La mauvaise passe de la viticulture


La Conférence départementale du foncier en Gironde a été l'occasion de faire un point sur le marché foncier des vignes du Département. On y trouve pour le moins des situations contrastées.

Vignes en SauternaisRB

Vignes en Sauternais

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 17/12/2021 PAR Solène MÉRIC

Début décembre, la Safer Nouvelle-Aquitaine a organisé sa Conférence départementale du foncier rural (CDFR) en Gironde. Gardant le même thème de débat que lors des 11 CDFR précédentes (La terre pour quoi?), l’événement organisé dans les locaux de la Safer 33 à Bruges a fait salle comble. L’occasion pour le directeur de la structure girondine, Michel Lachat de revenir sur le marché foncier rural girondin, avec sa particularité forte : la place de la viticulture. Une viticulture globalement en souffrance depuis quelques années qui se traduit aussi dans les chiffres du marché foncier viticole.

D’un département à l’autre, les situations foncières ne se ressemblent pas. Là où certains départements constatent un « décroché » des surfaces échangées sur le marché foncier rural, la situation girondine enregistre « une stabilité parfaite » en surface de même qu’en valeur.

Un marché foncier rural globalement stable
Côté surface, 13 800 ha ont été échangés en 2021 (contre 13 000 ha en 2020), quant à la valeur global du marché, il est resté aux alentours du milliard d’euros sur les 5 dernières années. « Après des augmentations fortes de 2016 à 2018, il est en 5 ans passé de 1Md € à 1,185 Md€, avec une véritable stagnation entre 2019 et 2020 », décrit Michel Lachat, le directeur de la Safer 33. Une situation qui ne sera vraisemblablement pas comparable cette année puisque début décembre, le marché du foncier rural apparaît déjà « nettement au-dessus, à 1,456 Md€, porté par un forte augmentation des ventes de maisons à la campagne », dévoile Michel Lachat.

Car en effet, le marché non agricole, et donc la vente des maisons à la campagne est un des éléments qui composent le marché rural. Il en est même un poids lourd puisque celui-ci à 817 M€ porte 70% des valeurs qui s’y échangent pour 3 000 ha de terrains cumulés. Pour 2021, les tendances de ce marché non agricole sont donc d’ores et déjà annoncées à la hausse.
Autre composante du marché rural : le marché forestier. « C’est un marché qui représente entre 4000 et 5000 ha chaque année, mais qui affiche des variations importantes d’une année à l’autre en raison de quelques opérations particulières. C’est entre 600 à 700 ventes par an, pour un montant total de 40M€ en 2020 », détaille le directeur.
Sur le marché agricole hors vignes, 7070 ventes ont été enregistrées en 2020, pour une superficie qui reste stable mais une valeur en forte hausse cette année, passant d’environ 70 ou 80 M€ habituellement à 134 M€ en 2020. L’explication : « une transaction exceptionnelle affichant 13 000€ /ha », précise Michel Lachat.

Vignes : Erosion du marché des appellations génériques
Pour ce qui est du marché des vignes, production d’importance s’il en est en Gironde, le bilan est contrasté : « alors qu’on enregistre une forte diminution des surfaces, la valeur du marché global se maintient », expose Michel Lachat. Au total sur les deux dernières années (de 2018 à 2020) il note une diminution du marché de 42%, passant de 3700 ha à 2116 ha échangés. L’explication apparaît dans l’analyse foncière appellation par appellation, et traduit en réalité un symptôme de la crise que traverse la viticulture bordelaise. « Il y a une fermeture du marché des vignes des appellations génériques. Il y a sur le marché moins de vignes à faible valeur hectare mais, concernant les vignes des appellations les plus prestigieuses, le marché s’est maintenu, voire plus ».

Une érosion des superficies, du nombre de transactions et de la valeur à l’hectare qui est flagrante sur les Bordeaux génériques et les liquoreux de la rive droite. A tel point que le phénomène des vignes en friche s’accentue note le directeur. « Si la tendance à la baisse se poursuit avec une valeur à 12000 €/ha, il existe tout de même une prime au bio qui résiste beaucoup mieux que le conventionnel pouvant atteindre des prix jusqu’à 22 000 à 23 000/ ha », souligne Michel Lachat.

Une tendance à la baisse également notable sur les Côtes de Bordeaux, à laquelle résiste un peu mieux les Côtes de Castillon, proche de l’appellation Saint-Emilion. « Les secteurs les plus gélifs ne trouvent plus preneurs. Seul exception à ce désintérêt : lorsqu’il y a un bâti de caractère pour des opérateurs non issus de la viticulture », note Michel Lachat qui tente de rassurer, « quelque part ça veut dire que la viticulture fait encore rêver si le cadre de vie va avec ».

Des records en Pauillac, Margaux… aux friches en Sauternes
Mais Médoc et Haut-Médoc à la réputation certaine, ne font pas exception à cette tendance baissière : jusque-là habitués aux 60 000 à 65000 € /ha en moyenne, l’appellation fait désormais l’objet de ventes à 30 000 ou 40 000€/ha. « Seule l’appellation Moulis parvient à se maintenir », note l’expert.
A l’inverse les 4 appellations les plus cotées du Médoc, voient leur prix se maintenir voire grimper, c’est notamment le cas de Pauillac (2,8M€/ha en moyenne), Margaux (de 1, 5 à 2,5 M€/ha) ou Saint-Estèphe, qui « s’arrache » (jusqu’à 1M€/ha). Sur Saint-Julien (à la toute petite superficie) le nombre de transaction n’est pas assez significatif pour établir un chiffre marché.

Dans le déroulé des appellations, « Pessac Léognan reste très convoitée, avec une offre faible et des demande forte, en appellation Grave reste plus stable, quand en Sauternes, « pourtant connu à travers le monde, il y a à l’inverse beaucoup d’offres de ventes pour peu de demandes, s’étonne Michel Lachat. Là aussi des friches commencent à apparaître, et le rebond a vraiment du mal à se faire ».
Enfin côté Libournais, Pomerol et Lalande par exemple se maintiennent et trouvent preneurs, complète-t-il.

Débat CDFR 33 sur le dossier SabateySAFER NA

Débat CDFR 33 sur le dossier Sabatey

A l’heure du débat, c’est le dossier autour du site péri-urbain de Sabatey à Mérignac qui a eu les honneurs de la CDFR. Un dossier exemplaire en termes de collaboration entre une collectivité (ici Mérignac) et la Safer afin de répondre aux missions qui lui sont attribuées : installation agricole, protection de l’environnement environnement et développement local. Si l’affaire était plutôt mal partie, au final 5 jeunes agriculteurs ont pu être installés sur le site, l’entreprise Dassault a pu mener une opération de compensation environnementale en échange d’un projet d’extension de ses locaux à Mérignac.

Un dossier foncier à relire sur Aqui! : Mérignac : le site en déprise a laissé place à 5 projets agricoles périurbains

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