Treize artistes autistes exposent leurs créations originales que ce soit des sculptures, tableaux en collage ou en perles, aquarelles, dessins, céramiques, marionnettes, textes, fauteuil Voltaire… La première exposition, à la BFM de Limoges en novembre, avait été plébiscitée par les visiteurs.
Jardin secret
Sonia, 43 ans avait déjà exposé quelques oeuvres. Elle présente trois toiles avec de jolies fleurs peintes voilà vingt ans, une vue du Canal du Midi, un phare et des danseuses en mouvement. Cette mère de famille diagnostiquée Asperger voilà deux ans, a toujours peint. « J’ai commencé à l’école primaire, j’aime bien les mélanges de couleurs, les paysages ou d’autres thèmes selon mes envies, précise-t-elle. J’ai de plus en plus envie de faire des choses qui sortent de mon imagination. »
Cette exposition est une façon de s’ouvrir aux autres, de montrer un peu de soi
Sonia a appris la peinture en autodidacte, prenant juste quelques cours pour savoir utiliser certains outils. Bénévole à Actions pour l’Autisme Asperger, elle a franchi le pas en dévoilant quelques toiles. Une démarche pas vraiment facile. « Cela m’a fait bizarre la première fois avoue-t-elle, j’ai dû me préparer mentalement, c‘est mon jardin secret. Cette exposition est une façon de s’ouvrir aux autres, de montrer un peu de soi. C’est aussi une reconnaissance, plus pour les autres que pour moi même en fait. Les gens me disent que c’est beau mais je suis gênée car je n’ai pas l’impression que mes toiles soient exceptionnelles.»
En préparant l’exposition, elle a rencontré les autres artistes qu’elle ne connaissait pas. Des moments privilégiés qui lui ont permis de se sentir en connexion avec des personnes sensibles et bienveillantes. « Le partage avec ces artistes est très intéressant et sans jugement confie-t-elle, nous avons tout de suite accroché, ça fait un bien fou ! On se connaît à peine mais on a ri et pleuré ensemble. »
Plus jeune, Sonia avait perçu sa différence. Ses proches la trouvaient parfois « un peu bizarre » et elle s’écartait lorsqu’il y avait des contacts trop rapprochés. Suite au diagnostic de son enfant, elle a également été diagnostiquée Asperger, ce qui lui a permis enfin de poser un mot sur sa différence. « J’ai longtemps bafouillé en disant le mot autisme mais après je me suis sentie plus légère. Etre sensible est très compliqué relate-t-elle, il faut vivre avec les comportements d’autres personnes qui sont très hard pour moi. »
Première expérience
Pour Coralie Bernard, 40 ans, cette exposition est une première expérience. Comme elle aime à le répéter « le dessin, c’est ma raison de vivre. » Coralie a commencé le dessin en grande section de maternelle et n’a jamais arrêté.
Pour l’exposition, elle a sélectionné quatre dessins « les meilleurs pour mettre de la joie et de la couleur dans un monde assez triste.» Des centaines de ses dessins sont rangés dans des albums. Des séries de « bonhommes » sortis de son imagination « avec des visages rouges, venus d’autres mondes. » Comme des extra-terrestres. Pour sortir de cette série, elle a « brisé la monotonie » avec des bonhommes différents. « J’aime bien inventer, voyager dans l’imaginaire » confie-t-elle.
A 30 ans ans passés, elle a voulu faire des BD et de la mise en scène, s’expatriant durant six ans à Angers. « J’ai montré mes dessins à des dessinateurs professionnels qui m’ont conseillé d’aller à La Boîte qui fait beuh pour prendre des cours de dessin raconte-t-elle, j’y suis restée 3 ou 4 ans, c’était laborieux au début. »
Exposer est une grande fierté, on me sort de l’ombre
De retour à Limoges elle a choisi d’adhérer à l’association Actions pour l’Autisme Asperger après avoir visité la 1ère exposition. « Exposer est une grande fierté, on me sort de l’ombre remarque-t-elle, c’est sympa d’être à côté d’autre artistes, cela me valorise plus. »
Coralie assure qu’elle a eu « le privilège » d’avoir été diagnostiquée autiste de haut niveau dès 8 ans par Charles Durham puis Asperger à 14 ans. Elle ne côtoie pas d’autres autistes, préférant « s’auto-intégrer en milieu ordinaire. » Ses mises en scène de BD lui prennent beaucoup de temps. L’auto-édition la tenterait bien car elle souhaite continuer à « écrire et dessiner ce qu’elle veut sans qu’un éditeur me dise de faire ça ou ça et de rendre mes planches à une date précise. Je sais que je ne peux pas relever à tel défi. »