« Les MAM, une véritable innovation ! » Martine Jardiné


© Département Gironde / Laëtita Solery / Aurélien Marquot
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 28/01/2019 PAR Sybille Rousseau

Depuis toujours, cette thématique lui trotte dans la tête. La qualité de l’accueil du petit enfant est une des préoccupations majeures de Martine Jardiné, vice-présidente du Conseil départemental en charge notamment du Développement Social. Du reste, en 1989, alors qu’elle enseigne à l’université elle décide de créer le réseau girondin petite enfance. Cet organisme développe des actions de réflexion – formation, de recherche, un pôle ressources, des projets européens, et une action d’éveil culturel en direction des jeunes enfants et des familles qui regroupent plus de 250 communes du département ainsi que plusieurs institutions telles que la Caisse d’Allocations Familiales de la Gironde, le Conseil départemental de la Gironde, le Fonds d’Action et de Soutien pour l’Intégration et la Lutte contre les Exclusions ou encore la Direction Régionale de l’Action Culturelle. « L’innovation peut répondre aux besoins » Martine Jardiné s’interroge donc depuis des dizaines d’années sur les structures d’accueil des jeunes enfants.

Martine Jardiné

En 2003, le sénateur de Mayenne Jean Arthuis lance l’idée des Maisons d’assistantes maternelles. Martine Jardiné voit alors dans ce nouveau dispositif une véritable innovation. « Des assistantes maternelles regroupées, travaillant ensemble, sans la présence d’un professionnel de la petite enfance, avec des horaires flexibles et une organisation souple, c’était véritablement innovant ! » Mais tous les professionnels du secteur, tels que les médecins et les puéricultrices de PMI ne voient pas d’un très bon œil ce nouveau dispositif. « Toutefois, le sénateur Arthuis tient bon ! » Mais ce n’est qu’en 2008, avec le rapport Tabaro, puis en 2010, avec la loi sur la petite enfance que le projet de MAM voit le jour. Ces MAM sont véritablement « innovantes » pour Martine Jardiné car répondent aux besoins des parents surtout en matière d’horaire. « La souplesse ne signifie pas forcément le non-respect des normes. Et à l’inverse, le fait de respecter les normes ne veut pas forcément dire une bonne qualité d’accueil pour les enfants », souligne l’élue. Crèche et MAM même combat Mais attention, si Martine Jardiné plébiscite le développement des MAM, elle ne souhaite absolument pas opposer la crèche à la Maison d’assistantes maternelles. Certes, elle regrette vivement la rigidité du fonctionnement de ces structures d’accueil, et désire véritablement une flexibilité que proposent ces MAM. « Deux assistantes maternelles qui décident de travailler ensemble dans une MAM peuvent accueillir jusqu’à huit enfants à deux. Les parents des enfants sont leurs employeurs. Et, par exemple, à 6 h 00 du matin, l’une des deux peut recevoir un enfant qui n’est pas sous contrat avec elle mais avec l’autre assistante maternelle. C’est une véritable innovation et une vraie flexibilité ! » En revanche, en crèche, deux personnes, minimum, doivent accueillir un enfant à 7 h 00 du matin – alors qu’en MAM l’assistante maternelle peut être seule – et si un seul enfant est accueilli à cette heure précise, moins de présentiel sera déclaré à la CAF, et donc moins d’aide financière. « D’où les horaires verrouillés dans les crèches ! » Certaines MAM font un travail « remarquable » avec les enfants. « Prenez Badaboum qui est située sur la Rive Droite. C’est une petite structure qui propose de multiples animations et tente de répondre au mieux aux exigences des parents grâce à un poids administratif quasi inexistant ». Un autre regard sur les « Assmat » Autre point bénéfique des MAM pour Martine Jardiné : le changement de regard de certains parents. « Certains parents ne veulent pas faire garder leur enfant par une assistante maternelle pour différentes raisons qui leur appartiennent et que je respecte. En revanche, si ces mêmes assistantes maternelles se regroupent, sortent de chez elles et forment une structure collective, là, la donne change. Pour illustrer mon propos, je vous compterai cet exemple édifiant. Une famille résidait dans une tour à un étage supérieur d’une assistante maternelle. Ces derniers ne souhaitaient pas lui confier leur nouveau-né. Mais, quand cette même assistante maternelle s’est exilée dans une MAM, là, ils ont décidé de le lui faire garder. » C’est pareil, dans certaines zones rurales où les systèmes de garde manquent cruellement. « Dans une commune girondine, des assistantes maternelles étaient au chômage. Elles ont alors décidé de se regrouper en MAM. En quelques jours, la Maison était pleine. Ces MAM sont une véritable solution pour les maires. Le coût est bien moindre par rapport à une crèche, et, en un rien de temps, ils disposent de huit places ou plus. Chaque petite commune en zone rurale pourrait très bien en posséder ! » Les MAM, cet eldorado ? Mais ne vous y trompez pas. Si certaines assistantes maternelles s’épanouissent pleinement dans ce nouveau lieu de travail, d’autres, au contraire, déchantent. « L’horizontalité dans ces structures est, il est vrai, un problème. Toutes sont sur le même pied d’égalité hiérarchiquement parlant. Et cela peut provoquer des malentendus voire des tensions. Le Département doit davantage être en soutien à ces structures pour les aider à se maintenir, à fonctionner durablement. Certes ces assistantes maternelles n’ont que 120 h pour se former au métier, mais, nous, Département, nous nous devons de les accompagner dans la rédaction de leur projet de MAM afin qu’il voit le jour sans heurts. » Pour ce faire, le Département met en place des formations pour les Assmats via la PMI. « Mais, malheureusement, trop souvent l’image des professionnels de la PMI n’est pas très positive. Ils sont vus comme des inspecteurs. Or, ils sont présents pour les accompagner. A l’avenir, ces professionnels les formeront, viendront chez elles et les écouteront, ce qui les familiarisera. »

