Vert carbone : Art Aquitaine honore la forêt meurtrie sur les quais de Bordeaux


Art Aquitaine
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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 24/01/2010 PAR Isabelle Camus

D’une taille allant de 1,2 m à 0,8 m,chacun porte un nom dont le propriétaire possèdeune fibre artistique doublée d’ une sensibilité écologique ainsi que l’inscription, « un mètre cube de bois capte une tonne de C02″. Hier, l’installation aux allures de » land art » organisée par le collectif d’artistes Art Aquitaine, présidé par Jean-Pierre Dufour, vice-président du Conseil Régional chargé de la formation des artistes aquitains,a été inaugurée en présence des acteurs de la filière bois du Sud Ouest, des représentants de la Région Aquitaine, de l’État, de la mairie de Bordeaux, de l’Ademe et de la SNCF.

Rendre visible la création artistique tout en informant et sensibilisant le grand public à l’enjeu du carbone que le bois permet de stocker, tel est le but de Vert carbone, projet culturelprésenté par l’association Art Aquitaine, en ce dimanche 24 janvier, jour d’anniversaire de la tempête Klaus. Son médium ? 200 cubes peints à l’aide de peinture écologique, ce qui a limité la nuance des tons à 20, contre-plaqués en pin des landes, fixés sans colle mais avec des vis, remplis de chablis (bois abattu par les intempéries) et dont les tailles ont été pensées pour s’emboiter en gigogne afin de limiter le transport.

Le bois, matériau de demain
Établir des ponts entre le secteur de l’art, à même de bousculer, d’interpeler, de donner du sens et celui du bois, frappé dans son énergie et son économie suite aux cataclysmes successifs de 1999 et de 2009, telle est la feuille de route de Vert carbone. « Pointer du bois » comme l’a exprimé,dans un lapsus heureux, Corine Schubenel, représentante du collectif. Regroupement de 152 artistes engagés qui se proposent de faire mieux que les 130 chefs d’état à Copenhague, pour soulever des leviers sans culpabiliser et modifier le regard du public sur le bois. Se rapprocher du monde économique pour décloisonner et mutualiser les compétences afin de mieux en favoriser la promotion. Car si « le plastique a été le matériau du XXème siècle, le bois sera celui du XXIème ».

Entre désespoir et espoir
Il ne fait aucun doute que la tempête, qui a frappé la forêt des Landes de Gascogne,aura laissé,sur les terres et dans les cœurs, des traces et des blessures longues à cicatriser. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :30 000 personnes vivent de la sylviculture. 200 000 ha de bois ont été détruits, soit l’équivalent de six années de récolte pour une dizaine d’années de nettoyage, quand il faut de 10 à 15 ans pour qu’une nouvelle forêt émerge.
Cette situation, aggravée par la crise économique, Christian Pinaudeau, secrétaire général du Syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest et Christian Plantier du CIPM (Comité interprofessionnel pin maritime) l’ont, tout à tour, évoquée. Or, même s’il « n’existe pas de mesure sur les qualités et les vertus du stockage du carbone favorisé par le bois » comme le souligne Christian Pinaudeau,pour Christian Plantier « il est impensable de revenir aux marécages ».

Un virage écologique et économique à bien négocier
Chacun s’accorde à reconnaitre, l’indissociabilité, aujourd’hui, de l’écologie et de l’économie. Mais « dans une société qui zappe et qui clique » il est difficile de faire comprendre au grand public les enjeux d’une profession qui voit à 40 ans. 60 M d’€ ont été investis dans les gisements de Lacq par Total pour stocker du C02. Avec cette somme, 20 000 ha de forêt auraient été plantés pour 8 M de tonnes captées.En attendant, Christian Pinaudeaua proposé au préfet, Dominique Schmitt, d’exonérerles sylviculteurs de la taxe carbone au vu de leur action sur la limitation des émissions de CO2 . Car si aides il y a, elles sont insuffisantes. Alain Rousset, qui amanifesté une volonté solidaire en faveur du développement des nouvelles filières (bois énergie, biomasse, construction bois) le reconnait. « L’Aquitaine est la région où le réchauffement climatique est le plus élevé. Or le bilan carbone y est négatif. Là où il faudrait 9 tonnesnous fournissons 6 tonnes. »
« Les aides et les subventions ont été vite accordées, mais la difficulté a été d’obtenir les garanties bancaires » précise Dominique Schmitt, pour qui la priorité des priorités est de replanter.  » Mais prudence sur le maïs et le photovoltaïque à réglementer pour ne pas empiéter sur les zones à replanter ».

Art et sylviculture, un mariage prometteur
L’exposition organisée en ce moment au Frac Aquitaine « Dans la forêt », et celle évoquée par l’adjoint au maire, Dominique Ducassou,dans le cadre d’Art Chartrons, où 12 métiers avaient conçu une oeuvre sur le thème du bois, illustrent bien cette alliance inédite que peuvent nouer le monde de l’art et du bois. A savoir le mode de développement économique d’une filière favorisant l’insertion d’artistes, la mutualisation des moyens et des compétences (universitaires, industriels, scientifiques, artistes, professionnels du bois) dans une dynamique collective au service du climat.

L’installation dure jusqu’au 31 janvier. Elle sera clôturée par un dévernissageau cours duquel les artistes qui le souhaitent pourront s’exprimer.

Isabelle Camus

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