Bulle immobilière à la campagne, le début de la fin ?


Le foncier agricole bat des records, celui de l’artificialisation est un net recul et la bulle post Covid autour des maisons à la campagne se dégonfle. L'observation du foncier rural néo aquitain 2022 par la SAFER est pour le moins contrastée.

Infographie sur le marché des maisons à la campagne en net recul en 2022 en Nouvelle-AquitaineKeyop média - Leslie Caties

C'est une des observations significatives de la Safer Nouvelle-Aquitaine sur le marché rural, le nombre de ventes de maison à la campagne a fortement baissé en 2022 - source : SAFER NA

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 27/06/2023 PAR Solène MÉRIC

Après un marché foncier rural au plus haut en 2021, la Safer constate pour 2022, un marché rural toujours globalement élevé « même s’il baisse un peu » tant en nombre de ventes (-6%) qu’en valeur (-4% soit près de 7 Mds) pour une surface quasi stable de 147 015 ha. Un marché foncier très contrasté en fonction de ses segments.

Des records en plus et en moins

Le focus sur les terres agricoles (hors vignes) révèle « un marché qui se maintient à un niveau record, depuis 2 ans », pointe Hervé Olivier, directeur adjoint de la SAFER Nouvelle-Aquitaine. +3% de transactions pour +7% surfaces échangées ( soit 85 668 ha) et une valeur totale d’1,160 Mds, en hausse de 16% par rapport à 2021. Si le dynamisme est général, deux départements se démarquent : les Deux-Sèvres, et la Vienne, qui atteint les 10 000 ha échangés au cours de l’année. Un élan qui pourrait bien être « radicalement inverse pour 2023 » au regard des conditions climatiques et géopolitiques, prévient déjà le directeur adjoint.

Le bordelais aujourd’hui est entre 10 000 et 15 000 euros l’hectare. 

Niveau « record » aussi pour le foncier forestier, malgré une tendance à la baisse liée au manque de propriétés à la vente. Si la valeur du marché semble aussi diminuer, c’est qu’elle suit la qualité des massifs vendus cette année, précise Hervé Olivier.

Pour ce qui est du marché des vignes, l’année passée marque un « vrai temps d’arrêt » après deux ans d’augmentation continue. Fort recul en surface à -14% (soit 4 471 ha) et en valeur, avec une impressionnante baisse du prix des vignes enregistrée à – 38% (soit 272 M€). Si la crise girondine explique ce recul, avec aujourd’hui un Bordeaux « entre 10 000 et 15 000 €/ha, et plutôt 10 que 15 », commente Hervé Olivier, cette baisse concerne aussi le vignoble du Cognac. Mais pas pour la même raison :  « les transactions s’y font de plus en plus sous forme de parts de société ».

Maisons à la campagne : les acheteurs parisiens en recul

Parmi les observations fortes de l’année, 2022 semble signer le début de la fin de la bulle immobilière qui entourait le marché des maisons à la campagne post Covid. Après une année record en 2021, ce marché, qui représente 9 % des ventes en surface (12 000 ha) et 62% des valeurs de l’ensemble du marché foncier rural avec 4,350 Mds €, est « en net recul », et ce sur tous les départements. Côté chiffres : -15% de ventes (soit 20 707 transactions), -20% de surfaces échangées, et une baisse de 8% des valeurs. Outre un effet post Covid qui s’essouffle, « cette tendance s’explique probablement aussi fin 2022 par les difficultés d’obtention de prêts auprès des banques pour acquérir ces maisons-là », pointe Hervé Olivier.

Pour autant, le nombre de transactions restent quand même important dans les départements côtiers (Landes et Gironde notamment) ainsi qu’en Dordogne. Mais c’est là aussi que la baisse de la valeur est plus la forte notamment sur le littoral, « parce que la hausse avaient été très fortes les années précédentes, donc là on retourne à des valeurs un peu plus proches de ce qui existait avant ».

Du côté des acheteurs aussi, la différence des profils est notable, particulièrement du côté des acheteurs originaires d’île de France dont le nombre baisse de 43 %, au profit, relatif, des étrangers. Ils sont 12% de plus à acheter que l’an dernier. Au total, « on revient sur des tendances proches de 2020 », observe Hervé Olivier, les néo-aquitains étant eux même moins actifs sur ce marché (-18%).

Les tentatives de limitation des surfaces urbanisables et de 0 artificialisation nette, portent manifestement leurs fruits

L’année 2022 signe aussi une chute marquée des marchés destinés à l’urbanisation, après une hausse observée en 2021 « due à un rattrapage post Covid », analyse Edouard Bordelais responsable du service Environnement et Collectivités pour la SAFER Nouvelle-Aquitaine. « Les politiques territoriales, sur les tentatives de limitation des surfaces urbanisables et de 0 artificialisation nette, portent manifestement leurs fruits » pointe-t-il. Le nombre de ventes en 2022 diminue de 50% pour 2 129 ha appelés à sortir du marché agricole soit – 45% par rapport à 2021. Les plus fortes baisses sont en Gironde (-49%) en Charente-Maritime (-45%) et en Dordogne (-30%).

La mise en œuvre de la Loi Sempastous

Autre point mis en avant, l’accélération des cessions de parts sociales à partir du mois de septembre 2022. En effet, la SAFER Nouvelle-Aquitaine constate +22 % de transactions sociétaires en 2022, en anticipation de la mise en œuvre de la Loi Sempastous qui permet à la Safer,  depuis 2023, de désormais réguler ce marché sur lequel elle ne pouvait jusque là que très exceptionnellement intervenir. En effet, dés lors que par la cession de parts sociales, une société dépasse les 120 ha de SAU, une demande d’autorisation administrative préalable est obligatoire. Délivrée par le préfet, c’est la Safer qui instruit le dossier. Rappelant que la plupart des transactions sociétaires concernent des transmissions intra-familiales, Philippe Tuzelet, Directeur général de la SAFER NA rappelle que le but de cette procédure n’est pas d’empêcher ces cessions mais plutôt de lutter contre l’accaparement des terres. Sur les 145 dossiers reçus depuis le 1er janvier, une douzaine est soumise à déclaration. « Deux ou trois pourraient se voir refuser l’autorisation », si le préfet suit les recommandation de la SAFER.

Le président de la SAFER Nouvelle-Aquitaine, Patrice Coutin, souhaite faire valoir ses droits à la retraite, et cède à l’issue de l’assemblée générale son siège à Fabien Joffre, agriculteur en Dordogne.

Patrice Coutin et Fabien Joffre, ancien et nouveau président de la SAFER Nouvelle-Aquitaine depuis le 22 juin 2023SAFER NA

Patrice Coutin et Fabien Joffre, ancien et nouveau président de la SAFER Nouvelle-Aquitaine depuis le 22 juin 2023

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