« Bienvenue à Veganland » aux confins d’une société dystopique


Anna Bonnemasou Carrere

"Bienvenue à Veganland" aux confins d'une société dystopique

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 05/06/2019 PAR Anna Bonnemasou

Né sur les rives de l’Adour, le journaliste et romancier Olivier Darrioumerle présentait, dimanche 2 juin, son livre « Bienvenue à Veganland », aux éditions Sable Polaire, lors du Salon de l’Agriculture Nouvelle-Aquitaine. Le Biarrot d’adoption invite, au travers de son nouveau roman, à s’interroger sur une nouveauté de notre ère. Là où certains parlent de tendance, il assume et revendique le terme d’idéologie: le veganisme. L’histoire de ce deuxième roman débute au sortir d’une corrida. L’auteur y rencontre des militants vegans. Il les découvre prônant une idéologie qu’il qualifie de complète, ce qui le rassure à une époque où tout un chacun se gargarise presque de les penser mortes. Voilà le coup de dés par lequel débute l’écriture d’une dystopie bien ficelée, aujourd’hui finaliste du prix de l’Académie Rabelais.

L’apogée d’une société végane

Au fil de ses lettres, le romancier construit Veganland, un monde où, pour libérer les animaux domestiques, la société a domestiqué les hommes. A Océania, en Amérique du Sud, les vegans ont mené leur révolution et instauré leur pouvoir. Au sein de cette société les carnivores sont relégués en périphérie de la ville, où vivent les vegans, élites de la société, et ne peuvent la ré-intégrer qu’en remportant une compétition sportive. Dans cette utopie inversée le mot d’ordre est la retenue. L’éradication du désir, sur laquelle veille scrupuleusement « l’homéostasie », malicieuse alliance entre homéopathie et stasi (police politique de la République Démocratique d’Allemagne), police de l’Océania en charge du bonheur collectif. Ainsi apparaît le nœud de l’histoire, l’élément qui fonde l’existence et cause la perte des « sangs rouges » (carnivores) comme celle des « sangs verts » (vegans): le désir. Car si Océania brandit une humanité sans désirs qui ne souffre plus, la disparition totale du désir pourrait entraîner sa perte, car « une humanité sans souffrance n’est déjà plus humaine » philosophe Oliver Darrioumerle.

 

Bienvenue à Veganland roman d'anticipation par Olivier Darrioumerle

L’hyper-réalisme comme guide d’écriture

Son ambition : s’inscrire dans l’hyper réalisme, concept développé par le philosophe Jean Baudrillard. A travers la création d’une société aseptisée, les vegans créent une fausse réalité, une illusion convaincante fondée sur une simulation du bonheur. Ils cherchent à se déconnecter complètement de la réalité où le désir tient un rôle primordial. « Parce que le vrai c’est sale, le vrai ça pue, le vrai c’est ça » s’emballerait presque le romancier en balayant de la main les bêtes qui l’entourent dans le Salon. Cet hyper-réalisme il le ressent comme l’ambition de « nos petits bourgeois actuels qui rêvent de steak sans souffrance, d’une société toute propre ». Une idéologie qui lui parait comme la seule à la portée de cette génération, qui de part ses origines, peut avoir du mal à s’affilier à d’autres mouvements de revendication contemporains.

 Des choix d’écriture assumés face aux critiques

L’écriture, à l’instar de la vie, est une succession de choix. Et ses choix, Olivier Darrioumerle les assume pleinement. Ainsi, le romancier tente de rompre avec le cadre orwellien de l’écriture dystopique. « Chez moi la résistance est amorphe » explique t-il, citant l’exemple qu’il tente de suivre, « La société intégrale » de Cédric Lagandré. Et pour ce faire des mots forts, des mots choisis sont indispensables. Ceux de Darrioumerle sont simples, des phrases courtes, piquantes et efficaces. Une plume légère, et un style ne se laissant pas aller à la facilité d’un ton grave, permettent à tout lecteur d’intégrer rapidement les codes de l’Océania. « On a pu me reprocher de ne pas être assez littéraire, mais je l’ai voulu ainsi. J’ai voulu mettre mon livre au niveau de la société que je dépeins. » Si le phrasé peut paraître arrogant il n’est que la tentative d’expliquer que chaque mot résulte d’une écriture pensée pour être au plus prés de Veganland. Si les critiques se font jour sur ce second roman, et c’est heureux, il en est un qui, fidèle à lui même, lit l’homme à travers le livre. « Il est sensible à la violence sociale et à la diversité des formes qu’elle peut prendre » explique son ancien rédacteur en chef et ami de longue date Joël Aubert. Une délicatesse qu’on retrouve à travers les tourments de ses personnages, profondément humains dans ce monde déshumanisé.

« Bienvenue à Veganland », aux éditions Sable Polaire, aout 2018, 18,00€

Retrouvez l’interview d’Olivier Darrioumerle par Joël Aubert, sur agriweb.tv.

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