GrŒp à la conquête de l’Europe


Alix Fourcade

GrŒp à la conquête de l'Europe

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 23/12/2018 PAR Alix Fourcade

Âgés de 30 à 50 ans, les membres de GrŒp se sont rencontrés à l’annexe B, à Bordeaux, une ancienne école réhabilitée en ateliers d’artistes. Ils ont choisi ce nom qui signifie « groupe » en néerlandais, car l’un des leurs vient des Pays-Bas. À l’occasion du premier anniversaire de leur formation, ils ont lancé leur « projet BB’ ». Pourquoi ne pas quitter le quartier du Grand Parc pour aller créer de nouvelles oeuvres dans d’autres villes européennes ? Avec une particularité : le nom de toutes les destinations commence par la lettre « B », comme Bordeaux. Une belle manière d’aborder la problématique du déplacement dans l’Union européenne, par le biais de l’art.

Pour Bruxelles, les GrŒp travaillent autour du thème « Contre ma peau », la peau étant la toute première frontière, d’après Dalila Dalléas Bouzar, autre membre du groupe. « Frontières entre les langues, frontières entre les quartiers riches et les quartiers pauvres, le thème se décline à l’infini dans cette ville multifacette », assure cette artiste franco-algérienne. Les huit artistes exploreront également les notions d’engagement et de communauté sur place. La jeune femme dynamique alimente régulièrement le compte Facebook de GrOEp pour le faire connaître. Elle a créé une radio, « Radio GrOEp », où elle interviewe les artistes du collectif. « À Bruxelles, on enregistrera même des émissions en direct. »

Au fur et à mesure de leur visite dans la capitale belge, les Bordelais ont fait de nombreuses rencontres. « Nous avons discuté avec un groupe anticapitaliste de recherche pour une économie alternative, le GRESEA, mais aussi constaté avec surprise que les traces de la colonisation belge du Congo étaient encore très présentes dans la ville, tant au sein de l’Africa Museum, qui vient d’être rénové, que dans les rues avec les nombreuses sculptures rappelant cette époque », décrit Axel Ingé. Avant d’ajouter : « Nous avons vu tellement de choses, que nous rentrons finalement avec plus de questions que de réponses sur notre futur projet là-bas. » Une chose est sûre néanmoins, l’équipe veut organiser une résidence artistique à la Vallée, un lieu de création hybride situé dans une ancienne blanchisserie du quartier de Molenbeek.


Laurent Valera lutte contre le réchauffement climatique par le biais de ses installations. 

 « Nous allons partir à la rencontre des pays, mais aussi de nous-mêmes », analyse Laurent Valera. Le grand passionné d’écologie explore la thématique de l’eau. Pour dénoncer la fonte des glaces, il a réalisé une série de photographies sous l’océan, en y immergeant plusieurs drapeaux européens. Le globe-trotter, qui a exposé jusqu’en Tanzanie, travaille en ce moment sur une installation lourde de signification. Les pistolets cachés dans des livres, comme dans les films d’espionnage, sont remplacés par des robinets. Des armes tout aussi nocives pour l’homme puisqu’elles réduisent les ressources d’eau.


Dalila Dalléas Bouzar applique sa colle de peau de lapin sur la toile à droite.


Au bout d’un long couloir mauve, dans l’une des anciennes salles de classe de l’annexe B, Dalila Dalléas Bouzar partage son atelier avec Axel Ingé. Ce mardi 9 octobre après-midi, l’odeur de la colle de peau de lapin remplace celle de la craie des professeurs. L’artiste franco-algérienne, particulièrement sensible à la peinture classique, en utilise pour vernir sa toile inspirée de « La Cène » de Léonard de Vinci. Elle réincarne le Christ avec les traits de Bob Marley. 


Axel Ingé a exposé sa petite maison en bois à Berlin.


Dans ses mains, Axel Ingé tient une toute petite maison en bois, avec, sur une de ses faces, un morceau d’une immense carte, celle de l’Europe. « Nous ne nous rendons pas compte de la chance que nous avons de pouvoir circuler librement d’un pays à l’autre », assure le plasticien.

En résidence à Berlin l’année dernière, GrŒp s’était fixé un cahier des charges serré : faire tenir l’ensemble de leurs travaux dans une seule et même valise cabine de trente kilos. « Nous nous inscrivons dans la tradition des artistes de la Renaissance qui circulaient d’un pays à l’autre armés seulement d’un pinceau », ajoute Axel Ingé.


Béatrice Pontacq aime représenter des nuages,


Prêtés par la mairie, les locaux de l’annexe B ont un avenir incertain : leur location n’est assurée que jusqu’au mois de mai 2019. Béatrice Pontacq, qui se distingue par la représentation quasi systématique de nuages dans ses oeuvres, n’hésite pas à monter à l’étage pour aller emprunter un crayon à Emmanuel Aragon. Ce dernier frappe à la porte d’à côté, où Tommy Vissenberg le conseille pour réaliser des structures en terre cuite. Tous se retrouvent à midi pour déjeuner dans la cuisine, lieu qui a vu naître leur collectif. « C’est incroyable de voir tout ce que la dynamique de groupe nous a permis de faire en un an », constate Béatrice Pontacq. Les autres opinent du chef en buvant tranquillement leur café.

De la cuisine de l’annexe B au logement partagé pendant leur virée bruxelloise, GrŒp a réussi à faire une force d’une frontière difficile à franchir : celle des différents univers artistiques de ses membres. Une belle première étape pour ce groupe à la conquête de l’Europe.

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