L’actualité du roman noir – Zygmunt Miloszewsi : Un fond de vérité


Editions Miroboles

L'actualité du roman noir - Zygmunt Miloszewsi : Un fond de vérité

Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 04/03/2015 PAR Bernard Daguerre

Que faire alors pour tromper l’attente d’enquêtes criminelles qui ne viennent pas ? Collectionner  les conquêtes féminines ? Bel homme, divorcé, son ex-femme et sa fille étant restées à la capitale, Teodore noue en effet quelques affaires de coeur. Il aime aussi à exercer son esprit acéré, affûté presque, jusqu’à la misanthropie. À l’encontre de ceux qui n’ont pas sa vivacité d’esprit et sa capacité d’analyse, il est assez vite  méprisant.

Une série de meurtres vient troubler la quiète et sereine Sandomierz ; le caractère rituel des assassinats en majore l’horreur. En voici le résumé, lapidaire : « il (notre procureur) devait mener une enquête dans une ville épiscopale au passé antisémite à propos du meurtre d’une militante associative réputée ayant été égorgée rituellement comme une vache dans un abattoir juif ». La mise en scène du second cadavre renvoie explicitement  aux accusations catholiques moyenâgeuses de meurtres d’enfants pendant la préparation des fêtes de Pessah. Ainsi le récit s’imprègne-t-il d’une autre face du passé polonais, la force de l’antisémitisme. L’enquête de Szacki est passionnante de bout en bout : elle nous rappelle  avec vigueur les vestiges toujours présents de cette xénophobie ; à l’image de ce tableau (caché) mettant en scène ces accusations infâmes, accroché dans la basilique de la ville, et auquel Teodore a le plus grand mal à accéder, lors d’une scène d’une ironie cruelle, désolante dans l’affichage maladroit du sentiment religieux. Le passé de la ville est inextricablement lié à l’identité juive d’une partie importante de ses habitants avant que la Shoah ne vienne les anéantir. Ainsi les archives de la ville sont situées dans l’ancienne synagogue, reconvertie en bâtiment administratif.

Et la vox populi rappelle au procureur que « dans chaque légende, il y a un fond de vérité ». Pour finir cette composition picturale sans concession de la société polonaise, on trouve dans le coin droit du tableau l’action d’une ligue nationaliste, dont le patriotisme exacerbé se nourrirait facilement du poison de l’antisémitisme.

Les qualités professionnelles que Teodore peut déployer grâce à la spécificité du droit polonais, alliées aux qualités littéraires du livre – l’aisance brillante de la narration dont l’humour s‘active contre tous, y compris le héros – font de ce roman criminel une œuvre percutante contre le bas-fond virtuel des thèses complotistes, la vérité surgissant du marais fangeux de ces mensonges, même.

Zygmunt Miloszewsi : Un fond de vérité, traduit du polonais par Kamil Barbarski Miroboles éditions – 473 pages – novembre  2014 – 22€

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

On en parle !
À lire ! CULTURE > Nos derniers articles