Gel en Gironde: « c’est tout le monde rural qui risque d’en souffrir »


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Gel en Gironde: "c'est tout le monde rural qui risque d'en souffrir"

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 06/05/2017 PAR Solène MÉRIC

Les mots d’abord : « coup de poignard », « coup du sort », « coup d’arrêt », « drame », « catastrophe individuelle et collective ». Pour Bernard Artigue, Président de la Chambre d’Agriculture de Gironde, Bernard Solans son premier Vice-président, Hervé Grandeau, Président de la Fédération des Grands Vins de Bordeaux et Bernard Farges, Président des AOC de Bordeaux, le sinistre qui vient de frapper non seulement la viticulture, mais bien l’ensemble du « canevas des cultures girondines », selon l’expression de Bernard Solans, est violent.
Les chiffres livrés à la presse ce vendredi le confirme : 10 000 ha de céréale à paille impactés, 10 000 ha de maïs gelés, 1000 ha de pomme-de-terre, 200 ha de petits pois de conserve, même chiffre pour les haricots verts, 55 ha d’asperges, dont certaines atteintes aux griffes ne pourront rien donner non plus l’an prochain. Plus de 200 ha de vergers, pommiers, kiwis, pruniers, noisetiers ou noyers sont également impactés, mais pour lesquels il est encore trop tôt pour se prononcer sur leur production.

« La sentence viendra avec la perte de clientèle »Pour la vigne, les chiffres du début de semaine sont confirmés : « 50 à 60% du vignoble est sévèrement touché. » Un bilan bien plus grave que la grêle de 2013, qui avait elle impacté un tiers du vignoble. «  On est en réalité dans les mêmes proportions que les pertes causées par le gel de 1991 ». Référence s’il en est, puisque c’est une des plus grandes catastrophes climatiques contemporaine que le vignoble bordelais ait connu. La carte provisoire ( à télécharger ici) dressée par la Chambre d’agriculture sur l’impact du gel dans le vignoble en témoigne.
La perte estimée se situe entre 1 à 2 Mds d’euros pour la viticulture girondine. « Avec un chiffre d’affaires annuel qui tourne habituellement autour de 4Mds d’euros pour la filière, on n’arrivera pas à compenser la perte dans les prochaines années. », estime Hervé Grandeau. « Au-delà du manque de production, la sentence viendra avec la perte de clientèles et de marchés, qui compenseront le manque de production par d’autres vignobles», anticipe Bernard Artigue. Des vignobles notamment étrangers, car, plus que la Gironde c’est bien l’ensemble du vignoble français qui a souffert de cet épisode de gel. « Dans l’immédiat, les plus touchés seront les vticulteurs de vin en vrac, puisque la récolte est pour la plupart d’entre eux déjà entièrement vendue et pour certains, ils se retrouvent sans même rien à ramasser… », pointe Hervé Grandeau.

« Savoir gérer la pénurie »« Après 2013, on avait perdu des marchés, et on était peu à peu en train de les reprendre, mais là, c’est un véritable coup d’arrêt », complète avec amertume Bernard Farges. Une stratégie, dont vont également souffrir les caves coopératives, elles aussi de plus en plus tournées vers les marchés à l’export. « Démunies, elles vont devoir changer de cap », estime Bernard Solans, qui pointe plus globalement que « c’est tout le monde rural qui risque de souffrir des conséquences de cet épisode de gel : beaucoup d’artisans, et entreprises travaillent avec les viticulteurs. Un chiffre d’affaire de 4milliards d’euros, c’est tout un système économique qui en dépend.» Une catastrophe qui emporte aussi avec elle, le négoce, soulignent les responsables.
Quant aux conséquences sur les prix, « une hausse de 10 à 20% est certainement envisageable et envisagée », concède le Président de la Fédération des grands vins, mais les quatre hommes parlent d’une même voix quand ils appellent pour autant les viticulteurs à se modérer. « Il faut raison garder sur la hausse car le marché existe, et il ne se soucie pas des incidents climatiques. Spéculer sur une hausse, c’est se ramasser dans deux ans. Il va falloir savoir gérer la pénurie, c’est une orientation essentielle et cruciale», préviennent-ils.

Début main, après le passage du gel dans un vignoble d'Entre-Deux-Mers


Augmenter le nombre des assurés « multirisque »Même s’ils ne pourront pas combler le manque à gagner, une longue liste de dispositifs et mesures sont pour autant mobilisables pour les viticulteurs sinistrés. Parmi ces mesures que la réunion du jour avait pour mission d’identifier, les quatre responsables citent notamment une série de mesures fiscales dont le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti, ou la mobilisation de la Déduction Pour Aléas (DPA), le report ou la prise en charge de cotisations sociales, la mise en place du chômage partiel, des reports d’annuité ou aménagement d’endettement auprès des banques, l’achat de vendanges, ou encore les Conventions de Mise à Dispositions via la SAFER.
Mais les deux mesures sur lesquelles insistent les intervenants sont la Mobilisation du Volume Complémentaire Individuel (VCI) autorisée depuis 2010 dans le vignoble bordelais, et l’assurance récolte et gel.
La mobilisation de la VCI dégagée en 2016 représente 370 000 hectolitres. Ceux-ci viendront s’ajouter à une récolte 2017 attendue à 2,7M hectolitres, là où en moyenne elle est de 5,4 millions d’hecto… Quant à l’assurance multirisque, seuls environ 20% des viticulteurs s’y sont résolus. Les quatre hommes gardent donc à l’esprit la nécessité de réussir à faire évoluer ce chiffre, et « arriver à faire prendre conscience aux viticulteurs de la nécessité intégrer ce coût dans la gestion des exploitations, tout en leur expliquant que plus il y aura d’assurés plus les prestations seront intéressantes.»
A ces différentes mesures d’accompagnement fiscal, administratif et financier, les techniciens de la Chambre et autres organismes professionnels, seront également beaucoup mobilisés sur le terrain pour soutenir au mieux les viticulteurs dans leur travail de la vigne et éviter le risque, possible, d’une non récolte en 2018.

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