Bordeaux: Images d’une époque au musée Goupil (1830-1914): Nous n’avons pas cessé d’être modernes


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Bordeaux: Images d'une époque au musée Goupil (1830-1914): Nous n'avons pas cessé d'être modernes

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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 30/12/2007 PAR Joël AUBERT

Ces estampes dressent le portrait physique et moral de toute une époque, ou du moins celui de cette bourgeoisie petite et moyenne qui prospère de la Restauration à la Troisième République.

Une collection unique en Europe

Avec le musée Goupil, la ville de Bordeaux possède une collection unique en Europe : le fonds de la plus grande maison de gravures parisienne, qui édita des dizaines de milliers d’oeuvres entre 1829 et 1921. C’est à partir de quelques-unes de ces oeuvres, présentées sous la forme d’un abécédaire à la façon du Dictionnaire des idées reçues de Flaubert, que le visiteur est invité à arpenter les boulevards de ce siècle qui inventa la production et la consommation de masse.

VERHAS JF, Le maître peintreDans un premier temps, le spectacle peut dérouter : les gravures, pour l’essentiel en noir et blanc ont un charme désuet, les références sont parfois anciennes ou littéraires, les postures de certains personnages peuvent sembler un peu académiques. Qui n’a pas vu ce genre d’estampe dans le salon d’une vieille arrière tante, orné d’un cadre doré et accroché sur un papier peint jauni ? Cependant, à regarder de près ces images du 19° siècle, on se surprend à y reconnaître les mêmes fascinations que celle de notre 21° siècle : le progrès technique et la science, la vitesse, les architectures grandioses de verre et d’acier, les médias, les spectacles, les vedettes et les stars, l’argent et la spéculation. Maintenant, comme avant-hier, on ricane devant la comédie du pouvoir, on s’extasie devant une vie rurale idéalisée, on se réfugie dans les valeurs de la famille, on célèbre la civilisation des loisirs et on refoule aux frontières du visible les classes laborieuses.

Goupil capteur d’imaginaire et de valeurs

Arnout, Cicieri, Guerard, Palais de l'IndustrieEditeur et commerçant d’art, Goupil faisait graver (puis photograver) les images en vogue à l’époque afin de les vendre au plus grand nombre. Il capte et diffuseainsi l’imaginaire et les valeurs d’une société, comme peuvent le faire aujourd’hui la télévision ou la presse magazine. Le voyage auquel nous convie cette exposition, à la fois riche et synthétique, laisse une impression d’inquiétante étrangeté : on mesure les transformations qui ont eu lieu dans notre société depuis 1830 tout en restant dans une culture familière. Comme si la France, après la longue parenthèse du 20° siècle, renouait avec l’esprit du 19° siècle, libéral et sans complexe, à la fois scientiste et traditionaliste, oublieux de la « passion de l’égalité » qui avait marqué la Révolution, prompt à se saisir et jouir des opportunités d’une économie déjà mondialisée.

Vincent Goulet

« La vie moderne. Images d’une époque, 1830-1914, Musée Goupil, Au musée d’Aquitaine, 20 cours Pasteur Bordeaux (05 56 01 69 40) ; jusqu’au 3 février 2008, entrée 2,5 euros
Illustration : La Bourse à Paris d’après François Auguste BIARD Photogravure de Goupil & Cie, épreuve sur papier albuminé, 43 x 62 cm (s. d.)

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