Ambiance très tendue lors du débat sur les discriminations organisé par les Escales du Livre de Bordeaux.


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Ambiance très tendue lors du débat sur les discriminations organisé par les Escales du Livre de Bordeaux.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 05/04/2013 PAR Laura Jarry

« Il ne faut plus être dans le constat des discriminations mais les combattre »Dès l’entrée en salle, tardive pour cause de problèmes techniques, il était clair que le public comptait s’immiscer dans le débat, refusant d’attendre l’arrivée de Vincent Feltesse, président de la Communauté urbaine de Bordeaux et député de Gironde. Pour autant, il fut plutôt sage durant la première partie du débat, laissant le sociologue Eric Macé, co-auteur avec les autres universitaires présents du livre « Pourquoi moi ? L’expérience des discriminations » (Seuil), différencier la stigmatisation et la discrimination : l’une sociale, et l’autre pénalement condamnable.
Jeannette Bougrab, ancienne secrétaire d’Etat à la Jeunesse et à la Vie associative du gouvernement de François Fillon, a ensuite pris la parole pour discuter de son propre combat pour la laïcité, où elle ne souhaite « pas se poser en victime mais en militante ». De même, elle estime « avoir été lestée sur la ligne de départ » et reste consciente que sa réussite est une exception. « Il ne faut plus être dans le constat des discriminations mais les combattre », explique-t-elle, tout en reconnaissant que, « à 65 ans, on me demandera toujours de faire mes preuves ».

Stratégies contre la discrimination.Une idée partagée par les sociologues François Dubet et Sandrine Rui qui tirent de l’exemple personnel de Jeannette Bougrab, les analyses qu’ils ont développé dans leur livre. Il explique ainsi que beaucoup de personnes stigmatisables se disent « à tout moment, ce que je croyais être réglé, peut revenir ». Sandrine Rui ajoute à la stratégie d’évitement des discriminations de l’ancienne présidente de la HALDE, celles de surconformité de certains, de lutte par la réplique, l’humour et l’explication.
Des stratégies qui existent déjà depuis longtemps, selon Vincent Feltesse : « pour éviter la confrontation au groupe », « de façon très intime avec différents degrés de violence ». Pour le député socialiste, il faut que le politique se demande « que faire pour que les gens se sentent moins discriminés », « quel horizon commun proposer ». Celui qui dit avoir fait HEC avec des chaussures DocMartens remarque alors que : « moi, je n’ai pas reçu l’ordre national du mérite par Sarkozy » (décoration reçue par Jeannette Bougrab des mains de l’ancien président).

Un débat qui devient politique.Le débat s’échauffe dès lors un peu entre Vincent Feltesse et Jeannette Bougrab, qui choisit d’orienter celui-ci vers la question de la crèche de Baby-Loup et son effarement d’être, avec Elisabeth Badinter, « traités de fous furieux dans les médias », pour avoir critiqué le jugement de la Cour de Cassation annulant le licenciement d’une employée de crèche qui avait refusé d’enlever son voile. Et Jeannette Bougrab d’appuyer ses propos par l’appui qu’elle a reçue de Manuel Valls. « Que vous détestez peut-être ? », ajoute-t-elle à l’intention du président de la CUB ; « Pas du tout, c’est un très bon ami », réplique celui-ci. Après que l’ancienne secrétaire d’Etat eut fait un détour sur une vidéo mise en ligne sur Le Monde montrant l’excision de jeunes filles en Indonésie avant de revenir sur la question de la laïcité, Vincent Feltesse s’énerve légèrement : « Lors des commémorations, quand j’étais maire, je m’arrêtais à la porte de l’Eglise, donc la leçon sur la laïcité, ça va ».
Jeannette Bougrab réplique qu’elle n’est pas là pour faire un débat UMP-PS, mais les sociologues reviennent également sur ses déclarations : pour François Dubet, « ce n’est pas en emménageant près du lycée Henri IV qu’on fera évoluer les choses » (stratégie d’évitement que venait d’avouer l’ancienne secrétaire d’Etat) mais « l’enjeu maintenant est de reconstruire l’égalité et de refabriquer une image de la France qui n’est pas blanche et catholique » ; de même, pour Eric Macé, « on trouvera toujours des exemples en Indonésie, que personne ne conteste »; pour autant, « on a aujourd’hui en France, une lecture de la laïcité où la République ne garantit pas l’expression des convictions religieuses ».

La réflexion de trop.Suite à ces interventions assez tendues, le public se sera sûrement senti autorisé à s’exprimer, coupant plusieurs fois la parole aux intervenants, et essentiellement à Jeannette Bougrab, qui fait mine une première fois de partir. Suppliée par le public de rester, « ce serait leur donner raison », elle reste. Le débat se calme un temps, Vincent Feltesse déclarant que « sur la question de la charia, je suis entièrement d’accord avec vous », mais le public est devenu dissipé.
Mélangeant le cumul des mandats, les élections socialistes et les dernières affaires judiciaires des politiques français, les spectateurs râlent à haute voix et ne respectent plus les prises de parole de chacun. Jeannette Bougrab, tentant de détendre l’atmosphère en commançant une de ses phrases par « Sur Baby-Loup, le président, qui n’est pas d’UMP je crois, celui qui a été élu en 2012… », se fait couper directement la parole : « Cela suffit, l’ironie ! ». Dernier acte irrespectueux qu’elle ne tolère pas : « Il ne m’a pas fallu attendre 40 ans pour me faire insulter dans un débat ! », dit-elle à l’attention du public avant de partir. Pierre Mazet essaya bien de reprendre la conversation, mais une seule prise de parole suffit à tout le monde pour savoir qu’il était temps de clore cette rencontre houleuse.

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