Bordeaux Maritime attend la Police de Sécurité du Quotidien


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Bordeaux Maritime attend la Police de Sécurité du Quotidien

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 28/02/2018 PAR Romain Béteille

Un quartier en tensions

La concertation a donc eu lieu. Entre temps, les préfets ont changé de chaise et le Ministre de l’Intérieur Gérard Collomb s’est attaqué au dossier bien plus sensible de l’immigration, avec des fortunes diverses. En dehors de ces perspectives nationales, Bordeaux Maritime fait pourtant toujours partie des trente quartiers de « reconquête républicaine » retenus pour expérimenter la Police de Sécurité du Quotidien. Ce mercredi, le préfet Didier Lallement et le maire de Bordeaux, Alain Juppé, sont revenus de manière un peu plus précise sur les mesures concrètes toujours prévues pour être pleinement effectives en septembre prochain dans ce vaste quartier de 29 000 habitants en pleine mutation, où les habitants de Ginko et ceux du quartier des Aubiers sont encore en contacts un peu frileux. Les élus ont donc rencontré quelques habitants venus assister à ce point d’information qui faisait d’avantage figure de rappel d’étape. Il a tout de même permis à une résidente du quartier de témoigner de la réalité des problèmes du secteur : « toutes les nuits, nous ne dormons pas parce qu’il y a des voitures qui font des dérapages. Ça et la musique, c’est infernal. J’habite dans une rue qui fait impasse. Toute la nuit, j’ai au moins quatre-vingt voitures qui rentrent le soir. C’est intenable », a-t-elle notamment déclaré.

Il faut dire que les données chiffrées apportées par la préfecture justifieraient presque à elles seules les mesures décrétées dans le cadre de ce déploiement de la nouvelle PSQ : la délinquance représenterait « environ 15% du total » de la commune de Bordeaux. Les données de 2017 soulignent que si les « atteintes à l’intégrité physique » se « stabilisent », elles subissent encore une légère augmentation de +2,77% (contre +6,83% en 2016). Les vols par effraction, eux, diminuent de -20,70%, les vols de deux roues de -30,28% et les incendies volontaires de -7,69%. D’un autre côté, les vols avec violence (+8,60%), les vols à la roulotte (+27,97%) et les vols à la tire (+23,31%) connaissent visiblement des jours plus heureux, même si la constatation des infractions est elle aussi en augmentation (+34,95% pour celles liées à la drogue, notamment). Ces chiffres, s’ils sont un indicateur, ne font pas tout. Fanny Gabriel, secrétaire générale de la mairie de quartier Bordeaux Maritime, nous détaille la situation de manière un peu plus factuelle : « On est un quartier où il y a environ quatre ou cinq points problématiques avec des soucis de tranquillité publique, de trafics et de gène au quotidien pour les riverains, la journée mais surtout la nuit ».

Jean-Luc Paradot, lui, est délégué à la cohésion police-population de Bordeaux et intervient sur plusieurs quartiers, notamment celui de Bacalan notamment dans le cadre du CLSP (Conseil Local de Sécurité et Prévention de la Délinquance, qui agit sur la prévention par le biais d’une cellule de veille), concède que des problèmes de dialogue, malgré l’action de la police sur le secteur, demeurent. « Le problème majeur, c’est que le contact avec la population et les services de police est compliqué, il y a très peu de choses qui remontent. Je constate le décalage qu’on peut avoir sur les cellules de veilles : on a beaucoup de choses qui remontent par les institutionnels, les professionnels et les différents acteurs sociaux mais dans l’activité même des services de police, il y a très peu d’appels. Ce sera peut-être un intérêt de cette PSQ, avoir un lien plus direct, notamment avec le commissariat secteur ». « Ce lien entre la population et les autorités mérite d’être renforcé », a entre autres répondu le maire de Bordeaux. « Ce que nous entendons très souvent, c’est plutôt que quand les habitants appellent, il n’y a pas de réponses. Cette relation est donc encore à améliorer. Le maire, au terme de la loi, a aussi des responsabilités en termes de sécurité. Elles reposent sur les deux pieds : à la fois la prévention au travers de laquelle nous aidons toutes les structures, et la répression ».

