Le cybercafé est vaste et neuf, le carrelage noir, les murs rouges, un comptoir à l’entrée.Christophe a réalisé lui-même les travaux et installé les ordinateurs, des machines noires et puissantes, adaptées aux jeux en réseaux. « Les réseaux, je connais ça depuis que ça existe, quand on utilisait des prises BNC ou des coaxiales ». Dans l’une de ses nombreuses vies professionnelle, il s’est aussi occupé des ordinateurs d’un collège à la Brède, mais jusqu’au mois dernier, il travaillait comme chauffeur dans une entreprise de cars. Un accident du travail le fait de nouveau bifurquer. « Et pour gagner 800 euros par mois, autant se mettre à son compte ».
Christophe veut participer au nouveau démarrage de la ville et du quartier en particulier. « Il était temps que Carrier se désenclave. La rénovation a permis à des gens nouveaux de venir, les conversations changent un peu. Avec le tramway qui va ouvrir en mai, cela va continuer, le quartier s’ouvre. »
Il compte aussi sur l’ouverture en septembre 2008 du lycée professionnel des métiers de la pharmacie pour lui amener de la clientèle. « J’ai fait une étude de marché, normalement cela devrait être bon. Mais le loyer du magasin est un peu cher. » En effet, 530 euros hors taxes, cela fait beaucoup pour une activité qui démarre dans un quartier HLM. Comme dit Lucien, un habitant du coin qui vient boire un café : « Cela en fairebeaucoup de minutes internet à vendre ! »
Déjà certains jeunes du quartier viennent bavarder, boire un café ou surfer sur le Net. « Les gens viennent ici pour le Net plus que pour jouer. Ils écrivent des mails, vont sur les chats pour draguer », raconte Christophe. Le lieu anime le quartier et peut être un repère pour les jeunes mais qui risque de ne pas être très rentable. En « vendant ses minutes internet », Christophe espère bien gagner sa vie mais cela risque de ne pas suffire. Il pense diversifier ses activités, faire du dépannage et du service informatique. On sent aussi chez lui une âme d’animateur qui fourmille de projets : séances d’initiation à internet, aux jeux en réseaux, organisation de journées à thème… Mais le faible pouvoir d’achat des riverains risque d’être un obstacle au décollage de ce Cybercafé qui symbolise les contradictions du commerce en banlieue : absolument nécessaire au lien social et à la qualité de vie, fragile pour des questions d’environnement économique.
Vincent Goulet
Depuis la rédaction de cet article, le Cybercafé Red Haven a fermé et son initiateur se tourne vers d’autres activités.
Voir l’article « Avec le tramway, Lormont Carriet cherche un nouveau souffle »
Photographie : Alban Gilbert