La colocation entre jeunes et seniors, l’habitat miracle ?


Héberger un jeune à son domicile, en échange d'un loyer modeste et de moments de convivialité : la cohabitation intergénérationnelle séduit de plus en plus de jeunes et de séniors face à un marché du logement contraint et des solitudes exacerbées.

une jeune femme et une femme âgée complicescanva

La cohabitation intergénérationnelle consiste pour un senior de plus de 60 ans à héberger un jeune de moins de 30 ans à son domicile, contre un loyer modeste. Une solution à envisager pour les étudiants de la rentrée 2024 ?

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 04/06/2024 PAR Manon Gazin

Rassembler deux générations afin qu’elles se soutiennent mutuellement : voilà ce que permet la cohabitation intergénérationnelle, qui prend de plus en plus de place en France.

Développée depuis 2004 et encadrée juridiquement depuis 2018 par la loi Elan, cette formule permet à des personnes de plus de 60 ans de louer ou de sous-louer une partie de leur logement à un jeune de moins de 30 ans. Objectif : renforcer le lien social et de faciliter l’accès au logement aux plus jeunes.

Pallier la solitude, rassurer les familles

En échange d’une contribution aux charges, les jeunes, en général étudiants ou en apprentissage, sont hébergés à temps complet. Les seniors, eux, peuvent ainsi bénéficier d’une compagnie, alors qu’ils sont souvent isolés, en veuvage ou loin de leur famille. Un système qui permet de pallier la solitude et d’avoir une compagnie le soir, tout en rassurant les familles des deux générations.

« Les stimulis sont importants. Mieux s’habiller dans la journée, car quand on est tout seul on ne s’habille pas forcément très bien. Manger mieux, car on se nourrit mieux quand on est à deux », explique Pierre de Nodrest, fondateur de l’association Maillâges. « Ou encore parler. La difficulté des seniors, c’est qu’ils perdent du vocabulaire parce qu’ils ne parlent plus ». Créée en 2012, Maillâges propose différentes formules de cohabitation au Pays Basque, dans les Hautes-Pyrénées, les Landes et le Gers. 

On s’est rendu compte que toutes les générations pouvaient être touchées par l’isolement

Depuis la crise du Covid et les confinements, les demandes de cohabitation intergénérationnelles augmentent des deux côtés. « On s’est rendu compte que toutes les générations pouvaient être touchées par l’isolement », affirme Pierre de Nodrest. « On a noté une évolution des demandes des seniors, de leur famille, et des jeunes », note de son côté Elise Renet, directrice de Vivre Avec. Fondée en 2004, cette structure rend possible des cohabitations à Bordeaux et à Libourne (et à Arcachon à partir de la rentrée prochaine), généralement le temps d’une année universitaire. « Certains jeunes prennent maintenant la cohabitation comme seule option quand ils cherchent un logement sur Bordeaux ».

Mise en relation, suivi, médiation

L’année dernière, Maillâges a suivi une quarantaine de duos, et Vivre Avec en encadre environ une soixantaine par an. Ces associations, en l’échange de frais d’adhésion, s’occupent de mettre en relation les jeunes et les séniors. Elles ont ensuite un rôle de suivi tout au long du contrat, et de médiation entre les deux parties. « L’objectif est de répondre aux attentes des uns et des autres en fonction de leurs caractéristiques propres », explique Pierre de Nodrest. « Les attentes d’un senior de 65 ans ne sont pas les mêmes qu’un senior de 90 ans. Parce que les besoins et l’état de santé ne sont pas les mêmes »

Ce système, encore récent, s’adresse à des profils variés. « On a des jeunes qui sont en apprentissage, à l’université, dans des écoles, ou qui travaillent », explique Elise Renet. Les jeunes encore en formation peuvent être particulièrement intéressés par cette formule, de par ses avantages financiers. « Les règles sont un peu plus souples. On ne demande pas de caution ou de justificatif des parents », souligne-t-elle.

À noter qu’en plus de ne payer qu’une contribution aux charges, les jeunes et les seniors ont droit aux APL dans ce cadre. Une facilité d’accès au logement qui peut être particulièrement intéressant en fonction des territoires. « Nous avons un contexte très contraint au Pays Basque, et de plus en plus dans les Landes », explique Pierre de Nodrest. « On est avec tout type de public. Parce que la crise, elle est pour tout le monde »Du côté des personnes âgées, il faut que ces dernières soient autonomes, et surtout, qu’elles aient « l’envie d’échanger », selon Elise Renet. 

Indépendance et partage

Bien que prometteur de nombreux avantages, la cohabitation intergénérationnelle reste encadrée et soumise à plusieurs conditions. Entre autres, que le jeune bénéficiaire soit certain d’avoir une chambre indépendante à disposition. « Il faut que la personne âgée mettent à disposition une chambre meublée qui ne nécessite pas de travaux, avec un lit, un bureau, une armoire. Et qu’elle accepte de partager des parties communes de sa maison, comme la cuisine et la salle de bain », explique Elise Renet. Cette dernière rappelle également que le jeune doit garder en tête qu’il est hébergé chez quelqu’un. Et qu’il ne doit en conséquence pas inviter des gens à l’improviste, par exemple.

Il y a une ligne rouge, les jeunes ne sont pas des garde-malades

Surtout, il faut qu’il reste clair que « le jeune ne remplace pas les intervenants à domicile ». « Ce n’est pas un auxiliaire de vie, un aide-soignant, une garde de nuit, ou une infirmière », soutient la directrice de Vivre Avec. « Il est là pour apporter une présence, une convivialité, pour échanger, partager un moment de repas ». Une « ligne rouge » qui ne doit en effet jamais être franchie, selon Pierre de Nodrest. « Il faut faire attention aux attentes des seniors en leur expliquant bien que les jeunes ne sont pas des garde-malades »

Actuellement, les deux associations font face à de nombreuses demandes de la part de seniors qui souhaitent mettre à disposition leurs logements. « Mais le rapport va bientôt s’inverser », précise le fondateur de Maillâges, faisant référence aux premiers résultats de Parcoursup qui arrivés fin mai, et avec eux leur lot de nouveaux étudiants en recherche de logements.

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