Le Barreau de Bordeaux fait un état des lieux des prisons


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Le Barreau de Bordeaux fait un état des lieux des prisons

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 27/11/2015 PAR Romain Béteille

Environ une centaine de personnes étaient réunies toute la journée ce vendredi 27 novembre, près de la Place de la Victoire, à Bordeaux pour un colloque centré sur un « état des lieux » autour de professionnels du droit et de témoins anciens détenus. Le rendez-vous proposait d’aborder des perspectives d’avenir d’un sujet qui revient sur le devant de la scène suite aux attentats de Paris. Au début du mois, une concertation a en effet eu lieu au niveau national dans laquelle le gouvernement a fixé trois objectifs : une revalorisation des indemnités des surveillants pénitentiaires (la majorité des 36 535 agents), la réduction des emplois vacants (environ 1300) et enfin une meilleure prise en charge de la population carcérale. Selon les derniers chiffres datant de juin 2015, 65 500 personnes sont incarcérées dans 188 centres répartis à travers la France, soit un taux d’occupation de 115%. Le taux de suicide de ces établissements pénitentiaires est deux fois supérieur à la moyenne européenne. 

Dépasser l’événementiel

Pour Pascal Faucher, juge d’application des peines, les débats sur les prisons sont encore trop rares : « On en parle souvent pour dire qu’elles flambent, quand il y a des émeutes ou des statistiques sur la surpopulation ou bien des évènements tragiques comme le 13 novembre dernier. Or, cette question doit dépasser l’évènementiel », affirme le professionnel. « Il ne faut pas que cela soit une réponse à l’évènement du jour ». Tout au long de la journée, plusieurs thèmes importants ont été abordés, notamment la question de la santé du personnel et des usagers des prisons. « Le climat dans les prisons est anxiogène, il y a beaucoup de risques psycho-sociaux. Ce qu’on aimerait, c’est trouver un moyen de faire bouger les choses », continue Pascal Faucher. 

L’évènement, auquel participaient majoritairement des avocats, étudiants ou professionnels du droit, était aussi l’occasion d’aborder le futur des prisons, les nouvelles applications possibles pour sortir de l’impasse de prisons vêtustes et surpeuplées régulièrement dénoncées par certaines ONG internationales comme étant parmi les pires d’Europe. « Il faudra nécessairement créer de nouveaux accès, de nouveaux usages pour les prisons. Développer la réinsertion, la formation, trouver un juste équilibre pour que chaque sortie soit la mieux préparée possible. Avec l’incarcération massive, on déplace le problème, on ne le traite pas », termine Pascal Faucher. Et même si certaines initiatives tendent à aller dans le bon sens (c’est notamment le cas à Gradignan ou un système de co-détenus de soutien a été mis en place en 2010 (pour lutter contre le suicide en détention), le problème est avant tout structurel selon Christophe De La Condamine. 

Toujours beaucoup de récidives

Libéré de prison en 2009 après avoir braqué le péage de Virsac, cet ancien détenu est venu témoigner lors de ce colloque. En 2012, il a publié aux éditions L’Harmattan un « Journal de Taule » de 247 pages dans lequel il racontait ses conditions de détention au quotidien. Aujourd’hui, il intervient en tant que membre de l’Observatoire National des Prisons et témoigne de son expérience dans divers débats autour de cette question. « Il existe toujours trop fréquemment des délits inventés, comme la mendicité agressive, et la prison française a développé une certaine culture des résultats. Mais il y a encore 60% de détenus qui récidivent sur 5 ans. La surpopulation transforme soit les détenus en fauves, qui sortent en ayant la rage, soit en loques. Les établissements pénitentiaires n’ont une bonne valeur qu’en tant qu’épouvantails, parce qu’ils font peur avant d’y entrer. Ils sont aussi un très bon voyant de la fracture sociale », affirme l’ancien détenu. Les solutions pour réformer le système selon lui ? « développer les peines alternatives, ne pas incarcérer les très courtes peines, améliorer la gestion des longues peines comme c’est le cas dans certains pays scandinaves et enfin décloisonner la prison en y important plus de moyens pédagogiques. Mais la prison souffre toujours d’un manque de moyens », conclue-t-il. Si les surveillants pénitentaires se sont illustrés en octobre dernier en manifestant contre le manque de moyens humains et matériels, les résultats de la concertation nationale ne sont pas attendus avant janvier prochain. Quand à leurs conditions de travail, elles sont là aussi problématiques : selon un avis sénatorial de 2014, les violences avec arme ont augmenté de 53 % en trois ans, les agressions sexuelles de 43 % et les rixes de 10%.

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