Portrait: Olivier Clerc, vacancier par procuration


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Portrait: Olivier Clerc, vacancier par procuration

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 19/06/2015 PAR Romain Béteille

A 28 ans, Olivier Clerc fait partie de la jeune génération d’entrepreneurs qui ont misé sur l’écologie pour développer leur business, sans pour autant que ses clients doivent frotter deux silex pour allumer un feu et diminuer l’effet carbone. Dans son petit bureau personnel, qui sert aussi de hall d’accueil aux clients qui passent la porte du domaine Ecotelia, ouvert en novembre et inauguré officiellement le 12 juin dernier, il passe le plus clair de son temps (« de 7h00 à minuit »). Il a monté un véritable domaine avec des hébergements traditionnels à dimension écologique. De la palombière (« qui est très prisée par les femmes de chasseurs ») à la roulotte viticole en passant par la véritable yourte mongole avec un isolement en peau de yaks, aucun des 5 continents du globe n’est oublié. Sauf qu’ici, on ne patauge pas dans la terre, et que quand on loge dans un « château dans les arbres »), c’est par une poulie que l’on attrape son panier pour le petit déjeuner du matin ! 

Une idée ambitieuseCe projet très original et décalé est né dans la tête d’Olivier alors qu’il était encore étudiant. « J’ai fait des études de commerce à Paris et Tours, et j’ai été sensibilisé au développement durable, j’ai d’ailleurs fait mon mémoire de fin d’études dessus. A partir de là, plusieurs pistes ont germé et j’ai approfondi mes recherches pour le projet que j’avais en tête, en étudiant chacune des régions via une grille de critères que j’ai élaborée. C’est avec cette grille que j’ai décidé de venir m’installer dans le sud-gironde. Je suis descendu sur place pour voir les différentes opportunités, rencontrer les élus… ». Cette forme de tourisme durable et insolite tenait particulièrement à coeur au jeune entrepreneur, qui a bâti son projet en ayant la main mise sur tous les stades du développement. Mais cela ne s’est pas fait du jour au lendemain. Lunettes sur le nez, air décontracté, Olivier avoue une longue gestation. 

« Ecotelia, ça représente pour moi 7 ans de travail à temps plein, à vivre comme un étudiant et à galérer un peu tous les jours. J’ai vécu pendant 5 ans avec une idée assez abstraite et sans aucune certitude, si bien qu’au moment ou je me suis mis à chercher un terrain, je n’avais encore aucune certitude du financement ». C’est qu’il lui a fallu deux ans pour trouver un terrain constructible et changer de classification, et encore deux autres pour obtenir le permis d’aménagement. Mais Olivier en est convaincu, même sans avoir une longue carrière derrière lui, il a visé juste : « mon but, c’était de créer plus qu’une entreprise. Je ne vais pas l’abandonner deux jours après ». 

Dynamiser le territoirePour cet amoureux de la nature et des balades en kayak, le centre-ville de Paris n’était pas vraiment la destination de rêve. Dans cet espace entre la campgne et la ville, il semble particulièrement à l’aise. Dans cette aventure, il a bien entendu reçu l’aide de sa famille et de sa compagne, qui assure toujours un salaire pour deux. Récemment, il a engagé un employé pour s’occuper des espaces verts, et fait appel à des intérimaires pour gérer les hébergements. Encore aujourd’hui, Olivier sait qu’il ne va pas se rémunérer pendant les 2 ans qui viennent. C’est que l’investissement d’un tel projet est tout sauf dérisoire : 1,4 millions d’euros sans compter l’achat du terrain, dont 85 000 fournis par des subventions de la région et du département (autant dire pas grand-chose). « Aujourd’hui, on a fait environ 850 nuitées, et les retours des clients sont positifs, ça me conforte dans l’idée que je n’ai pas fait tout ça pour rien ». Le jeune entrepreneur reste près de son bébé, puisqu’il habite une maison juste à côté du terrain qui accueille les touristes, pour une nuit comprise entre 50 et 160 euros. 

Comme pour se prouver à lui même qu’il en était capable, mais aussi prouver aux autres qu’il y a une vie touristique en dehors de la ville centre, Olivier justifie : « beaucoup de gens pensent qu’en dehors de Bordeaux, il n’y a rien à faire. Mais en termes de développement touristique, le reste de la gironde a beaucoup à offrir ». Entre les châteaux, les villages d’époque, la longue piste cyclable qui relie Bazas au Bassin d’Arcachon, le canoë dans la vallée du Ciron, l’accrobranche de Baume ou le circuit viticole des châteaux de Graves, difficile de ne pas lui donner raison.

Quelque chose en plusEt contrairement à certains autres petits malins qui profitent de la mode « écolo » pour la vendre simplement comme une image de marque, sur le petit domaine d’Olivier, l’écologie est vraiment visible. Aucune coupe d’arbres, aucun remblais, le terrain est tel qu’il l’avait acheté au départ. Hébergements démontables, bois de construction sans traitements chimiques, tri-compostage et recyclage des déchêts, toilettes sèches, produits locaux, éco-certification et futur prétendant au label européen, le jeune hôtelier a pensé à tout. Même à faire travailler les fabricants locaux, puisqu’une majorité de ses commandes est Made in France. « On essaye de donner du sens au message écologique sans mettre des panneaux partout, on ne fait pas de cours de morale. Mais les personnes qui sont sensibles à l’écologie y trouveront ce qu’elles cherchent. La France est très en retard sur l’écologie par rapport à certains pays scandinaves. Mais je pense qu’on peut vivre à son époque sans rien sacrifier et sans voir l’écologie comme une contrainte, sans revenir à l’âge de pierre », assure-t-il. 

Aujourd’hui, malgré tous les obstacles qu’il a rencontré, Olivier est fier d’en être arrivé là : « c’est vrai que j’ai vécu sept ans de galères, mais je ne regrette rien. L’administration vous dit toujours que ce que vous voulez faire est impossible, les gens vous disent que c’est irréalisable. Mais c’est faisable; avec beaucoup de volonté, on y arrive. Je ne me sens investi d’aucune mission mais aujourd’hui, je suis mon propre patron. J’ai réussi à faire le projet tel que je l’avais imaginé au départ, il n’y a pas de plus grande reconnaissance ». Prochaine étape : améliorer encore un peu le cadre et développer des animations thématiques. Et même s’il a encore toute sa carrière devant lui, Olivier Clerc a beau vous offrir des vacances, il n’est pas prêt d’en prendre. 


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