La paille hachée pour isoler les constructions de demain ?


Un chantier inédit est en cours de réalisation à Limoges, à proximité du lac d’Uzurat. Le centre de loisirs avec hébergement, construit en ossature bois, sera le premier en France isolé en paille hachée, un isolant récemment autorisé.

le futur centre de loisirs à ossature boisCorinne Merigaud | Aqui

Le centre de loisirs avec hébergement de la Ville de LImoges est en construction près du lac d'Uzurat. Un bâtiment exemplaire en matière d'isolation avec un nouveau matériau biosourcé la paille hachée.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 17/07/2024 PAR Corinne Merigaud

Il ne faudra plus raconter l’histoire des trois petits cochons de la même manière. La paille hachée est désormais reconnue pour son pouvoir isolant. Les premiers bâtiments en ossature bois isolés avec ce matériau sortent de terre au Nord de Limoges.

L’entreprise Guillaumie Construction Bois qui a décroché le lot bois avait déjà fabriqué des murs isolés en paille sous forme de bottes. Aujourd’hui, ce constructeur est le premier à utiliser ce nouveau matériau biosourcé validé, en décembre dernier, par un ATEx. Cet avis technique d’expérimentation fait suite à la construction d’un premier bâtiment,  en l’occurrence le CROUS de Poitiers. Le précieux sésame permet désormais d’employer ce matériau conformément à la réglementation, notamment par rapport au risque incendie.

Depuis la fermeture du centre de loisirs du Mas-Éloi, en 2017, les élèves de Limoges étaient accueillis les mercredis et durant les vacances scolaires dans des locaux à Beaublanc et dans cinq écoles, des lieux pas adaptés à des activités de loisirs. Pour y remédier, la Ville de Limoges a choisi de construire un centre de loisirs avec hébergement de 3.000 m² à l’emplacement de l’ancien camping municipal.

Un cadre champêtre

Le chantier a démarré en janvier, tout près du lac d’Uzurat, sur un îlot de verdure de 3,5 ha comprenant des arbres plantés dans les années soixante. Le centre de loisirs devrait ouvrir en septembre 2025 et accueillir 250 élèves dans un cadre privilégié, proche du centre-ville et entre les quartiers de La Bastide et de Beaubreuil.

Les murs sont réalisés en ossature bois et isolés avec de la paille hachée par la société locale Guillaumie Construction Bois.

Le futur centre comprendra six bâtiments dont cinq en ossature bois construits par l’entreprise Guillaumie Construction Bois située à Aixe-sur-Vienne. Un bâtiment existant sera réhabilité et revêtu d’un bardage bois pour créer une harmonie visuelle. « Un bâtiment sera réservé aux 3-5 ans et un autre aux 6-11 ans indique Benjamin Riffaud, conducteur d’opération, il y aura aussi un bâtiment polyvalent pour les groupes et une cuisine pédagogique. »

Le centre sera équipé de 80 places d’hébergement pour les séjours à la semaine comme des classes vertes. « Cela ouvre de nouvelles perspectives avec l’hébergement annonce Nadine Rivet, adjointe à la petite enfance. Les associations pourront également y venir et cet équipement pourra être loué pour des fêtes de famille par exemple.»

Les fédérations départementales de la pêche et de la chasse animeront le lieu, en lien avec le projet d’éducation à l’environnement qui sera proposé aux enfants. Le coût du projet s’élève à 6,9 millions d’euros avec des aides accordées par l’État, le Département et la CAF. Une demande est en cours auprès de l’Union européenne.

« Un déchet agricole renouvelable »

L’entreprise Guillaumie va fournir les murs en ossature bois isolés et préfabriqués dans ses ateliers, le bardage (bois et enduit) ainsi que la charpente débitée sur son nouveau centre de taille et les menuiseries fabriquées en interne. « Ce chantier est le plus important à ce jour pour notre société indique Fabien Gaumy le président, c’est le premier bâtiment en France avec des murs isolés en paille hachée et fibre de bois. L’enveloppe du bâtiment est très performante au niveau thermique. »

Ls murs sont préfabriqués en atelier et livrés sur chantier prêts à être montés.

Ce nouvel isolant a été développé par la coopérative iélo qui a ouvert son premier site de production à Bonneuil-Matours près de Poitiers. La paille de blé est récoltée et transformée par les agriculteurs de la coopérative suivant un cahier des charges précis. Le procédé industriel a été optimisé et adapté pour transformer des bottes de paille en paille hachée. La mise en oeuvre dans les murs s’effectue par trois méthodes distinctes l’insufflation, le déversement ou le soufflage.

« C’est plus compliquée qu’avec des bottes de paille mais la paille hachée permet de réduire le volume de bois nécessaire pour une même surface précise Hugues Giraudy, directeur du cabinet Atelier 4. Sa grande densité et sa forte compression en font un matériau qui prend peu feu. De nombreux tests ont été réalisés et, en cas d’incendie, la paille se consume lentement. »

Premier bâtiment durable en Limousin

Cette ressource est très abondante en France et cet usage ne concurrence pas les autres. « La paille est un déchet agricole renouvelable tous les ans explique-t-il, la production française est suffisante dans le pays pour isoler tous les bâtiments. Elle a des qualités isolantes intéressantes au niveau thermique et hygrométrique.» La paille produite en circuit-court provient de la Vienne car « il y a peu de production de paille en Haute-Vienne » signale l’architecte en charge du projet.

Autre atout, son déphasage thermique dépasse 13 heures pour un mur isolé avec 30 cm de paille hachée. C’est le temps que mettra l’isolant à restituer, à l’intérieur du bâtiment, la chaleur captée à l’extérieur. Un paramètre important pour avoir un bon confort d’été.

Cet ensemble immobilier est aussi le premier en Limousin initié dans le cadre de la démarche Bâtiments durables de Nouvelle-Aquitaine (BDNA). Celle-ci passe au crible plus de 300 critères répartis en sept thématiques comme l’énergie, l’eau, les matériaux employés, le confort et la santé. « Le maître d’ouvrage a eu l’ambition de faire un bâtiment exemplaire pour l’accueil d’enfants complète-t-il, ce genre de construction va devenir la normalité à l’avenir. » Et comme le signalait le maire Emile Roger Lombertie, « En plus c’est du vrai local écolo. »

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