En grand témoin de la soirée, Xavier Fontanet a souligné au fil de son intervention, entre deux anecdotes de la vie d’un grand patron du CAC 40, quelques clés de succès de l’entrepreneuriat, tentant du même coup de casser certains clichés un peu trop attachés à l’image du patron. « D’abord, un patron n’est pas obsédé par l’argent, ça n’est que la récompense de son travail, recadre-t-il. C’est l’esprit de conquête qui obsède le patron d’une grosse boîte. La conquête et son équipe. » Car, en lien, il est un autre élément indispensable à la réussite, « la confiance en soi et la confiance dans les autres » répète-t-il à l’envie. Une importance des équipes et du capital humain de l’entreprise sur laquelle insiste également Julien Leclercq, racontant la bonne volonté de ses salariés à sauver l’entreprise, en acceptant spontanément sa proposition salvatrice de baisser leurs salaires de 15%. Une soirée de déclarations d’amour donc, aux patrons, aux salariés, bref à l’entreprise.
Mais, la soirée a aussi distribué son lot de coups de griffe : aux médias, dont « le traitement de l’entreprise et du patron est hyper caricatural », selon Virginie Calmels, aux hommes politiques, « méfiants à l’égard de l’entreprise parce qu’ils ne la connaissent pas », estime-t-elle, rappelant que « seuls 5% des parlementaires ont déjà connu une expérience en entreprise », et enfin au système français du syndicalisme. Bien que « nécessaire », il apparaît pour les intervenants, lui aussi « totalement caricatural » au sein de l’entreprise… En bref, pour des entrepreneurs à l’esprit conquérant, on comprend leur frustration à considérer qu’un monde de « barrières » et de « fossés (médiatiques, politiques et syndicaux) entourent l’Entreprise.
« Le plus beau moment, une embauche »Pourtant, l’heure n’est pas à la résignation, d’autant qu’ils partagent volontiers le constat que la France, malgrè tout, est le pays qui compte le plus de créations d’entreprises. « Faire bouger les choses de l’intérieur », c’est ce qui a motivé en partie Virginie Calmels à tenter l’aventure politique, raconte-t-elle avant d’exhorter le public de chefs d’entreprises présents ce lundi soir, à la suivre dans cette voie.
Quant à Alain Tesson, c’est dans une logique bien plus tranquille et moins combative, qu’il est passé lui aussi « de l’autre côté de la barrière » (décidément…): du syndicat Force Ouvrière, avec des responsabilités au niveau national, au patronat, de son propre garage Renault. Quand il force l’admiration, voire la curiosité, de ces voisins sur scène, il confie que « passer de l’un à l’autre m’a paru simple ». « Une dose de hasard, la possibilité de le faire, et de l’argent pour reprendre le garage », dit-il simplement. « Depuis que je suis patron, je mets en place ce en quoi je croyais : respect et dialogue. Je me vois comme le coach de mon équipe. » Lui aussi aime son entreprise, et elle le lui rend bien : « le plus beau moment que j’ai vécu en tant que patron, c’était il y a 10 jours, c’était une embauche. Un syndicaliste qui fait une embauche, j’ai l’impression d’avoir réussi le principal ! » Un beau message, en clôture de cette rencontre.
Si au total, amour, un peu de colère ont irrigué cette soirée, l’humour aussi était bien présent, grâce à l’animation du débat par un maître de cérémonie pas comme les autres: Calixte de Nigremont, beau parleur maniant humour et flagornerie entre deux questions. Autre bonus important: les incursions sur scène des trois excellents acteurs-improvisateurs de la BIP (Bordeaux Improvisation Professionnelle) reprenant à leur sauce, les propos des intervenants, en saynètes improvisées drôles et dynamiques, traitant le sujet de la soirée, avec la juste distance dont les artistes ont le secret.