L’Audace, racontée par la championne Marie-Amélie Le Fur


Quatre fois, elle est revenue des JO paralympiques avec des médailles. Pour Marie-Amélie Le Fur, l'audace c'est beaucoup plus qu'un concept.

Marie-Amélie Le FurTuan Nguyen

Marie-Amélie Le Fur

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 23/08/2022 PAR Cyrille Pitois

Avec neuf médailles paralympiques, Marie-Amélie Le Fur n’est pas la moins légitime pour venir parler de l’audace, ce mercredi 24 aout, dans le Bordelais, devant l’université d’été Hommes-Entreprise. Si elle reconnait ne pas s’être réveillée chaque matin en se demandant où elle allait faire preuve d’audace, elle relit son incroyable parcours pour partager avec les entrepreneurs, quelques enseignements sur les secrets du succès. A commencer par un constat : le chef, le président, le leader, le manager n’est pas celui qui sait tout ni qui sait tout faire. Plutôt celui qui sait mettre en musique la complémentarité d’une équipe.

Jeune, elle voulait devenir pompier. Née en 1988, elle est aujourd’hui à la tête d’un incroyable palmarès sportif fait de neuf médailles paralympiques glanées à Pékin, Londres, Rio et Tokyo et une moisson dans les championnats du Monde et d’Europe en 100, 200, 300 et 400 mètres avec quelques détours par le saut en longueur. Et comme Marie-Amélie s’intéresse tellement plus aux autres qu’à elle-même, elle est aussi présidente du comité paralympique et sportif français depuis 2018.

Pour parler de l’audace aux chefs d’entreprise, elle arrive avec une pleine valise d’exemples de situations où elle aurait pu ou dû se décourager face à l’adversité. A commencer par cet accident de scooter en 2004, qui lui impose une amputation. Elle saura développer le mental pour reprendre la course quatre petits mois plus tard et enchaîner les performances sur le stade et dans sa vie, au sprint comme à la longueur.

Apprendre à affronter l’inconnu

Retirée de la scène du sport de haut niveau depuis les derniers JO de Tokyo, elle a assez écrit et parlé sur cette vie de performances pour s’attarder sur le concept de l’audace. « Dans ma vie le sport et le handicap se mêlent et au long de ce parcours, le concept d’audace s’est imposé à moi. Je n’ai pas forcément cherché l’audace. Mais la façon dont j’ai cherché la performance, m’a amenée à faire preuve d’audace. L’objectif de mon témoignage auprès du monde de l’entreprise, c’est de me décentrer de mon périmètre pour que ce discours puisse coller au quotidien des entrepreneurs. Comment la construction de l’audace se traduit dans des petites décisions du quotidien ? Comment le développement de la performance individuelle permet d’enrichir le travail du collectif ? »

La boîte outils constituée par Marie-Amélie devient alors une botte secrète comme sa recette pour franchir les limites de l’inconnu. « L’inconnu n’est pas quelque chose de naturel. On en a peur. Il faut apprendre à l’affronter et entrainer les entrepreneurs sur ce chemin, les rassurer, leur montrer qu’il y a beaucoup à apprendre de l’inconnu, les transformer en bons amis de l’inconnu. » Elle le reconnaît bien volontiers, quand on se retrouve face à une difficulté, on identifie pas toujours les solutions. « Concrètement, on ne se dit pas : je vais m’en sortir en faisant preuve d’audace. Il faut des clés pour la mettre en place et aussi accepter de l’accompagner de la résilience. Car on peut se tromper parfois. »

Bousculer les règles de la société

Si les cours magistraux d’audace sont rares, il convient selon la championne de « s’acculturer aux clés de la mise en place de l’audace. On a tous les clés au fond de nous. Mais tout le monde n’a pas accès à la caisse à outils qui permet de les activer. Quand j’étais dans mon parcours, je vivais avec les gens qui m‘ont accompagnée. C’est eux qui m’ont aidée progressivement à trouver ces clés. Maintenant que je dois mettre des mots sur cet itinéraire, en rédigeant un livre ou en préparant des conférences, je parviens à décrire une forme de méthode. » Une façon de mettre de la dynamite dans nos projets et de l’ambition à nos objectifs? « L’audace est une des valeurs de vie importante. Elle nous ramène aux limites et aux règles. Si on vit dans les règles de la société, si on se contente de ce qu’elle attend de nous, alors oui l’innovation fait peur. Si on ne va pas flirter avec les règles, on ne crée pas de performance. Il faut brusquer la société, ses limites, ses codes et ses cadres. »

Une posture dont ne se départit pas la sportive, depuis qu’elle tient les rênes du comité paralympique et sportif français. « Cette fonction m’a appris beaucoup de choses et le fonctionnement de cette structure se rapproche de celui d’une entreprise avec aussi une dimension managériale. Mais j’ai tout à fait conscience de ce que je suis capable de faire et de ce pour quoi je n’ai pas de capacités. On n’attend pas de moi de savoir tout faire, mais plutôt d’accompagner l’équipe à faire les bons choix, à prendre la bonne route pour qu’on avance tous ensemble. Une des réussites de l’entreprise c’est d’accepter qu’il ne peut y avoir une personne qui sait tout, qui voit tout. »

Parler du paralympisme autrement

Et dans le paralympisme il reste encore beaucoup à faire. « Il y a encore beaucoup trop de préjugés autour du sport et de la pratique par des personnes en situation de handicap. Il va falloir oser en parler différemment, et simplement considérer les athlètes paralympiques comme des athlètes de haut-niveau, car c’est ce qu’ils sont ! Et il y a encore du travail sur la relation des Français au paralympisme d’ici les jeux de Paris. La France avait raté le train de la considération de ces athlètes de haut niveau. On rattrape un peu de retard, mais il faut encore agir vite et collectivement par exemple dans le champ du sports-loisirs. »   

Cette femme qui n’a jamais pu compter que sur ses jambes pour sprinter vers le succès, a pourtant les yeux rivés vers le collectif et une certaine idée de la façon de faire société ensemble. « J’espère qu’on est dans une société de l’audace, mais d’une audace qui doit être motivée par de bonnes raisons. Une audace mal orientée, mal définie, peut devenir préjudiciable pour soi et pour la société.» 

Vincent LindonTuan Nguyen

Vincent Lindon

Le livre : « Fais de ta vie un rêve », Marie-Amélie Le Fur, Ed Plume d’Elephant, 2019

L’Université Hommes Entreprises :  Point de rencontre des décideurs réunis autour d’une conviction, l’entreprise peut être performante humainement tout autant qu’économiquement. Pour la 28e édition, il est possible pour des participants du monde entier d’assister en visioconférence.

Le partenariat : Un rien C’est Tout, association bordelaise qui agit concrètement pour le droit et la dignité, l’enfance, la santé et l’environnement. Son parrain Vincent Lindon s’exprimera mercredi après-midi.

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