Deux ans que ça dure. Après une période de forte croissance, la bio fait désormais face à des difficultés, résultant d’une « baisse de la consommation et d’un léger effet de surproduction », analyse Philippe Leymat président d’Interbio Nouvelle-Aquitaine. Si la vente directe se maintient voire se développe (+4,9 %), le recul de la consommation en grande surface et particulièrement dans les magasins spécialisés est sans appel. -4,6 % dans les premières, -8,6 % dans les seconds.
En cause « un changement des comportements alimentaires qui est général suite à la crise sanitaire » , pointe-t-il, et « des entreprises de grandes surfaces qui ne jouent pas le jeu » en diminuant assez drastiquement l’offre bio en magasin, ajoute Marie Griffaton, élue à la chambre régionale d’agriculture Nouvelle-Aquitaine.
Conséquence de deux ans de crise, la production bio perd de son élan en Nouvelle-Aquitaine, constate Sylvie Dulong, présidente de Bio Nouvelle-Aquitaine. En effet, si la région compte 844 nouveaux producteurs bio en 2022, ils étaient 1 278 à s’engager l’année précédente. Une décélération sur l’installation qui fait face en outre à une augmentation du nombre des arrêts d’engagement : « 596 arrêts d’engagement contre 457 en 2021. Si un tiers relève de départs à la retraite ou cession, un second tiers correspond à un arrêt de la certification bio », pointe la présidente, qui note aussi que les fermes qui arrêtent la certification « sont bien souvent des fermes mixtes. Lorsque l’on est totalement engagé en bio on ne se déconvertit pas facilement. Ça démontre aussi que l’appui et le support technique est important pour rester en bio ». Le troisième tiers des arrêts sont liés à des changements administratifs ou de structure.
Technique, diversification, communication et aides publiques
Le message des responsables de la filière bio est donc clair face à le crise. Il s’agit pour les producteurs de consolider leurs exploitations, d’être résilients. « L’agriculture bio c’est beaucoup plus de coûts et de risques que le conventionnel, il faut donc renforcer l’aspect technique mais aussi être accompagner financièrement pour passer ces caps difficiles », argumente Marie Griffaton. « Parmi les leviers de développement, il y a aussi la question de la diversification de ces productions afin de pouvoir multiplier les canaux de distribution. Mais il est certain que les pouvoirs publics ont un énorme rôle à jouer pour soutenir l’offre et la demande », acquiesce également Sylvie Dulong.
Des travaux sont aussi à mener (ou à poursuivre) autour des consommateurs, « ils ne sont pas assez informés de ce à quoi la bio peut contribuer en terme d’enjeux environnementaux et sur leur propre santé », estime Sylvie Dulong.
« On ne peut pas laisser la réponse de la crise aux seuls agriculeurs bio », synthétise Philippe Leymat, qui cite en exemple la commande publique. « Il doit y avoir une exemplarité en la matière, or trop de cuisines publiques sont en dessous des objectifs Egalim. Il y a pourtant des exemples qui nous montre que c’est possible, à coûts constants », à l’image du SIVU Bordeaux-Mérignac qui confectionne plus de 23 000 repas par jour, avec 46% de produits bio et des fruits et légumes de saison .
Mois de la Bio du 3 au 30 novembre 2023
Si la filière du bio veille à faire entendre sa voix pour reconquérir un certain nombre d’enveloppes nationales et européennes visant au maintien de l’agriculture biologique, les choses se jouent donc aussi dans les fermes, en optimisant les techniques et en diversifiant les productions.
Deux axes de travail qui sont particulièrement mis en avant lors de cette édition 2023 du Mois de la Bio. Au total, une cinquantaine de rendez-vous est prévue dans la région. Visites de fermes et d’entreprises, conférences ou formations mettront en lumière des techniques et innovations, des débouchés, des filières émergentes mais aussi des échanges autour des enjeux liés aux coûts de production et des résultats économiques.
Les étudiants en lycées agricoles ne sont pas oubliés de cette programmation, avec un grand nombre de journées qui leur sont dédiées afin d’informer au mieux ces futurs agriculteurs sur les opportunités de l’agriculture bio.