Un caractère délocalisé et public exceptionnel. Le Conseil Constitutionnel ne se prête à cet exercice de transparence que depuis 2019. Dans le cadre d’une audience publique organisée à la Cour d’appel de Bordeaux, l’institution s’est interrogée concernant la question prioritaire de constitutionnalité n°2023-1036. C’est dans le contexte de l’affaire du Mediator que les neuf membres du Conseil constitutionnel, nommés « Sages », dont Alain Juppé, ont été saisis pour vérifier la conformité d’un article du code civil à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel exceptionnellement à Bordeaux
« L’audience est ouverte », affirme Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel. Après avoir contextualisé et expliqué le déroulement de la séance, les différents avocats défilent à la barre, disposant de dix minutes pour étayer leurs propos : l’avocat de la partie requérante ouvre le bal. Le suivant représente les laboratoires Servier, fabricants du Mediator. S’ensuit, l’avocat des caisses d’assurance maladie du Val-de-Marne, et enfin le chargé de mission au secrétariat général du Gouvernement, témoigne pour Elisabeth Borne, Première ministre.
Après avoir argumenté dans des sens divers, les avocats se voient questionnés par quelques Sages, notamment Corinne Luquiens, François Seners et Michel Pinault. Si le contexte de cette question prioritaire de constitutionnalité est bien le Médiator, les débats ne concernent que des arguments purement juridiques et des interprétations de droit. Des débats qui ont cependant eu un grand succès auprès des étudiants en droit.
Des étudiants en droit comme principal public
Constituant la majorité du public, ces derniers sont captivés. Le silence de plomb pesant sur la salle en est le parfait témoin. C’est le cas d’un groupe d’élèves en 3e année de droit public. « Il s’agit de la première audience aussi solennelle, qui plus est ouverte au public, à Bordeaux », déclare l’un d’entre eux. Ils en ont donc profité : « On est venus hors cadre scolaire. C’était une sortie en lien avec nos études mais libre. »
Une démarche que Nicolas Richardoz, avocat au barreau de Bordeaux, appuie. « Les jeunes doivent aller voir comment ça se passe sur le terrain. Certains veulent devenir avocat, néanmoins ils n’ont jamais mis les pieds dans un cabinet ou au tribunal », souligne-t-il.
16 heures sonnent, l’audience est levée. Les membres du Conseil constitutionnel délibèreront à Paris avant de prendre une décision. Et puisqu’une procédure judiciaire est en suspens du fait de cette saisine, le délai de décision des Sages ne peut excéder 3 mois. En réalité, dés le 10 mars, Laurent Fabius, accompagné du secrétaire général du Conseil constitutionnel, viendra à la faculté de droit de Bordeaux pour rendre la décision publique et expliquer son sens. Le but est également d’échanger avec étudiants et professeurs pour qu’ils comprennent la fonction et le raisonnement des Sages. À noter que les décisions que prend le Conseil constitutionnel sont « insusceptibles de recours et s’imposent à toutes les autorités de la République », témoigne Laurent Fabius.