Viva Riva de Djo Tunda Wa Munga: du Congo où règne le chaos


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Viva Riva de Djo Tunda Wa Munga: du Congo où règne le chaos

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 18/04/2012 PAR Pascale Rousseau-Dewambrechies

Riva est un jeune mafieux à gueule d’ange, (Patsha Bay, musicien arrivé par un hasard qui a très bien fait les choses sur le tournage) rentre d’Angola à Kinshasa après dix ans d’absence. Il ne revient pas  les mains vides mais avec un chargement d’essence, dont on comprend bien qu’il ne l’a pas acquis tout à fait légalement, pas plus que les liasses de billets qu’il distribue généreusement. Il retrouve son ami JM, marié, père de deux enfants… Il est poursuivi par son « ex patron » qui accompagné de deux gâchettes, sème la terreur sur son passage. Inconscient et sûr de lui, Riva et son vieux copain fêtent leurs retrouvailles. A eux la nuit de Kinshasa, la danse, l’alcool, les filles. Ils vont au bordel de la Mère Ado… Sexe, drogues, violence, sorcellerie. b[Viva Riva]b est sensuel, sexuel, moite, musical, tendre, alcooleux, coloré… Dans sa déambulation nocturne, Riva croise la belle Nora (magnifique Manie Malone qui dit s’être inspirée pour son personnage de Jeanne Moreau dans Eva et Sharon Stone dans Casino, actrice franco-ivoirienne, dont nous serions bien inspirés de suivre le parcours), maitresse du caïd local. Coup de coeur, coup de foudre. L’amour tel une fleur sur un champ de ruines, peut éclore. Comme peut éclore la belle relation entre Riva et Anto (Jordan N’Tunga), jeune shégué* débrouillard, malin, intelligent, serviable qui trouve en Riva le grand frère ou le père, que l’un et l’autre ont perdus.

Toutes les forces du film de Djo Munga sont là, en réalisant presque un docu fiction, tant nous ne pouvons douter du réalisme de son regard, en restant toujours au plus prés de cette réalité dont la dureté nous colle à notre fauteuil, le réalisateur glisse dans son propos, la tendresse, la douceur d’une belle histoire d’amour, d’une belle fraternité et l’humour avec par exemple, le personnage du truand angolais, sa gueule d’intellectuel, son costume blanc et sa démarche digne de la panthère rose… Jusqu’au moment où derrière cet humour et cette apparente nonchalance, surgit la violence. Par petites touches sans surligner ses effets, Djo Munga nous apprend quelque chose de l’histoire de Riva, de celle de Nora. Le thriller avance et l’histoire humaine aussi, comme une respiration nécessaire. Mieux, un espoir.

Djo Munga n’est pas un artiste timoré, loin de là. Il dit « je ne travaille pas pour l’Office de tourisme » et ça se voit. Son regard clinique sur Kinshasa est celui, tout sauf complaisant d’un artiste engagé. Le propos de Djo Munga est-il politique ? Probablement. Dans le sens où le cinéaste n’hésite pas à pointer le profond racisme inter africain, montre la ville dans toute sa décrépitude physique et morale et une société où les hommes qui semblent avoir perdu leur autorité quand ils n’ont pas perdu leur virilité (Azor) s’en prennent à plus faible qu’eux, c’est à dire les femmes. Femmes qui néanmoins, comme le dit très bien la jeune et belle b[Manie Malone]b sont « en érection », c’est à dire droites, vibrantes, érigées vers un futur qu’elles bâtissent vaille que vaille pour leurs enfants.

Le Congo, dans Viva Riva est symbolisé par sa ville qui vibre, vrombit, hurle et lutte contre ses démons. Si le cinéma congolais n’a pas d’existence profondément ancrée, pas de tradition comme dans d’autres pays d’Afrique, il a trouvé son porte parole, dont on pourrait bien dire dans quelques années qu’il a trouvé son maitre en la personne de Djo Munga qui lui donne vie avec ce premier film très maitrisé. Pour un premier essai c’est une sacrée leçon. Un coup de maitre !

* (enfant des rues à Kinshasa)

Sortie le : 18 Avril 2012
Réalisation & Scénario]b : Djo Tunda Wa Munga
Acteurs : Patscha Bay, Manie Malone, Hoji Fortuna, marlène Longange, Alex Herabo, Diplôme Amekindra, Angélique Mbumba, nzita Tumba, Jordan N’Tunga
Genre: Thriller
Durée : 1h38

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