant lui aussi à de nouvelles incertitudes.
Comme tout bon enquêteur qui ne se dérobe pas à l’affrontement physique, il passera par la case hôpital, tandis que la fin de ses investigations mènera le lecteur à des rebondissements inattendus. On retrouve nombre des lignes de force de ses enquêtes : l’enfance et l’adolescence en souffrance, les conflits familiaux, les existences cachées, tronquées, mutilées. Et aussi l’attachement à sa ville, dans sa permanence et ses changements.
Encore quelques enquêtes
Est-ce à dire que le présent roman a un peu la forme d’un bilan ? Peut-être, car Varg a 61 ans -il exerce son métier depuis plus de 30 ans ; il ressent, légèrement certes, le poids des ans. Qu’on se rassure : Gunnar Staalesen, son créateur, a prévu encore quelques enquêtes pour un personnage qui symbolise à ce point l’ancrage dans sa cité qu’il a sa statue au pied de l’immeuble où il exerce son métier, sur les quais de Bergen ; et qu’il a donné son nom à une marque d’aquavit, l’eau de vie scandinave.
Il a atteint le rôle de personnage tutélaire de la ville puisqu’il résout, au terme d’une monumentale enquête (Le roman de Bergen, en 6 tomes -éditions Points) qui raconte la vie de la cité sur un siècle, une énigme criminelle perpétrée le 31 décembre1899, soit un demi-siècle avant sa naissance. Oui, Varg Veum est immortel !