Au sein d'une crèche - © Département Gironde / Aurélien Marquot

S’interroger sur les structures d’accueil« Aujourd’hui, nous avons trop tendance, en France, à rigidifier, à légiférer », rappelle Martine Jardiné. Et de poursuivre, « les normes n’assurent pas la qualité de l’accueil. Ce n’est pas parce que vous aurez deux personnes pour accueillir un enfant que la qualité d’accueil sera au rendez-vous. La qualité d’accueil doit être dans le relationnel ! Aussi, une petite structure accueillant une vingtaine d’enfants n’a pas besoin de la même cuisine qu’une entité de 60 enfants. Bien sûr qu’il faut respecter l’hygiène, mais ne soyons pas trop rigide ! » Cette nouvelle structure est bénéfique également pour Martine Jardiné car elle interroge l’organisation des structures d’accueil. Les élus doivent percevoir les besoins de leurs administrés « à l’image du sénateur Arthuis qui, en 2003, a écouté les besoins de ses habitants en proposant la création des MAM ». Pour la vice-présidente du Département, le privé a également toute sa place dans l’accueil de l’enfant, « mais n’oublions pas la principale préoccupation, celle de la qualité de l’accueil. Aujourd’hui, nous devons nous poser les bonnes questions, pourquoi cela fonctionne dans un endroit et pourquoi pas dans un autre. Arrêtons de nous cacher derrière les normes ! » « Rendre possible l’impossible ! » Aujourd’hui, Martine Jardiné bûche sur un projet « innovant » avec Brigitte Collet, adjointe au maire de Bordeaux chargée de la petite enfance et des familles. « Nous travaillons ensemble sur un projet d’accueil qui jumèlerait une MAM et un service d’accueil familial ». Toutes deux tentent de convaincre la Direction générale de la cohésion sociale afin de mettre en place une expérimentation à Bordeaux. « Notre ambition première est de répondre aux besoins des parents, permettre une qualité d’accueil optimale, assurer un lieu de travail répondant aux normes de sécurité et d’hygiène mais aussi privilégier un lieu d’accueil où l’enfant s’éveillera et se retrouvera davantage sur des temps collectifs. » Bref « rendre possible l’impossible » tel est le leitmotiv qui anime depuis tant d’années cette élue de terrain.
Enfin, pour développer davantage la réflexion autour de ce sujet, un colloque sur la qualité d’accueil se tiendra les 1er et 2 avril prochains au Rocher de Palmer à Cenon.
Les Maisons d’assistantes maternelles des lieux uniques à identités multiples, Edition Le Bord de l’eau, Martine Jardiné, octobre 2018.

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
On en parle ! Gironde
À lire ! SOCIÉTÉ > Nos derniers articles