Des mesures concrètes

Voilà donc l’une des lourdes tâches assignées à cette Police de Sécurité du Quotidien, dont cette présentation, bien qu’assez succinte, a apporté quelques éléments concrets de mise en place. Même si, de l’aveu même de la préfecture, la « stratégie est encore en cours d’élaboration », les grandes lignes sont déjà tracées. Concernant ces fameux soucis de contact avec la population souligné par Jean-Luc Paradot, la PSQ permettra à Bordeaux Maritime la création d’un poste de délégué du préfet spécialement dédié à la « cohésion entre police et population » sur le quartier. Ce dernier ne devrait pas simplement être là pour faire joli : il participerait à la mise en place de nouvelles « réunions de sécurité des quartiers » de manière régulière (sans que l’on en sache forcément encore beaucoup plus sur cette notion) auxquelles participeront un cadre de la police nationale, l’officier du bureau de police concerné, un élu de quartier et des représentants des habitants et des commerçants de la zone (et peut-être nous, si on peut s’y faufiler…). « Il nous faut des dossiers avec des éléments et pas simplement des impressions, savoir de quoi on a besoin vis-à-vis des magistrats », a d’ailleurs souligné le Préfet. L’un des volets les plus importants sera sans doute celui de la dissuasion : il passera par un renforcement des patrouilles pédestres, une augmentation de leur « amplitude horaire » (histoire, sans doute, d’essayer de n’oublier personne…) et des patrouilles mixtes composées d’agents de police nationale et municipale. Cette dernière, à Bordeaux (composée de 106 agents) vient juste, hasard du calendrier, de déposer un préavis de grève émis par les syndicats CGT et FO pour protester contre de « mauvaises conditions de travail » et une autre réorganisation, celle de leur service prévu en juin prochain (sans lien direct avec le dispositif national). Le mouvement de grève devrait débuter mardi prochain.

Pour revenir à cette collaboration, elle sera renforcée par la mise en oeuvre, « chaque semaine voire plusieurs fois par semaine » de SLIC, diminutif barbare désignant les Structures Légères d’Intervention et de Contrôle. Concrètement, cela signie un effectif supplémentaire de 10 à 15 agents, orientés uniquement sur les contrôles de voie publique et de circulation routière. Il sera surtout censé, de l’aveu de Didier Lallemend, « montrer la présence policière sur le terrain et à ceux qui habitent ici qu’il se passe quelque chose. Cette PSQ, c’est un concept mais aussi une réalité, c’est l’articulation entre le délégué du préfet, les réunions de sécurité de quartier avec les fonctionnaires de police et l’ensemble des dispositifs de sécurité et des effectifs supplémentaires qui vont nous permettre cette dissuasion. Nous expérimentons un dispositif nouveau dans sa pratique qui va s’étager entre aujourd’hui et le mois de septembre, date de début réelle. Je l’anticipe un peu à la demande du maire de manière à ce que les nouveaux effectifs arrivent assez vite », a-t-il ajouté. Pour Fanny Gabriel, c’est là une mesure « essentielle que l’on demandait depuis longtemps, pour avoir une présence supplémentaire sur le quartier. Je pense que c’est aussi parce qu’on est plusieurs donneurs d’alerte à dire que la situation se dégrade », ajoutet-t-elle. Enfin, du côté de la répression, la PSQ convoquera une affectation de la BST (Brigade Spécialisée de Terrain, des unités en première ligne créées par l’ancien ministre Brice Hortefeux dont l’image a été quelque peu écornée par une certaine « affaire Théo »…) sur le quartier, soit une douzaine de fonctionnaires supplémentaires s’ajoutant au reste. Ces vastes ambitions concretisées par le nombre ne sont qu’un début : en plus de ce volet très local, on sait déjà que la zone de gendarmerie de Gironde fera partie des vingt départements sélectionnés, avec des « groupes de contact » qui devraient être déployés à Bouliac, Mérignac ou Libourne d’ici 2019 pour, encore une fois, renforcer ce lien avec la popultation. La prochaine rentrée devrait à coup sûr attirer tous les regards des habitants du secteur, qui « attendent » à la fois de voir de leur yeux le renforcement des uniformes bleus sur le terrain et l’efficacité de ce nouveau virage sécuritaire.

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