Journée internationale des droits de la Femme: Le pouvoir a-t-il un sexe?


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Journée internationale des droits de la Femme: Le pouvoir a-t-il un sexe?

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 09/03/2013 PAR Solène MÉRIC

Alors que de nombreuses inégalités de fait entre hommes et femmes sont criantes (salaires, précarité des emplois, violences…) choisir de s’interroger sur l’accès des femmes au pouvoir pourrait a priori paraître secondaire, et c’est d’ailleurs, dans le discours, bien souvent le cas. La raison: «parler des autres luttes de l’égalité homme-femme est beaucoup plus consensuel et pas clivant politiquement » explique Réjane Sénac.
Le pouvoir, « la base de la pyramide des inégalités »A l’inverse, «parler du partage du pouvoir est beaucoup plus transgressif, politique et féministe» au regard de ce qu’elle appelle le «sexisme constituant». Celui-ci réside notamment dans  la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, dont les auteurs prenaient bel et bien le masculin au sens stricte du terme. La démocratie et la sphère publique ont ainsi été réservées aux hommes, tandis que les femmes ont été contenues dans la sphère privée. Ainsi «si les hommes peuvent s’ancrer sur un « ça (au sens psychanalytique du terme) républicain, les femmes sont considérées comme échappées de leur « espace naturel » quand elles sont en position de pouvoir». En d’autres termes pour Réjane Sénac, elles sont exclues du pouvoir car on leur en a nié la capacité. Donc «toucher au pouvoir, c’est bien toucher à la base même de la pyramide des inégalités.» La table ronde, par le choix de ce thème, ne s’est donc pas trompée de combat.

22 femmes ont gouverné la FranceUn combat, qui, on l’a compris par l’intervention d’Eliane Viennot, n’est pas celui de la conquête du pouvoir partagé entre hommes et femmes, mais bien plutôt celui d’une reconquête. Car l’idée a priori évidente selon laquelle le pouvoir, en France, a toujours été exclusivement masculin est fausse, soutient l’historienne. Quelques pages et chapitres manquent à nos manuels scolaires, sur la place des femmes au pouvoir et dans de nombreux domaines… Les femmes de pouvoir ou d’influences sont bien plus nombreuses que les quelques mères régentes que les manuels scolaires veulent bien concéder aux petites écolières. «Quand on regarde l’histoire longue, 22 femmes ont gouverné la France pendant plus de deux ans. Des femmes comme par exemple une certaine Edith Cresson, ne sont donc pas comptabilisées comme femmes de pouvoir. Et certaines y sont restées 20 ou 30 ans…». Admiration mêlée d’étonnement dans la salle.
«Jusqu’au début du 18ème siècle, il existe des lieux de pouvoir beaucoup plus mixtes qu’aujourd’hui, de nombreuses « seigneures » à la tête de fief, beaucoup de « donneuses d’ordre » dans la culture, la construction de châteaux, ou encore la pratique de la médecine». Un pouvoir confisqué au fil de la construction de l’Etat moderne dont le summum de la dégradation de la situation de la femme, loi salique comprise, se généralise dans tous les domaines entre le 14ème et le 16ème siècle. Bien que cette dégradation ne se soit pas faite sans grands débats, procès, et conflits réels, elle est portée par tout un ensemble de discours et de littératures gageant de l’acceptabilité, voire la nécessité, du monopole masculin du pouvoir face à la prétendue incapacité des femmes.  

La parité ou la stratégie des pénalités financièresAujourd’hui, tout de même, les femmes, ont repris un peu de terrain sur l’accès au pouvoir ; et les lois sur la parité n’y sont pas étrangères. Mariette Sineau note d’ailleurs une parité « à deux vitesses », plus accomplie, lorsque les scrutins se font à la proportionnelle de liste. Parlement européen, Conseils régionaux  ou conseils municipaux de villes de plus de 3500 habitants, respectent une quasi parité. A l’opposé le  partage du pouvoir patine un peu sur les élections au scrutin uninominaux à 2 tours. Pour preuve : si les 26% de femmes élues à l’Assemblée nationale sont un record dans l’histoire de la 5ème République, la parité, pour autant, n’est pas rendez-vous.
Pour Mariette Sineau, les coupables sont, en grande partie, les partis politiques qui ne jouent pas le jeu de la parité dans les candidatures: ce jeu là étant trop dangereux pour les élus déjà en place… En effet, selon elle, « les partis préfèrent faire le choix stratégique de payer des pénalités financières, plutôt que d’assurer une stricte égalité des sexes dans les candidatures. Autre stratégie, réserver aux femmes les circonscririons « perdues d’avance » ».  
Lors des dernières législatives, seul EELV a été strictement paritaire dans le nombre de candidats, le PS a présenté 47% de femmes, quand pour l’UMP, 26% des candidats étaient des candidates…  Quant aux exécutifs, si la parité est là aussi en progrès, leur présidence reste dans l’extrême majorité, l’apanage des hommes. Des réformes sont donc encore nécessaires, et certaines, de circonstance, ont d’ailleurs été annoncées ce 7 mars par François Hollande.

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