Agriculture bio: prévenir la pollution des eaux plutôt que la guérir?


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 29/10/2014 PAR Solène MÉRIC

L’agriculture biologique, du fait de son non recours aux insecticides et pesticides et d’un recours aux fertilisations en azote modérées, est selon les organisateurs de cette journée, l’outil idéal pour lutter contre la dégradation de la qualité des eaux. Elle est du même coup un argument d’économie au regard du prix de la dépollution des excédents de l’agriculture et de l’élevage dissous dans les eaux de surfaces et côtières. «Un coût estimé à 54 Milliards d’euros», annonce Sylvie Dulong, Présidente d’Agrobio Gironde s’appuyant sur les chiffres du Commissariat général au développement durable.
A cela, elle ajoute que «près de 400 captages sont abandonnés chaque année, en lien avec les pollutions agricoles». Face à ces chiffres, le développement de l’agriculture biologique à proximité des zones de captage se positionne ainsi comme «un outils efficace de prévention contre la pollution de l’eau», assure Sylvie Dulong.

Des molécules interdites depuis plusieurs annéesPour appuyer cette thèse du «bienfait» de l’AB sur la qualité des eaux, la table ronde a donné la parole à Françoise Vernier, ingénieur-chercheur à l’IRSTEA spécialisée sur l’impact des évolutions de l’agriculture au plan environnemental et économique. Elle a ainsi livré les constats établis à partir de la modélisation de différents scénarios agricoles envisagées sur le Bassin du Né, (Poitou-Charente) et plus particulièrement leurs impacts en terme de teneur en herbicides et insecticides sur l’eau d’une station de pompage située à proximité du périmètre agricole étudié.
Sur les différents scénarios analysés, c’est le scénario mixte, introduisant à la fois 20% d’agriculture bio et des pratiques agroenvironnementales sur les 80% de culture restant qui s’avérerait le plus efficace (une hypothèse 100% bio n’a pas été envisagée dans cette étude). «L’introduction de 20% de bio sur des cultures de vignes, diminue de 44% la pression herbicide et insecticide dans l’eau. Un résultat pouvant être atteint en 6 ans seulement», constate la scientifique.
Pour autant précise-t-elle, «pour la partie pesticides, les nappes sont aujourd’hui encore contaminée par des molécules interdites depuis plusieurs années, il y a donc une inertie du milieu». En d’autres termes prévient-elle, «même si on arrêtait tout il resterait encore des problèmes de pollution par ces molécules pour de nombreuses années, surtout concernant les eaux sous-terraines». Autrement dit les pollutions constatées aujourd’hui, sont en partie les témoins d’une agriculture d’hier…

Des solutions « durables, massives et économiquement viables »Concernant la présence de nitrate et d’azote dans les eaux, Sylvain Roumeux, chargé de mission à la FNAB fait l’écho d’études menées notamment par Josette Garnier, Directrice de recherche au CNRS. Selon celle-ci, si la généralisation des mesures agro-environnementales permettrait de stabiliser la situation, en enrayant l’accroissement de la pollution azotée et ses effets, l’amélioration de la qualité de l’eau ne reste que relative. En revanche, une généralisation d’une agriculture 100% bio sur les zones de captage permettrait une diminution nette de la contamination azotée des eaux. Une «reconquête de la qualité de la ressource» tel qu’elle était il y a 30 ans serait envisageable d’ici à 20 ans. «Pour autant, avertie Françoise Dulong, cette reconquête de la qualité de l’eau ne doit pas se contenter de soupoudrage, les solutions envisagées doivent être durables, massives et économiquement viables pour les agriculteurs.»
Car en effet, sans viabilité économique assurée, la conversion bio reste logiquement difficile à mettre en œuvre chez les agriculteurs. Dans le même sens Guillaume Riou agriculteur converti à l’AB, témoigne qu’outre les enjeux liés à sa santé et à une mise en adéquation avec son éthique personnelle du métier d’agriculteur, «il fallait que ma conversion soit économiquement performante», ce qui pour lui a été le cas, du fait de la présence «essentielle» d’acteurs économiques sur le territoire, et du soutien de politiques publiques territoriales, souligne-t-il.

12 territoires pilotesDes acteurs du territoire à convaincre pour les représentants de l’agriculture biologique. Pour y parvenir la FNAB a mis en place depuis 2007, en lien avec les Agences de l’eau et des collectivités, des expérimentations pilotes sur 12 territoires visant à l’identification et à la promotion de leviers d’actions pour inciter au développement de l’AB sur des airesde captage. Parmis eux, documents de planification, politique foncière, ou encore soutien à la struturation et de la consommation locale (via les cantines par exemple).
Un de ces sites pilotes se situe en Aquitaine, sur l’aire d’alimentation de captage du puits de la Prade de Gardonne, pour lequel un programme d’action est en cours de discussion. Objectif ici: réduire les pollutions diffuses de l’eau par les pesticides. Un projet mené en coordination entre acteurs du monde agricole dont Agrobio Périgord et la Chambre d’agriculture, collectivités de la zone concernée, et enfin des organismes publics dont le Syndicat Mixte Départemental de l’Eau, l’Agence de l’eau Adour-Garonne ou encore les services de l’Etat.

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