Cacophonie pour le versement des aides de la nouvelle PAC


Réchauffement climatique, nouvelle politique agricole commune (PAC) et inflation, les agriculteurs cumulent les risques face à des consommateurs plus attentifs à leur panier.

vaches limousinesCorinne Merigaud | Aqui

L''abattage de vaches a diminué cette année de 8% en Nouvelle-Aquitaine et de 2,4 % pour les génisses et taurillons entrainant une hausse des prix et une baisse des exportations.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 03/11/2023 PAR Corinne Merigaud

En vigueur depuis le 15 octobre, la nouvelle PAC (politique agricole commune) 2023-2027 apporte son lot de surprises par rapport aux nouvelles exigences des éco-régimes. Les versements tardent à arriver. « C’est la cacophonie, assure Luc Servant, président de la Chambre régionale d’agriculture. On nous dit que 85 % des agriculteurs ont touché une partie des aides mais sur le terrain, on constate qu’il n’y a pas la moitié des aides prévues. Il y a beaucoup d’évolutions depuis deux ans, la gestion des exploitations devient de plus en plus compliquée par rapport à la prise de risque. »

L’implantation des couverts végétaux, par exemple, prévue du 15 novembre au 15 février, est rendue impossible par les fortes pluies. Le changement climatique représente un risque de plus qui assombrit l’horizon des agriculteurs néo-aquitains.

MHE nouvelle épizootie

A cela s’ajoute un nouveau risque sanitaire avec la maladie hémorragique épizootique (MHE) dont on ne parlait pas voilà six mois. La maladie a été détectée, mi-septembre dans trois élevages bovins des Pyrénées-Atlantiques. Les conditions de circulation dans un rayon de 150 km des animaux impactent 13 départements du Sud-Ouest.

Les exportations sont interrompues et les incidences fortes pour les producteurs de broutards privés de leurs débouchés vers l’Espagne et l’Italie même si des accords ont été passés avec ces pays. Ils doivent donc nourrir les animaux plus longtemps. « C’est un surcoût de 3€ par jour et par animal pour les éleveurs qui auraient dû vendre leurs animaux indique-t-il. Plus de 2 000 foyers étaient recensés en France la semaine dernière. » La propagation fulgurante de cette maladie qui provoque avortements et problèmes de croissante est inquiétante avec des taux de mortalité de 5 % au lieu de 0,5 à 1 % annoncé.

Le climat a été plus favorable à l’agriculture néo-aquitaine cette année par rapport à 2022, malgré l’absence de pluies en début d’année mais présentes par la suite, pas de gel tardif ni de grosse canicule. Cela a permis aux agriculteurs d’engranger des récoltes d’été et d’automne avec des rendements corrects. « La campagne a été bonne pour les fruits et légumes sauf pour la fraise et le melon. Pour le Cognac, c’est une très bonne année en niveau quantitatif et qualitatif. La récolte a été moyenne dans le Bordelais avec une grande hétérogénéïté. »
La baisse de la collecte laitière est une tendance de fond avec -7 % pour le lait de vache en un an, due à la diminution du cheptel (-15 % depuis 2010). La perte s’élève à 2 % pour le lait de chèvre. La collecte reste stable en France pour le lait de brebis au 1er semestre tandis qu’elle se replie de 8,2 % au niveau régional.

Coupe sombre dans les surfaces de maïs

Concernant les grandes cultures, la production céréalière recule de 2 % par rapport aux cinq dernières campagnes, plombée par le maïs (-700 000 tonnes). En vingt ans, les surfaces de maïs grain ont été réduites de 37 % en Nouvelle-Aquitaine.
La production de viandes se contracte encore avec des baisses dans toutes les filières. En bovins, elle atteint 8 % pour l’abattage de vaches et 2,4 % pour les génisses et taurillons. En ovins, elle est encore plus accentuée avec -17 % d’abattages malgré des prix de vente supérieurs à 2022. La production porcine a reculé de 5,3 % et les prix producteurs repartent à la baisse.

« Pas autosuffisant pour les viandes »

Quant aux volailles de chair, le repli atteint 11,5 % au 1er trimestre. « On devient de plus en plus dépendant de l’importation malgré les discours sur le relocalisation des productions et les marchés en circuits courts, » constate Luc Servant.

La moitié des poulets sont importés des pays de l’Est et d‘Ukraine Enfin, les abattages de canards se redressent depuis mai dernier bien que les volumes soient inférieurs de 26 % aux deux années précédentes. Il tire la sonnette d’alarme quant à la dépendance de la France. « Le pays est déficitaire en viandes depuis 2014, déplore-t-il. La situation s’est fortement dégradée avec un taux d’autosuffisance de 88 % prévu en 2023 contre 97 à 99 % jusqu’en 2020. Il est passé de 92 % pour la volaille à 76 % cette année. »

La suppression des droits de douane en solidarité avec l’Ukraine a ouvert la porte aux importations de poulets premier prix. Les prix de production sont de deux à quatre fois moins élevés qu’en France.
De plus, cette conjoncture a pour conséquence de reléguer la Nouvelle-Aquitaine au second rang des régions agricoles de France en termes de chiffre d’affaires, dépassée par le Grand Est. La faute au changement climatique qui impacte plus fortement la région.

Luc Servant, président de la Chambre régionale d’agriculture, s’inquiète de la progression de al maladie hémorragique épizootique avec plus de 2000 foyers détectés en France.

« On a cumulé la sécheresse, le gel, la grippe aviaire, la grêle l’an dernier… La production n’a pas été suffisante. On a des contraintes très fortes sur l’eau ici et les charges des agriculteurs ont augmenté que ce soit le prix des intrants, de l’énergie et du matériel. »


Enfin, l’agriculture bio souffre particulièrement, notamment par rapport à l’inflation des prix alimentaires qui atteint 21 %. Les consommateurs sont plus regardants quant à leurs dépenses et réduisent leurs achats de produits bio. Conséquence, le nombre de conversion a fortement diminué en Nouvelle-Aquitaine.

Infos pratiques !

La Chambre régionale d’agriculture met en place une communication positive collective destinée au grand public. Le but est de gagner en visibilité sous une bannière commune #AimeTonAgri, d’organiser ensemble la prise de parole des agriculteurs et de toucher les jeunes générations pour favoriser le renouvellement des générations. Un fonds régional de communication associant la Chambre régionale d’agriculture et les organisations professionnelles agricoles sera créé et le réseau des chambres devrait investir 100 000 € cette année. La communication sur les réseaux sociaux sera accentuée.

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