Accord assurance chômage et intermittents: l’envers du décor en Aquitaine


Lucy Moreau

Accord assurance chômage et intermittents: l’envers du décor en Aquitaine

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 25/06/2014 PAR Lucy Moreau

À l’origine de ces mécontentements il y a tout d’abord la hausse des cotisations de 10,8% à 12,8%, qui représente une hausse de 2 points répartis paritairement sur les cotisations patronales et salariales. Egalement en pourparlers, le plafonnement du cumul des allocations chômage et des revenus d’activité à 4 381 euros bruts par mois et pour finir, l’augmentation de la durée du « différé d’indemnisation », c’est-à-dire du nombre de jours entre l’inscription au chômage et le début du versement des allocations, plafonnée à 75 jours maximum.

2003/2014 : même combat ?À l’orée de la saison des festivals et autres événements culturels de tailles, un petit souvenir de l’année 2003 chatouille les méninges.  En effet, il y a onze ans jour pour jour, un accord était également signé avec les trois syndicats et le MEDEF, et modifiait comme aujourd’hui les annexes 8 et 10, qui durcissaient les conditions d’éligibilité à l’intermittence. De 507 heures de travail en douze mois,  les intermittents devaient alors justifier 507 heures en dix mois et demi pour les artistes et dix mois pour les techniciens. Suite à ce durcissement, des grèves très suivies entraînèrent l’annulation de grands festivals d’été  tel que le renommé festival d’Avignon ou les Francofolies de La Rochelle. Steven Riollet , membre de la coordination des intermittents et précaires indique néanmoins qu’aujourd’hui ce n’est pas le même combat : « en 2003, c’était la culture qui était en danger, aujourd’hui ce sont les droits sociaux qui sont mis en péril… »

Zoom sur la mobilisation en AquitaineEn Dordogne, dans le Pays basque ou en Gironde, c’est la même ritournelle : « On dit non à l’agrément de l’assurance chômage que les syndicats signataires ont proposé. Ils précarisent tout le monde, car nous sommes précaires avant tout » scande haut et fort Steven Riollet lors d’une manifestation devant l’hôtel de ville de Bordeaux. « Même s’il est difficile pour eux de se regrouper, car leur métier fait qu’ils circulent beaucoup, les intermittents sont déterminés. Leur mouvement devrait d’ailleurs inspirer bon nombre de salariés qui sont tout autant concernés par cet accord » affirme Philippe Mediavilla, secrétaire régional CGT Gironde.

Au cœur du sujet, plusieurs directeurs et directrices de théâtres  et de festival d’Aquitaine (TNBA, Opéra national de Bordeaux, Garorock, Reggae Sun Ska…) ont annoncé « soutenir la mobilisation des artistes et techniciens du spectacle vivant » dans une lettre ouverte.

D’un point de vu diamétralement opposé, Bernard Benquet, secrétaire départemental de la CFDT Gironde, considère que « cet accord doit être signé car c’est une mesure de justice sociale » tout en disant que « la culture doit être financée par le gouvernement. »

Du côté des élus, « Alain Rousset a écrit la semaine dernière à la CGT et aux intermittents pour apporter son soutien, et un communiqué a été envoyé à Matignon et au ministère du travail » certifie Frédéric Vilcocq, conseiller culture de la région Aquitaine. L’IDAAC, l’agence culturelle de la Gironde, a, quant à elle adressé, le 19 juin dernier, une motion de soutien au mouvement des intermittents dans laquelle elle affirme que « l’accord du 22 mars ne peut être adopté en l’état et ne doit pas recevoir l’agrément du gouvernement » tout en observant un « durcissement de la contestation » qui  « impacte fortement les territoires. »

Les conséquences que cela pourrait engendrer sur le territoire« Avant l’opinion publique pensait que la culture coûtait, mais ne rapportait rien, aujourd’hui, on a la démonstration que la culture rapporte, d’autant plus que la filière chimique ou aéronautique par exemple… » Avec ces mots, Frédéric Vilcocq introduit cette valeur que génère la culture. Mais si la culture peut être génératrice de valeur, elle peut en être tout autant dévastatrice. Selon le conseiller culture d’Aquitaine, lorsqu’un festivalier dépense un euro, c’est cinq à six euros qui sont générés sur le territoire…  Ce qui fait que« les festivals susceptibles d’être touchés comme le Fest’Arts de Libourne ou Mimos à Périgueux… représentent  à eux seuls, une manne de 15 000 à 20 000 euros. »

Ludovic Larbodie, directeur du festival Garorock de Marmande qui aura lieu ce week-end, ne veut surtout pas qu’on lui parle du risque de l’annulation qui est « impensable » selon lui. «L’organisation de Garorock se fait sur toute une année, c’est un contact permanent avec les contributeurs du festival, je ne pense pas que cette énergie soit vouée à s’éteindre… » Cependant extrêmement solidaire avec les intermittents, Ludovic Larbodie tient à ce qu’il y ait un temps de parole accordé aux revendications. Comme le stipule Fréderic Vilcocq, « si un festival comme Garorock est annulé, c’est entre 600 000 et 700 000 euros qui sont perdus, rien que pour le budget des artistes… » Un drame financier donc,  qui amputerait toute une micro-économie locale.

Les prochaines échéances pour cet accord?Une concertation a officiellement débuté mardi dernier à Matignon. Le trio Hortense Archambault, Jean-Denis Combrexelle et Jean-Patrick Gille a été missionné pour désamorcer cette véritable bombe qui peut exploser à tout moment, comme le confirme Steven Riollet en disant «  on n’ a plus rien à perdre, on est donc prêt à aller très loin… » Les trois démineurs ont quinze jours pour plancher sur la méthode de concertation la plus adéquate.

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