La Controverse de Valladolid: l’homme doit il être un loup pour l’homme?


Editions Acte Sud

La Controverse de Valladolid: l'homme doit il être un loup pour l'homme?

Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 04/07/2008 PAR Anne Duprez
La Controverse de Valladolid, Jean-Claude Carrière
Acheter ce livre chez Mollat.com

La question est simple: les habitants du nouveau monde conquis par les Espagnols en ce début de 16ème siècle, ceux qu’on appelle Indiens, sont-il des fils d’Adam? Ont-il été rachetés du péché originel par Jésus Christ? Sont-ils semblables aux Espagnols, ont-ils le même sang, et par conséquent les mêmes droits, ou sont-ils au contraire « nés esclaves », ce qui en arrangerait beaucoup, partisans de la guerre et de la conquête, des terres et des trésors essentiellement. Le philosophe Sépulvéda est de ceux-là. Il espère obtenir l’imprimatur pour un recueil de propositions en faveur de la force et de la lutte armée. Il est là pour ça. Face à lui, le père Bartolomé, qui a vécu de longues annéesauprès des Indiens, affirme qu’ils sont ses frères, créatures de Dieu au même titre que lui ou que le dernier des Espagnols. Profondément humain, parfois emporté par la colère, il a les contradictions de sa sincérité, et s’ il ne manie ni la rhétorique ni l’art de la logique de son adversaire, de son discours ressort une extraordinaire modernité, à l’image de cette Renaissance qui oscille entre obscurantisme et vent de réforme, despotisme et humanisme. « La dispute bien ordonnée, bien protégée par les grosses murailles, n’est pas coupée du reste du royaume. Elle est au beau milieu de la politique ordinaire. » On comprend alors que les grands sentiments sur le destin de l’Homme, si nobles soient-ils, sont bien souvent une gêne au pouvoir et à la cupidité, lesquels servent les comportements extrêmes et extrémistes. On comprend aussi qu’ au moment même où il ouvre l’ « époque moderne »par ses grandes découvertes et sa nouvelle manière d’envisager le monde, le 16ème siècle en amorce et en légitime les pires excès: esclavage, commerce triangulaire…

Nous sommes en 1550. Dans l’Histoire. Quatre siècle et demie nous séparent de l’action. Pourtant, les propos tenus, tous véridiques, sont mis en scène avec un suspense ininterrompu par Jean-Claude Carrière. Ils nous projettent alors dans une réalité qui, dès les trois coups de théâtre frappés, nous semble si proche qu’on la dirait possible à toucher du doigt. Ils nous mettent du même coup face à nous-mêmes, dans notre rapport à l’ Autre, celui qui, si différent qu’il puisse être de nous, est pourtant bien notre semblable.

Anne DUPREZ

La Controverse de Valladolid, Jean-Claude Carrière. Le Pré aux Clercs, 1992.

 

 

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

On en parle !
À lire ! CULTURE > Nos derniers articles