« Couleur de Peau : Miel » de Jung et Laurent Boileau


Pascale Rousseau-Dewambrechies

« Couleur de Peau : Miel » de Jung et Laurent Boileau

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 29/05/2012 PAR Pascale Rousseau-Dewambrechies

Jung, petit garçon coréen, a cinq ans quand il arrive en Belgique dans sa famille d’adoption. Il ne parle ni français, ni flamand, il a été abandonné à Séoul, trouvé sur un marché par un policier qui l’a conduit à l’orphelinat, déclaré « adoptable » à l’international, comme près de 200 000 enfants coréens le seront. Pour « s’évader », mais aussi pour comprendre, saisir quelque chose de lui-même, Jung a appris à dessiner. « Je ne dessinais pas mieux qu’un autre, mais j’ai voulu apprendre », faisant ainsi du dessin une nécessité vitale. D’abord bande dessinée, Couleur de peau : Miel prolongement de son travail de dessinateur, est aujourd’hui une autobiographie filmée. Avec intelligence et sens de l’image Jung aidé de Laurent Boileau, mêle avec un incontestable succès, le dessin animé (3 et 2D), la mise en scène personnelle et les images d’archives. De ce cocktail nait une œuvre forte, drôle et poétique.

Les deux auteurs nous donnent à voir un récit atypique, mêlant donc trois formes. Par le dessin animé, nous entrons dans l’enfance et l’imaginaire de Jung par les images réelles nous accompagnons Jung adulte en Corée, à la recherche de ses origines; par les archives, nous révisons l’Histoire, celle que l’on dit grande, ici la partition de la Corée en deux parties, nord et sud.

La couleur de la peau de Jung n’est pas « jaune », ou « noire » mais miel
Si la force et la beauté du film résident dans le dosage si bien organisé que jamais il n’y a rupture entre les différents procédés de narration, ceux-ci au contraire s’enchainant et se mêlant pour lui donner une saveur particulière, les spectateurs les trouvent aussi dans le personnage/la personne de Jung qui avec humour et recul parle de sa quête d’identité plus que de l’adoption. L’auteur tient beaucoup à cette nuance. La couleur de la peau de Jung, probablement de père américain et de mère coréenne, n’est pas « jaune », ou « noire » mais miel, comme l’indique sa fiche d’identité à l’orphelinat. De son passé coréen, il reste deux petites photos aux bords dentelés que Jung devenu adulte fait tourner entre ses doigts. Dans les années 70/80, une adoption sur trois en Europe était celle d’un enfant coréen. D’ailleurs une petite sœur Li (Valérie) arrivera plus tard dans la famille de Jung.

Jung, qui ne cache rien de ses difficultés d’intégration, son refus pendant des années de fréquenter les autres enfants venus de Corée, son émoi « amoureux » pour sa sœur ainée, le racisme ordinaire dont il est victime comme les autres « chinetoques », sa relation avec sa fratrie, ses parents et sa mère en particulier, son rejet, à l’adolescence d’une situation qui le dépasse, comment et en quoi in fine, il a réussi sa quête quand d’autres ont échoué. Parfois dramatiquement.

Qui suis-je ? Couleur de peau : Miel est un film pudique et intelligent sur un sujet toujours méconnu car toujours unique, toujours personnel. Jung donne des réponses qui certes sont les siennes, mais parlant de son point de vue, celui de l’adopté dans un autre continent que celui de son origine, il incarne soudain un réel qui nous propose de nous éloigner des idées toutes faites et autres reçues. Sans manichéisme, grâce à son art, Jung est devenu une belle personne qui a accepté d’être d’ici et d’ailleurs, qui a accepté sa part d’inconnu, qui a fait de sa double culture une richesse… Jung montre sans démontrer. Jung est trop délicat pour nous vouloir nous donner une leçon. A nous d’apprendre !

AVANT PREMIERE Mercredi 30 Juin 20H30 au cinéma Le FESTIVAL à Bègles
Sortie en salles le 6 juin 2012.

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